Gainax a son Evangelion.
Bones a son RahXephon.
Sunrise a son Argento Soma.
Je sais, c’est assez provocateur comme intro. Provocateur et pas vraiment pertinent. Mais c’était le moins que je puisse faire pour vous accrocher à la lecture de cette critique sur un anime dont, probablement, vous n‘avez jamais entendu parler.
Argento Soma est une série de Sunrise produite en 2000 ; une époque où les films et séries cultes étaient trop nombreux pour laisser leur place dans la postérité à des productions "normales", ne bénéficiant pas de moyens ou d’une audace exceptionnelle. Pourtant, des idées, Argento Soma n’avait pas l’air d’en manquer.
Vers 2050, la Terre est attaquée par des aliens aux intentions peu pacifiques. Les militaires parviennent à contenir l’invasion, mais l’ennemi revient sans cesse et toujours plus puissant. Au milieu de ce bordel, on suit les déboires conjugaux de Takuto Takeshiro, ingénieur en aérospatiale. Le jeune homme est en froid avec sa meuf, Maki, avec laquelle il aimerait recoller les morceaux. Un jour, il finit par découvrir que sa copine travaille au service d’un scientifique illuminé, qui tente d’assembler des restes d’alien pour créer une créature hybride, le Frank.
Je ne vous fais pas un dessin : l’expérience tourne court et la créature à peine réveillée fait tout exploser avant de s’enfuir. Le scientifique est tué, et Maki également. Le seul survivant est Takuto lui-même, qui s’en sort grièvement blessé et avec la moitié du visage horriblement défigurée. En un instant, le jeune homme a tout perdu. Il ne lui reste que la folie et la vengeance…
La suite est déjà plus classique : organisation militaire chargée de combattre les envahisseurs - ici appelée FUNERAL, fillette ingénue capable de communiquer avec le monstre de métal, et beaucoup, beaucoup de combats de méchas contre des aliens aux pouvoirs toujours plus étranges. En vérité la principale carte que Argento Soma a à abattre, c’est son personnage principal, Ryû Soma (l'alter-ego de Takuto). Scarifié, tourmenté et haineux, il incarne l’archétype du héros d4rk aujourd’hui décrié, mais qui trouve plutôt bien sa place dans ce type de série. Dommage que le reste du casting ne soit pas à la hauteur, d’autant que le nombre total de personnages récurrents est étonnamment réduit – une douzaine au plus.
Le schéma narratif de la série est identique à celui de NGE. Un alien apparaît, il défonce les militaires, mais heureusement les mechas des protagonistes sont assez malins pour trouver son point faible et le détruire. En attendant le suivant. Et celui d’après.
Ce schéma de monstre de la semaine fonctionnait dans NGE grâce la variété des ennemis et l’intensité des combats. Deux choses qui font défaut à Argento Soma. L’anime manque de moyens et de talent pour offrir un divertissement visuel et sonore apte à faire oublier la répétitivité du récit. Une erreur fondamentale est par exemple que tous les ennemis ont le même skin ; seule la taille change (parfois). L’animation et le chara-design sont grossiers, bonjour les réutilisations de séquences et les nez qui se barrent du visage au milieu de l’action. Pareil pour les décors et la musique : c’est bien, mais pas bon. Cela dit, Sunrise a quand même une petite expérience dans le domaine lorsqu'il s'agit de faire danser les boîtes de conserve, et le fait savoir dans certains combats qui ne manquent pas de panache. Les épisodes 12-13 en sont témoins.
L’intrigue est rondement menée, avec les secrets, trahisons et introspections qui font le sel de ce type d’anime. Argento Soma évite le mysticisme étouffant d’un NGE, mais il choisit également de virer toute forme de fan-service ou même d’humour simple, ce qui donne à la série un côté austère, pour ne pas dire sec, un peu à la Gundam. C’est à cause de cela que les personnages n’ont aucune force, et que l’on ne retient que si peu de choses de Argento Soma ; à l’inverse du très intéressant Infinte Ryvius, produit par la même équipe quelques années plus tôt.
Dans le monde impitoyable des "eva-like", peu sont ceux qui arrivent à exister suffisamment pour faire oublier qu’ils ne sont que des ersatz de la série culte de Hideaki Anno. A ce petit jeu, source intarissable de débat entre amateurs de japanime, Argento Soma fait figure d’outsider… Ce qui le rend finalement assez attachant dans ses maladresses.
Les plus
- Protagoniste ambigu et troublant
- Trois premiers épisodes excellents
- Du mecha en quantité et en qualité
- Quelques mélodies sympas
Les moins
- Un schéma narratif connu et répété
- Réalisation pas au niveau
- Personnages secondaires transparents
- Mecha-design atroce