En réponse à la vidéo hilarante du joueur du grenier sur sa vision des animés «pour fille» (un grand merci à toi ô Grand Vénérable Maître Deluxe^^), il en est qu'il faut absolument citer : Candy Candy, le shojo qui a fait pleurer des millions de petites filles dans les années 1980.
Suite à un conflit juridique entre les auteures du manga, l'animé n'est plus diffusé depuis 1990. Long feuilleton de 115 épisodes, la critique se basera sur de très vieux souvenirs d'enfance (en fait c'est une excuse bidon pour éviter de se retaper la série fleuve). Les producteurs de la série ont beaucoup trop allongé l'animé par rapport au manga. Réalisé il y a 36 ans, le graphisme télévisuel est marqué par son temps. Même des yeux nostalgiques doivent reconnaître le temps qui passe. Ils arrivent à se consoler en redécouvrant les traits du manga, largement supérieur à l'animé.
La paire OP/ED fut bien reprise en français. L'OP est plus dynamique et enjoué que l'ED, il sent bon le retour en enfance. Portée par la douce voix de Dominique Poulain, la ballade de l'ED demeure agréable à écouter, idem pour la version originale japonaise. A déceler dans l'ED le beau travail sur les robes élégantes et les décors.
L'histoire du shojo se centre sur les joies, les peines et les amours d'une orpheline de sa naissance jusqu'à sa majorité au sein d'une famille riche. Résumée comme ça, cela semble pas folichon pour le public masculin qui aura certainement tendance à vouloir prendre ses jambes à son cou. Seulement il raterait comment Candy kickboxe avec punch les manigances ourdis par 2 êtres infâmes au physique d'humain : un gars crapuleux et une fille mesquine de chez mesquine. Actarus, le prince de l'espace et son robot combattant à corne Goldorak peuvent aller se faire voir. Plus réaliste, une fille elle au moins, va pas combattre de vilains golgots extraterrestres sortis de nulle part. Jusqu'à aujourd'hui, Vega a toujours pas envoyé de troupes maléfiques sur Terre, par contre des gars et des filles qui ne cherchent qu'à empoisonner votre vie, on en trouve à la pelle.
Etats-Unis- fin du XIX siècle, deux bébés se retrouvent devant la porte d'un orphelinat, l'un est surnommé Candy neige et l'autre Annie. La première est blonde et la seconde brune. Inséparables pendant 10 ans, Annie finit par être adoptée par une famille riche. A cause de son nouveau statut, elle fera comprendre lâchement à Candy qu'il faut couper tout lien avec elle. Première trahison, premières larmes d'une longue série. Les larmes fontaines de CDZ ou de Ken le Survivant sont des pipi de chat comparées à celles que versera notre demoiselle.
Toute triste, Candy s'enfuit sur une colline et là sous un arbre, elle fait la connaissance d'un personnage capital « le Prince des collines », celui qui déterminera le destin de notre héroïne grâce à une phrase magique. Des paroles qui permettront à notre protagoniste de faire face aux moments difficiles de sa vie. Inutile d'appliquer ici le stéréotype de la jeune fille ultra douce, ultra niaise et bonne cuisinière qui attend sagement le garçon de ses rêves avec de longs soupirs, Candy c'est le courage face à l'adversité tout en gardant le sourire.
Notre belle blonde sera aimée mais particulièrement détestée pour sa joie de vivre. Véritable garçon manqué, Candy désobéira à maintes reprises aux règles strictes. Selon les critères de la société anglaise de l'époque, elle ne se comporte pas comme une jeune fille «convenable». Si on analyse bien, Candy est un anime harem inversé plus intelligent que les adaptations débiles de jeu de drague de maintenant. Là où une cruche sans personnalité réussit on ne sait comment à séduire des têtards aux cheveux colorés, les amoureux de Candy eux ont plus d'aplomb.
Il y aura tout d'abord le gars détestable, celui qui veut prendre par la force la jeune fille. Pas la peine d'espérer quoi que ce soit de lui, il est grillé. C'est le fameux gars crapuleux qui emmerdera jusqu'au bout Candy. Il se prénomme Daniel et c'est une véritable sangsue.
Heureusement face à lui, nous avons les protecteurs. Le tout particulier rempli de mystère et qui réservera une surprise jusqu'à la fin: le Prince des collines.
Viendra ensuite le premier grand amour : Anthony, sosie du prince mais non dénué de sa propre personnalité. Chevalier prêt à défendre sa belle, l'aura de ce personnage tient plus au fait de la censure française de l'époque qu'à son réel intérêt. Dorothée fut même obligée de rassurer le public sur la santé d'Anthony alors que les petites spectatrices avaient bien compris la vérité. Mais bon, en ce temps-là, le point de vue des parents français différait de la culture japonaise sur un sujet donné. A noter que dans la VF, Anthony possède 2 voix différentes. En réalité, c'était l'adolescent comédien doubleur Vincent Ropion qui avait juste mué. Vincent Ropion est connu pour être la voix française de Ryo Saeba de City Hunter.
Puis apparaîtront Archibald et Alistair, 2 frères qui vont endosser les rôles de l'amour à sens unique. L'un est sérieux, l'autre fait figure du comique de service. Malgré sa gentillesse et sa bienveillance, le premier tentera d'oublier son amour pour Candy auprès d'une autre. Seulement lorsque le cœur d'un homme est pris, meilleure amie ou pas, une fille sait instinctivement qu'elle ne remplacera jamais celle qu'il aime réellement.
Concernant le second, Alistair est très particulier...Au final, il se dégage pour lui un infini respect. De rôle secondaire, sa transformation en rôle clef est remarquable. Un seul épisode suffit pour retourner la situation. C'est l'ami qu'on aime d'amitié, point final. Hélas c'est en le perdant qu'on s'aperçoit à quel point son amitié dépasse l'amour dans un certain sens. Sa perte n'en est alors que plus douloureuse.
Si nous comptons bien, nous avons 5 damoiseaux tombés sous le charme d'une blonde toute pleine de vie sans compter 2 ou 3 satellites. Le personnage d'Albert déteint par le fait qu'il soit un peu plus âgé que les autres et le mystérieux Oncle William est vraiment mystérieux. Mais 5, c'est vraiment pas assez !
Arrive alors celui qui surpassera les autres. C'est le plus beau, le plus terrible, le plus passionné et malheureusement c'est celui qui fera le plus souffrir notre amie, il s'appelle Terry diminutif de Terence.
Bien avant André Grandier, Cobra, Ryo Saeba, Spike, Edmond Dantès et Kenshin, il y eut Terry. Figure emblématique masculine qui allie force et sensibilité. Sa relation avec Candy n'est pas de tout repos. Parfois violent, parfois cruel, le tout est compensé par la profondeur de ses sentiments qui se révèlera sans pareil. L'évolution du couple en lui-même est très intéressante à suivre. Il passe par plusieurs stades: timidité, méfiance, peur, entraide, camaraderie puis révélation. Il ressortira de cette fusion un épisode magnifique et impitoyable avec une «scène dite de l'escalier». Ce moment est puissant . Il est facile de coucher sur papier des mots d'amour et de tristesse mais comment faire ressentir aux spectateurs des émotions si indéfinissables. C'est justement là qu'intervient la magie de l'art qui permet plusieurs degrés de lecture.
A 6 ans, une petite spectatrice peut ressentir une tristesse face à la douleur d'une séparation amoureuse sans la comprendre vraiment. Normal puisqu'elle n'en pas encore fait l'expérience. Une ou des rupture(s) amoureuse(s) plus tard , revoir l'épisode prend une toute nouvelle dimension. En superposant la fiction avec la réalité, le cœur de la petite fille devenue adulte peut vraiment saigner et pleurer. Le ressenti est plus fort, par conséquent il est plus émouvant.
Un couple qui s'aime si fort mérite d'être ensemble. Pour citer Sartre, l'enfer c'est les autres. Car ce serait oublier un autre ingrédient essentiel pour ressentir la peine: le camp des rivales ou autrement dit le camp des pleurnicheuses.
Commençons par Annie, la meilleure amie assez traitresse. Par son immaturité, elle mettra à l'épreuve l'immense amour de Candy. Elle possède quand même des qualités en dehors de pleurer, tant et si bien qu'elle finira par se faire pardonner. Bien sûr, il faut qu'elle tombe amoureuse d'un prétendant.
Elisa est la sœur de Daniel, aussi méchante, capricieuse que son frère. Son passe-temps favori est de mettre des bâtons dans les roues de l'héroïne. Sa jalousie et son envie en sont les principales causes. Elle utilisera de vils moyens pour culpabiliser Candy et réussira à la séparer de celui qu'elle aime. Il est facile de deviner de qui elle est amoureuse.
Suzanne, la plaie. Celle qui, en grande partie, est responsable de la terrible scène de l'escalier. Celle également qui tend des pièges. Son amour à sens unique lui fera comprendre qu'on enchaîne pas un homme avec de la pitié ou une tentative de suicide (censurée par la VF...). L'amour est l'absence d'ego.
Pour rehausser l'image négative féminine, Patricia est le personnage féminin la plus honnête. Forcément attachante, c'est en passant par elle qu'on prend conscience de l'importance d'Alistair, ce personnage si doux-amer.
D'un côté vous avez les personnages pro-Candy et de l'autre les contres qui réussissent à la frapper durement. En dehors des personnages cités ci-dessus, il existe toute une galerie de personnages basé sur ce schéma somme tout assez simple (Mme Pony, Soeur Maria, Tante Elroy, la Mère Supérieure, etc). Certes Candy parle essentiellement d'amour et joue un peu trop sur le larmoyant. Sauf qu'il finit sur un contexte particulier, la Première Guerre Mondiale qui permet d'exacerber toute cette tristesse (on sourira quand même devant certains anachronismes qui mélangent les années 1914 et les années 70).
Il faut souligner la force du personnage de Candy, gentille sans être niaise, généreuse naturellement. C'est un bon équilibre entre faire face à son destin malgré les coups durs et éviter de se laisser aller au désespoir et à la rancœur.
Shojo de référence tout comme Versailles No Bara, Candy a laissé une chose importante : le goût de l'exigence.