Comme un mi-cuit réchauffé

» Critique de l'anime Chûkan Kanriroku Tonegawa par Sacrilège le
22 Décembre 2018
Chûkan Kanriroku Tonegawa - Screenshot #1

La décennie passée nous avait apporté un petit énergumène du nom de Kaiji, issu des mangas créés par Fukumoto Nobuyuki. Fort de son succès, une seconde saison est venue compléter la première, sans qu’aucune autre suite ne soit apparue pour contenter les fans. Kaiji (puis Akagi, et même One Outs) a été un très gros coup de cœur pour moi et s’est avérée être la seule série que j’ai regardé deux fois. C’est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup.

Un spin-off est finalement sorti cette année, du même auteur, faisant de moult références à Kaiji, histoire de jouer sur la corde sensible de la nostalgie. Reprenant le même chara-design à la Picasso et les situations dramatiques à outrance sur grand fond de comédie et voix off omniprésente, la série avait tout pour plaire à ceux qui avaient apprécié l’anime central.

Toujours aussi bien doublée, et même avec des situations tirées par les cheveux, on ressent encore la critique globale face sur notre société actuelle, précédemment centrée sur les personnes ruinées et ceux qui en profitent, maintenant sur les entreprises japonaises aux multiples coutumes et procédures, le plus souvent hallucinantes, et encore plus quand cela est traité avec exagération.

Chûkan Kanriroku Tonegawa - Screenshot #2Les références à Kaiji sont légion et directes puisqu’on le cite clairement, histoire de situer l’action avant les événements relatés dans les deux saisons sorties précédemment, sans préciser quand exactement. Elles sont donc aussi évidemment là pour appâter le chaland. On nous laisse tout de même espérer son apparition à un moment donné, comme une cave remplie de secrets titanesques qui s’éloigne à mesure que l’on en parle. Heureusement, la série ne se repose pas uniquement sur cette carotte mais reste agréable à visionner dans son ensemble.

Critique cynique du secteur tertiaire nippon, on parvient à déceler une certaine camaraderie au sein des « hommes en noir » : les employés de la Teai qui sont autant d’agents Smith en devenir. Quasiment indissociables, l’anime réussit à mettre en avant un grand nombre d’émotions de leur part, dans un environnement qui logiquement exclu tout sentiment. Bien entendu, comme dans Kaiji, ça pleure beaucoup. Mais les larmes restent plus triviales, sans être factices pour autant. Comme si un simple petit aléa ou un coup de pression pouvait faire craquer un salarié au bord du précipice pour devenir un simple humain avec des larmes qui ruissellent sous une musique dramatique. La place de la femme dans l’entreprise nippone est également un des sujets traités par l’anime, bien que cela ne soit que sur une durée courte.

Chûkan Kanriroku Tonegawa - Screenshot #3Sans avoir de réelle continuité dans l’histoire (si vous loupez un ou deux épisodes vous n’y verrez pas la différence), les épisodes s’imbriquent bien même si tous ne sont pas pertinents. Travaillant tous les jours sous les ordres d’un patron tyrannique, mégalo et loufoque, les salariés ont comme garde-fou Tonegawa, qui lui aussi doit répondre de ses actes, tout en devant faire passer les idées saugrenues et brutales de la direction, mais également tout en cherchant secrètement à se faire apprécier de ses subalternes. Coincé entre le marteau et l’enclume, il n’a aucun homologue et peut très rapidement se faire détester de ses équipes comme de son patron.

La position du narrateur est assez intéressante (et surtout comique), bien que d’une importance relative selon les situations. Plutôt centré autour du personnage de Tonegawa, nous suivons grâce à lui ses idées, sans être pour autant dans une omniscience complète. Les effets visuels et sonores sont dans le même ton que l’anime, bordéliques et surprenants, aidant pour beaucoup au comique de situation. A noter également la présence d’épisodes « standalone », bien que chacun le soit à sa façon, centrés autour d’autres événements et personnages, comme l’homme sortant exceptionnellement du camp de travail forcé où finit Kaiji à un certain moment, appréciant à sa manière une journée en semi-liberté.

Je décris, je décris, mais je ne me mouille pas. J’ai des difficultés à être tranchée quant à cet anime. Il n’est ni bon, ni mauvais. Objectivement, il n’apporte aucune plus-value et n’est pas aussi pertinent qu’on pourrait l’espérer. Pour autant, j’ai pris plaisir à retrouver l’environnement atypique qu’on avait pu voir dans Kaiji (avec notamment un épisode sur le fameux pachinko), les sautes d’humeur des protagonistes, les commentaires et mises en abîme décalées ou encore ce design si particulier. Pour résumer, j’en garde le souvenir d’avoir passé un bon moment mais cela reste une série que je ne regarderai à nouveau assurément pas.

Verdict :6/10
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A propos de l'auteur

Sacrilège, inscrit depuis le 27/10/2005.
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