Nitaboh est un film au thème pas si courant: le shamisen, instrument de musique traditionnel japonais. Plus précisément, il s'agit d'une adaptation libre de la biographie d'un joueur de shamisen ayant eu une certaine influence sur l'évolution du style de musique de son époque.
L'essentiel du film s'attache donc à décrire la vie de cet homme: son enfance, l'origine de sa passion, ses mésaventures, et la quête de son propre style de musique. Et la majorité des raisons pour lesquelles on peut manquer d'intérêt pour ce film viennent directement de cette partie-là. L'intrigue racontant la vie de Nitaroh est relativement cousue de fil blanc, ce à quoi on peut s'attendre si l'on est ne serait-ce qu'un peu familier avec ce genre d'histoires. Mais surtout elle est racontée sans passion: un terrible défaut pour un film parlant justement d'un joueur passionné. L'analogie avec un morceau joué mécaniquement, sans âme, semble ironiquement appropriée: tout le coté quête de soi, réalisation de sa passion, semble banal et peu inspiré, parce que Nitaroh apparaît comme un personnage effacé et sans relief.
Ce n'est cependant pas la seule chose que contient le film. Ce qu'on peut aussi y remarquer, c'est le passage d'une période à une autre.
L'action se situe à une époque charnière de l'histoire du Japon, le passage à une nouvelle ère et l'ouverture au reste du monde. On le voit légèrement dépeint en arrière-plan à travers un certain nombre de détails.
C'est une partie de cette transition que représente l'avènement d'une nouvelle façon de jouer le shamisen, mais aussi la lutte contre l'inertie et le conservatisme des traditions qui en résulte.
Nitaroh gosse pose déjà les questions qui fâchent. Pourquoi ne puis-je pas faire ceci si je ne suis pas une femme? Pourquoi ne puis-je pas faire cela si je suis fils de pêcheur? Et les adultes déjà conscients de l'état des choses de lui répondre que c'est "une affaire de rang social", ou de tradition.
Finalement, après ce point-là, Nitaboh a déjà dit tout ce qu'il avait à dire. Arrivé à la fin, la lutte de l'ancien style contre le nouveau n'a déjà plus aucun sens, et il ne reste plus que l'affrontement entre la rigidité des institutions traditionnelles et la nouvelle conception de l'artiste au sein de la société.
Touchons enfin un mot sur la musique, puisqu'elle devrait être de prime intérêt dans un tel film.
Les morceaux au shamisen sont peu variés et pas aussi impressionnants qu'ils ne pourraient l'être, la fin exceptée. De même, on a la présence d'insert song n'étant pas jouées au shamisen, qui ne sont pas mauvaises mais pas extrêmement convaincantes non plus. Il est dommage qu'alors qu'on parle de musique, la piste sonore semble un peu banale.
Nitaboh aurait beaucoup gagné à avoir plus d'ambitions pour son (ses?) personnage et la narration de son périple. Le fond du film représente une époque intéressante de façon satisfaisante, mais le reste a du mal à éveiller un véritable intérêt chez le spectateur, laissant une impression molle de "sans plus".