EIGHTY-SIX – Engagez-vous, rengagez-vous, qu’ils disaient…

» Critique de l'anime 86 - Eighty Six par Deluxe Fan le
05 Juin 2022
86 - Eighty Six - Screenshot #1

Eighty-Six est un light novel de Asato Asato (c’est pas une faute de frappe c’est son nom de plume) dont le récit se déroule dans la pays fictif de San Magnolia, qui pratique une discrimination entre ses habitants de l’ethnie des Alba, reconnaissables par leur peau blanche et leur cheveux argentés, et le reste de la population. Ces derniers sont parqués dans un territoire délimité, le « District 86 », où ils sont utilisés comme chair à canon. En effet, San Magnolia est en guerre depuis de nombreuses années avec la Légion, une armée de drones robotiques menés par une IA qui n’a d’autre objectif que de tout détruire sur son passage. La Légion semble avoir rasé toutes les autres nations du continent et San Magnolia est le dernier bastion de l’humanité ; en tout cas c’est ce que raconte la propagande du gouvernement. En vérité, le cours de la guerre est loin d’être en faveur de la République et la survie de L’État n’est due qu’aux habitants du District 86 qui pilotent leurs propres robots pour combattre la Légion. C’est ce secret que découvre Lena Milizé, officier au sein de l’armée, et nouvellement en charge de commander à une unité de « 86 » dont le leader local est Shinen Nôzen, un génie du combat surnommé le Fossoyeur…

86 - Eighty Six - Screenshot #2La grande particularité de Eighty-Six c’est que c’est une série de real robot, ce qui est tout à fait exceptionnel dans la mesure où le genre a été éradiqué des écrans et sa présence fortement amoindrie dans la production actuelle. Surtout, c’est une série de real robot produite par Kadokawa et Aniplex, les deux entités tenues responsables de la surproduction, de l’uniformisation et globalement du cancer de la japanime moderne.

Parmi les points intéressants de cet anime il y a la structuration du récit avec les deux personnages principaux. La plupart du temps dans ce type d’histoire tu as le personnage de la jeune fille naïve qui découvre l’horrible vérité auprès du personnage masculin qui lui est cynique et désabusé (on pourrait appeler ça la méthode Urobuchi). Dans Eighty-Six c’est exactement la même chose, à la différence que le personnage féminin n’est pas en contact direct avec le reste du cast et évolue dans son propre milieu, loin de la guerre. Cela donne une dynamique intéressante entre les personnages sur le front dans des combats ultra-violents d’un côté et le parcours de Lena qui fait face à ses propres luttes bureaucratiques. A partir de la deuxième moitié c’est encore mieux puisque cette structure disparaît et on se concentre uniquement sur l’équipe de Shinen et leur parcours au-delà des frontières de la République. Ce passage au milieu de la série où on quitte momentanément le conflit pour aller voir ce qui se passe derrière les lignes ennemies est le point le plus réussi de l’anime à mon avis puisque c’est le seul moment où le scénario n’est pas écrit d’avance.

86 - Eighty Six - Screenshot #3En revanche si on commence à entrer dans le détail du contenu de l’histoire, c’est tout de suite moins passionnant. Faire du real robot c’est compliqué, ça demande un certain niveau, or c’est justement ce niveau qui manque généralement aux light-novel qui sont par définition des œuvres jetables conçues pour être lues aux chiottes. Dès le départ on te parle de cet apartheid contre les habitants du District 86, avec les Alba blancs qui vivent dans un monde tout beau et propre pendant que les "colorés" sont mis à l’écart et martyrisés. Tout cela est abordé sans aucun contexte et avec des sabots aussi énormes que le chèque que Mbappé a reçu pour rester au Paris Saint-Germain. Je veux dire, heureusement qu’à trente piges j’ai eu la chance de regarder un dessin animé japonais tel que Eighty-Six pour me faire comprendre que la ségrégation raciale c’est pas bien quoi. A la fin de l’épisode 5 il y a une révélation cruciale pour le reste de la série (là aussi rappelant beaucoup les scénarios de Gen) et c’est traité par les deux personnages qui se parlent sur Whatsapp en buvant un café, paye ta mise en scène.

Cette « anime-fication » du récit de guerre est également visible avec les personnages, tout droit sortis du catalogue de stéréotypes de Kadokawa. Si on prend une série de qualité telle que Die Neue These par exemple, le récit traite de grandes questions politiques mais les personnages ont tous un comportement nonchalant et détaché qui non seulement les rend sympathiques mais permet également de prendre du recul sur les sujets parfois lourds qui sont abordés. Dans Eighty-Six c’est l’inverse, les personnages sont essentiellement des adolescents qui ne font que hurler et vociférer à l’exception du personnage principal Edgelord McCool qui se lamente du fait que sa puissance vient du fait que lui il est tellement blasé qu’il a même plus peur de mourir, tu vois. Dans un isekai débile ça passerait mais dans un anime de real robot il faut faire attention à ne pas écrire ce genre de bêtise. Le pire c’est qu’à partir de la seconde moitié on introduit ce personnage de fillette pleurnicharde qui va suivre le héros comme le morpion accroché à sa testicule et qui va asséner le spectateur de discours larmoyants délivrés avec un des doublages les plus insupportables que j’ai connu dans ma carrière. Imagine tu regardes Band of Brothers puis toutes les deux minutes tu as Paimon de Genshin Impact qui apparaît dans la série et commence à déblatérer des trucs dont t’as rien à battre, ça te donne une idée de l'attentat à l'intelligence qu'est ce perso qui a pas mal réduit mon appréciation de l'anime au final.

86 - Eighty Six - Screenshot #4La série est produite par A-1 Pictures, l’usine d’Aniplex qui lui sert à fabriquer de l’anime à la chaîne et dont la qualité des produits est aussi douteuse que les conditions de travail de leurs employés. Eighty-Six n’a d’ailleurs pas échappé à quelques déboires puisque plusieurs épisodes ont été retardés et certains carrément repoussés de plusieurs mois, et ce alors que la série était en split-cour ce qui veut dire qu’il y avait déjà une saison d’écart entre les deux moitiés de la diffusion ; ce qui donne une idée du chaos qui devait régner au studio sur ce projet. Heureusement cela ne se voit pas à l’écran ; je ne suis pas super fan du chara-design mais il a le mérite d’être propre, tout comme les décors qui eux sont plutôt réussis. Les robots quant à eux sont des sortes de crabes mécaniques qui n’ont l’air d’avoir aucune masse ni aucun poids, c’est étrange et cela ne donne pas des combats très palpitants à suivre, mais au moins les images de synthèse tiennent la route.

On peut respecter l’effort de Eighty-Six de proposer un récit de guerre relativement sérieux à une époque où plus grand monde ne cherche à occuper ce créneau, mais je mentirais si je disais que cette série a étanché ne serait-ce que 10% de ma soif de real robot. Les thèmes sont intéressants et la structure du récit est accrocheuse, mais les personnages sont vraiment mauvais et on sent partout le formatage de Aniplex – et le fait que Hiroyuki Sawano soit crédité à la composition de l’OST n’aide pas de ce point de vue-là. En ce qui me concerne Eighty-Six ce n’est ni un 8 ni un 6, c’est quelque part entre les deux.

Verdict :7/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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