ELLE A LES YEUX REVOLVERS ET LE REGARD QUI TUE MAIS J'AI TIRÉ LE PREMIER

» Critique de l'anime Ballroom e Yōkoso par jinrho78 le
18 Janvier 2018

Les animes de sport, ce n'est pas un scoop, ça ne date pas d'hier et ça a donné des trucs plutôt cool dont une perception du temps légendairement altérée par rapport à la réalité.
Par contre après avoir défriché à toutes les sauces même les plus bancales (le combat de toupie est-il un sport?), il a bien fallu se réinventer pour continuer.
On a arrêté les trucs hybrides (genre les combats de roller volant ou le basket avec jambes de robot) un peu trop audacieux pour retourner à une source encore inexploitée, oui je parle tout simplement de toutes les disciplines qui existent depuis un bail mais jugées trop ringardes ou trop tarlouze pour être susceptible de plaire... à l'époque!
Car les temps changent mesdemoiselles et messieurs! ce qui ne rajeunit personne j'en ai peur... mais ceci est une autre question.
Toujours est-il que Ballroom e Youkouso et sa danse de salon débarquent dans un contexte favorable et bien qu'il y ait de monde se bousculant au portillon, l'avantage est que chacun peut y trouver son compte selon son degré de "sportitude" revendiqué ou fantasmé.

L'histoire d'un Billy Elliot Japonais! c'est ce que j'ai pensé en lisant le résumé mais finalement le sujet est à peine effleuré et c'est bien dommage... cependant le point d'attaque de l'anime n'est pas tant de creuser la veine sociale que de consacrer le monde de la compétition!
Un truc pour les vrais quoi! les chauds! les durs! ceux qui ont arrêté de bouffer Mac do' et qui se lèvent le matin pour bosser au lieu de mater du porno aux frais du RSA et des allocs'!
Un truc de mâles suintants bombant le torse pour qu'on respecte son autorité! Un truc de bonhomme quoi...
Du coup on est un peu surpris quand on voit arriver Tatara notre petit gringalet effacé cherchant sa ride après le lycée et qui finit par flasher - non sans l'aide d'une charmante brunette - sur le hobby que votre grand-mère voulait partager avec vous mais que vous avez toujours esquivé! (on s'étonne ensuite que les valeurs se perdent...)

Ballroom e Youkouso ne se contente pas d'un pied-de-nez aux idées reçues non c'est plutôt un défi en fait :
ressortir un truc improbable comme la danse de salon qu'on avait oublié depuis le II em Empire et vendre le bordel comme un truc cool et accessible en lui administrant tout simplement le même traitement à la testostérone que ces copains en short (et pas que ceux en short). et ça marche! d'abord parce que ce type d'anime repose beaucoup sur ses personnages et sait mettre ce fer de lance à l'honneur!

En effet dans Ballroom e Yokouso tous ou presque ont un rôle essentiel à remplir dans le développement de l'histoire mais aussi dans la vie de Tatara.
Bien sûr ils ne garderont pas les feux de la rampe à tout instants mais tout en gardant Tatara au centre, ils alimenteront notre intérêt en effectuant un relais tout au long de l'anime.
Finalement cela crée des sortes d'arcs qui permettent d'apprécier le potentiel de chacun indépendamment de son rôle sur le long terme, assurant par là même, une rythmique en montagne russe au gré des compétitions. Le résultat est que l'oeuvre parvient à garder une cohérence tout au long de ses 24 épisodes.

Bon j'avoue que peu habitué des anime sportifs j'ai avalé le verre sans rechigner même si bien sûr le schéma de fond connu de tous ainsi que le discours "du quand on veut on peut!" en fera sûrement sourire plus d'un à juste titre. (moi j'ai voulu, j'ai pas pu mais je mets une option sur le droit de rêver).
Point d'abus cependant, afin de garder un minium de crédibilité, Tatara le looser malgré son aura de winner va devoir mouiller sa queue-de-pie pour rendre hommage à l'émulation de son groupe de rivaux et quitter le banc de touche.

Bon après pour ce qui est des personnages, bien qu'ils soient moins triviaux que dans Yuri on Ice, on aura néanmoins l'impression d'avoir déjà vu quelques tronches sur des affiches accrochées de-ci delà aux murs de la Japanimation. Cependant certains arrivent toutefois à assurer le spectacle et c'est tout ce qu'on demande pour avoir un point d'accroche.
On a par exemple l'antagoniste suffisamment nuancé pour le rendre classe, mystérieux, et inattendu comme il faut ou bien encore l'idole source d'inspiration emplie de charisme ainsi que d'un ego démesuré à la hauteur de sa stature corporelle.
Tatara? que dire... le pleurnichard en manque de confiance cherchant tout le temps ces mots? certains diront attendrissant moi je dirais plutôt chiant mais bon j'imagine qu'un connard présomptueux qui pèse déjà dans le game ne ravirait pas les foules. (ça a sûrement un lien avec cette histoire de tronches déjà vu trop de fois sans surprise sur des affiches)

Finalement l'ironie est que Tatara brille grâce à Chinatsu, une surprise bienvenue qui débarque à point nommé.
Il est facile de lui coller l'étiquette de tsundere mais finalement avec son caractère bien trempé, ce garçon manqué chiant et capricieux bénéficie d'un traitement de fond et de forme qui nous la rende autant attachante que légitime dans son comportement.
Chose qui personnellement, me comble au plus haut point étant donné (kif perso pour les garçons manqués) que le profil des héroïnes d'animation est d'un lamentable volant au ras des pâquerettes...(et hop le pléonasme gratuit)

Si on pouvait avoir l'impression jusque-là que c'était un peu: " meuf tu peux pas comprendre c'est un truc de mecs, ferme là et contentes-toi de sourire".
Cette relation va permettre de nuancer quelque peu le propos de l'anime et nous faire appréhender la discipline d'un regard moins unilatéral.
Il y a l'individu, il y a l'équipe, là il y a le couple et comme tout le monde le sait, se retrouver à deux sur une barque en pleine tempête n'est jamais une partie de plaisir (même sans tempête faut s'accrocher), pourtant il faut bien apprendre, au risque de couler soi-même en emportant l'autre au passage, et notre duo hors norme s'en rendra rapidement compte à ses dépens.
Parallèlement la question du "noir c'est noir et blanc c'est blanc" sera abordée à travers de rôles traditionnellement supposés, et remise en question, ce qui au vu sujet est tout à fait pertinent.

Est-ce que les autres comptent pour du beurre pour autant? oui et non car quand on parle de personnages, on parle bien sûr de rapport et ceux-là par contre, brillent d'une certaine justesse grâce aux nombreux petits détails surgissant dans les relations entre les personnages. Car ces rapports mûrissent dans le temps conjointement à l'histoire qui leur donne le nécessaire pour tenir la distance.

Et dans le feu de l'action qu'est-ce que ça donne? la tension est là et crée un choc qui fige la temporalité donc miraculeusement les mecs ont le temps de penser en pleine action!
Je ne sais pas si toi tu as déjà essayé de réfléchir lors d'un effort intense mais quand ça m'arrive très très occasionnellement j'ai pas le time pour disserter.
Enfin bon vu que c'est l'outil de base essentiel à la narration du bordel on va se contenter de sourire gentiment.

Côté animation Production I.G montre qu'il n'est pas impressionné par le studio Mappa et donnera à l'instar de Yuri on Ice, des Sakuga digne de ce nom! (la shadow danse de Hyoudou en impose)
Cela dit, tout comme son pote qui danse sur la glace, il y aura de nombreuses séquences résumées à des poses clé ainsi que de nombreux plans statiques ou recyclés qui finalement se mettent au service de cet état de fait et même si parfois c'est relou, on ne peut que saluer la logique finale. Car il ne faut pas perdre de vue qu'on parle de danse, de danse de salon qui plus est! donc de poses, d'endurance, de grâce, de prestance, on parle de tango et de valse donc d'une fucking passion et en conséquence d'une fucking joie intense que certains trouveront perturbantes, pour ma part j'ai trouvé cet entrain contagieux!

Avec ça on se dit ok, c'est vrai le bordel dans Black Swan, les murmures sur les amphétes' pour garder la forme... Il n'y a qu'à regarder les pupilles et les grimaces d'extase ultime tellement en souffrance, qu'on se dit que même en pleine descente d'ecsta', les mecs se donnent pas à moitié. Faut dire que Ballroom e Yokouso c'est comme pour Food Wars ou Kakegurui, un anime show! on veut juste transmettre le message quitte à en rajouter!
Enfin je dis ça mais bon... ça reste fichtrement bien étudié côté attitude et gestuelle du corps(mate une vidéo danse de compète' tu vas les voir les fucking sourires non-stop c'est pas du chiqué!)
Quant à l'expression du mouvement: un albatros qui déploie puissamment ses ailes avant de prendre son envol, le cou étiré et délicat d'un cygne, un aigle planant majestueusement dans les courants d'air...c'est magnifique!
et il n'y a pas que les personnages, les parallaxes aussi en tirent brillamment parti et rendent justice à la dynamique de gestes et de mouvements propre à la discipline! ça y va sur le travelling latéral en traversant la piste, ça tourne, ça vrille, plongée totale et inversée!

Reste qu'un truc me laisse perplexe... c'est cette faible place attribuée à la musique. quand on parle de danse, on parle aussi de musique et même si je pige le fait de mettre d'avantage l'accent sur la performance plutôt que sur la sonorité de fond, je me suis senti un petit peu lésé. Surtout que les thèmes de l'anime ont eu bien trop tendance à empiéter sur les classiques en cours de route.
( 10 secondes de Bleu Danube de Strauss ou Vuelvo Al Sûr d'Astor Piazzolla et voilà).

En définitive bien qu'il me soit arrivé certaines fois bien malgré moi, de chercher sans succès, la délicatesse de Saya Yamamoto, il faut tout même reconnaître cette force de cohérence intrinsèque et pas dénuée d'allure, à la réal d'Itazu Yoshimi.
N'ayant pas énormément poncé le manga, je ne sais si l'anime tient compte de l'esprit du matériau d'origine même si ostensiblement le traité graphique est bien là.
On peut bien regretter le fait que l'anime bénéficie d'un traité d'archétype dans son procédé et de ce fait, perde peut-être une sensibilité éventuelle et qui aurait pu se développer tout en subtilité.
Toutefois cela s'équilibre un peu par rapport à l'aspect pédagogique que revêt le sujet. Si les plus âgés bien sûr se contenteront peut-être d'un sourire en coin, les plus jeunes apprendront éventuellement, que la danse tout comme le patin à glace, est un sport qui demande tout autant d'effort et de sacrifice qu'un autre.
Je sais c'est d'un bateau à crever! à ceux qui l'ont oubliés cependant, rappelez-vous qu'à l'âge ingrat, fragile (et débile) du développement de-soi, qu'il n'est pas toujours évident de résister contre vents et marées aux quolibets et à l'écrasante pression de la majorité.
Donc à l'arrivée je dois admettre que la magie de Ballroom e Yokouso, puisque c'est tout ce dont il est question ici, fonctionne à merveille. Plus qu'à attendre l'anime sur le ballet histoire de bien marquer le coup.
("attend! il nous fait une déclaration ou un mea culpa? en plus il n'a quand même pas osé finir sur un putain de monologue niais et bien-pensant sorti de la CPE du collège ou de je-ne-sais-quel coatch spirituel?! si les gars... il a osé"... foutez-moi la paix, une fois n'est pas coutume je suis un babtou fragile ce soir.)

Verdict :8/10
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A propos de l'auteur

jinrho78, inscrit depuis le 13/04/2014.
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