Ils sont loin les temps de la révolution. Les temps où la face sombre et cachée de la communauté mangavore, c’est-à-dire l’espèce femelle, avait sonné l’offensive ouverte. On se souvient encore des réunions de crise dans les hauts lieux intellectuels du monde numérique, où le patriarcat menacé enchaînait projets d’attentats et caprices juvéniles. Le séisme avait été dévastateur. Finie la pornographie kawaii, voici venir l’ère du muscle. Mais désormais, la révolution est révolue, elle se mord la queue. Et pas dans un sens homoérotique.
Pour produire la troisième saison de leur best-seller, KyoAni s’est retrouvé devant une fâcheuse situation. En effet, ayant à cœur de participer pleinement à la révolution des mœurs et très accessoirement à des fins mercantiles, le studio avait sorti à la chaîne épisodes spéciaux et films stupides pour contenter l’appétit grondant des femelles en chaleur sujettes à des érections intempestives de leur porte-monnaie. L’évolution des relations avait fini par disperser Haru et ses pom-pom boys entre l’université au cours d’une palpitante recherche d’appartement, et le lycée où les plus jeunes se ridiculisaient en maillot bien moulant pour appâter de la chair à natation pour leur club. Il était pourtant impensable de laisser de côté un des protagonistes de l’histoire ; pensez au pauvre fan monogame, et à l’oseille qu’il ne va pas jeter aux pieds de son idole. Mais il était tout aussi exclu de revenir au passé des personnages. Et pour cause : les films s’en étaient déjà occupés, et il faut reconnaître que sexualiser des gamins de dix ans, ça fait des complications et de la paperasse niveau exportation.
KyoAni se trouvait donc le postérieur écartelé entre deux chaises, et la série s’en trouve de même. Le scénario a donc eu la brillante idée de faire d’incessants aller-retours entre le lycée, l’université et tous les lieux où pouvaient se trouver les personnages. L’anime s’est transformé en campagne présidentielle, avec décompte du temps d’antenne en fonction de la popularité. Bien sûr, pour donner un peu de cohérence à ce va-et-vient homoérotique, on a eu l’excellente et originale idée d’un énième ersatz de Rin. Le personnage, glacial et torturé, réussit d’ailleurs l’exploit de cristalliser ensemble et dans un même temps absence d’intérêt et tension homosexuelle. Son histoire est aussi trépidante qu’inutile tant elle se perd dans une foule confuse de personnages secondaires.
Pas étonnant que devant ce niveau de décrépitude, la réalisatrice Utsumi Hiroko ait décidé d’aller souiller d’autres plates-bandes. KyoAni pue le fric, comme cette vieille tante malade en soins palliatifs. Alors à moins que vous vous preniez de passion, façon naturalisme français moisi, pour les euthanasies animées, épargnez-vous cette troisième saison si vous avez un tant soit peu d’amour-propre.