Bien que sorti de nulle part l'an dernier, Fuse Teppō Musume no Torimonochō est parvenu à accomplir ce que bien peu de films d'animation récents ont été capables : ne pas se contenter de jolies animations pour raconter une histoire captivante et émouvante.
Pourtant sur le papier Fuse n'avait pas spécialement de quoi donner confiance : il s'agit en effet d'une adaptation d'un livre de Kazuki Sakuraba, la romancière dont l'adaptation du précédent roman, Gosick, n'a pas vraiment fait l'unanimité. Cette fois c'est le studio TMS et le réalisateur Masayuki Miyaki (Xam'd) aux commandes. Mais le plus étrange est de voir au générique un certain Ichirô Okouchi, qui a récemment pris la place de Mari Okada au poste de scénariste le plus moqué de l'industrie.
C'est donc avec une extrême méfiance que je me suis lancé dans ce long-métrage d'un peu moins de deux heures, et il faut croire que le film a déployé des efforts gigantesques pour parvenir à me convaincre de sa sincérité. L'histoire se déroule à l'époque du Japon féodal, durant l'ère des Tokugawa. Hamaji est une fille qui habite seule dans les montagnes et qui survit en chassant des animaux selon la technique transmise par son grand-père décédé. L'élément déclencheur est la lettre qu'Hamaji reçoit de son frère, Dôsetsu, qui l'invite à le rejoindre à Edo. En arrivant dans une ville énorme et inconnue, la jeune fille ne tarde pas se perdre et à s'attirer des ennuis, et doit son salut à Shion, un mystérieux garçon poursuivi par des bandits. Hamaji finit par retrouver son frère qu lui confie la vraie raison de sa venue ; il veut utiliser ses talents de chasseuse pour traquer les "Fuse", des hommes-monstres qui terrorisent la population et sur lesquels le shogun a placé une prime. Pour les reconnaître, il faut sentir leur odeur de bête et repérer une marque caractéristique en forme de fleur qu'ils portent sur la peau. Une marque identique à celle que portait ce fameux Shion...
Si l'histoire en elle-même n'est pas d'une spectaculaire originalité et se révèle assez prévisible, le ton léger et chaleureux du film emporte la sympathie et l'adhésion, et ce malgré un premier tiers assez mou. Ce ton est amené grâce principalement au chara-design, rond et simple, qui permet une grande expressivité des visages. De même le Japon féodal n'est pas ici austère et sombre comme dans un chambara classique, mais très lumineux avec des couleurs chatoyantes. Ainsi les personnages, qui ne sont pas des stéréotypes de japanime, perdent en beauté ce qu'il gagnent en humanité ; un choix judicieux pour nous faire adhérer à une histoire qui sans cela serait assez plate.
Car l'intérêt du film réside bien dans cette galerie de personnages dont on suit les aventures avec souvent un petit sourire sur le visage. L'animation ne fait pas des merveilles mais le film est une remarquable constance dans sa qualité, et la mise en scène parvient à rayonner occasionnellement (la scène du kabuki et sa mise en abîme du scénario, par exemple). Les doublages sont très réussis et la musique de Michiru Ôshima (FMA, The Tatami Galaxy) rend un travail on ne peut plus correct.
Fuse Teppō Musume no Torimonochō n'a pas les atours d'un blockbuster mais l'humanité et la sympathie que dégage son histoire et ses personnages rappelle, sans toutefois en approcher la valeur, les bons films animés grand public de Ghibli ou d'Hosoda. Une parenthèse agréable dans un cinéma d'animation japonais qui commençait à enchaîner les déceptions. 6,5/10