Girlish Number — Make Animation Great Again

» Critique de l'anime Girlish Number par Deluxe Fan le
15 Janvier 2017
Girlish Number - Screenshot #1

Chitose Kurusama est une jeune artiste qui tente de percer dans le monde des seiyûs, les comédiens de doublages qui font les voix des personnages de dessins animés. Malgré ses efforts, elle ne parvient qu’à obtenir des rôles de figurante. Un jour, elle réussit par hasard à décrocher le rôle principal dans un série animée adaptée de light novel. Le souci, c’est que la production de la série se casse la gueule en plein milieu, et que Chitose est loin d’être aussi talentueuse qu’elle le croit…

Girlish Number fait partie de ces séries dites « méta », qui portent un discours sur l’animation japonaise en elle-même, sur ceux qui la font et ceux qui la regardent. Il y a trois ans nous avions eu Shirobako, qui expliquait de manière assez didactique les étapes de la réalisation d’un anime. Girlish Number s’intéresse lui plus à l’aspect production, marketing et business de la chose. On y voit comment un LN random parvient à se faire adapter, comment une multitude de personnes viennent orienter le projet et surtout comment les petits dysfonctionnements s’amoncellent pour faire complètement capoter l’ensemble.

Girlish Number - Screenshot #2Car le grand avantage de Girlish Number, c’est qu’il ne prend pas de pincettes avec cette industrie qui ressemble de plus en plus à une usine à gaz. Ainsi les auteurs de LN sont dépeints soit comme de gros pervers en sueur qui cherchent à se taper les comédiennes, soit des cas sociaux incapables d’aligner une phrase en public – ce qui n’est probablement pas loin de la vérité étant donné que le scénariste de la série, Wataru Watari, est lui-même auteur de LN à succès. Les producteurs sont des ronds de cuir incompétents qui ne cherchent qu’à ramasser l’argent des sponsors ; les agents artistiques n’ont pas de scrupules à jeter leurs comédiennes qui ne rapportent pas assez pour les remplacer par des gamines malléables à peine sorties du lycée ; et les fans eux-mêmes s’en donnent à cœur joie sur les réseaux sociaux pour insulter et rabaisser le travail des gens.

Par ailleurs, Chitose elle-même est une véritable peste : dotée d’une personnalité cynique et méchante, elle ne cesse de parler des gens derrière leurs dos, de faire des caprices et de vouloir attirer l’attention vers elle (bref, une fille quoi). Le choix d’avoir comme personnage principal une authentique pétasse est plutôt intéressant et original, même si la série finira évidemment par retourner le truc en expliquant que c’est justement parce qu’elle a une personnalité de merde, insolente et égoïste, que Chitose est naturellement faite pour intégrer le show-business.

Girlish Number - Screenshot #3Au niveau de l’aspect comédie, Girlsh Number joue sur ce que les anglais appellent le « second-hand embarrassment », c’est-à-dire le sentiment de honte que l’on ressent lorsque l’on voit l’échec des personnages à l’écran. Certaines scènes sont presque dures à regarder tant les personnages s’enfoncent dans l’embarras : et dans une industrie du divertissement telle que l’animation japonaise, où tout le monde se connaît et où l’on discute tous les soirs au bar entre collègues pour langue-de-puter sur les voisins, la réputation est absolument essentielle si l’on veut continuer à trouver du travail. D’ailleurs, vers le milieu de la série le récit s’oriente vers une tonalité plus dramatique, avec notamment des conflits entre les comédiennes obligées de se montrer à leurs fans pour faire la pub de leurs animes, et leurs parents qui ne supportent pas de voir leurs filles ainsi exposées (on se demande d'ailleurs pourquoi il faudrait aujourd'hui que les comédiennes de doublage se montrent à poil pour vendre un dessin animé). Un élément assez intéressant mais peut-être pas assez développé, comme beaucoup de choses d’ailleurs dans cette série plus passionnée par son sujet que par ses personnages.

A vrai dire, je ne recommande pas le visionnage de Girlish Number, une série sympathique mais dont je vois mal qui elle peut intéresser au-delà de ceux qui sont vraiment versés dans cette connaissance des coulisses de l’industrie. Il y a de vrais bons instants dans cette série, qui se place au-dessus de la connerie habituelle, mais l’ensemble n'est pas suffisamment approfondi pour en faire un indispensable. De plus l’anime en lui-même est très mal réalisé, avec une animation pourrave et une mise en scène plate. Tout au plus on retiendra l’excellent Kazuya Nakai dans un rôle de connard irresponsable assez jouissif, et une mise en abîme complète même une fois la série terminée. En effet selon les premiers chiffres de ventes IRL, Girlish Number a fait un gros flop : un résultat approprié pour une série qui a su si bien capter l’essence de même de ce qui constitue la médiocrité ordinaire, cette industrie de l’animation japonaise où des artistes se tuent au travail pour des animes que personne ne regarde et dont tout le monde se fout.

Verdict :5/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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