Joker Game est sûrement la plus grande déception de cette saison. Si cet anime arrive à un tel niveau d’amertume de ma part ce n’est pas pour des nèfles. Au-delà d’un sujet que j’apprécie, l’espionnage est un genre que je côtoie fréquemment. C’est certainement ce qui coûte cher à Joker Game au niveau de mon jugement. En plus de cela, il faut noter que la série n’a pas manqué de soin sur la forme, mais c’est sur le fond que cela pêche. Ce qui a le don de m’énerver rapidement.
Quand je précise que la forme est réussite, ce n’est pas simplement au niveau de l’animation et des graphismes qui ne sont pas forcément là où j’attacherai une grande importance. La mise en scène, l’ambiance, le soin du détail sont amplement plus compliqués à mettre en place et Joker Game ne faillit pas sur ces points. Accompagné d’une bande son efficace, la réalisation parvient à nous transporter dans une époque avec des images historiques fidèles. Par contre, le charac-design n’est pas une franche réussite nous faisant passer par des visages quelconques et sans charismes.
En dehors du dessin, les personnages ne brillent pas non plus par leurs personnalités. J’ai lu dans beaucoup de forums et critiques que la plupart des gens étaient incapables de discerner les différents espions entre eux. Ce n’est pas particulièrement étonnant. La faute à la forme, mais surtout à leur écriture. Aucun des espions n’a d’épaisseur et ce n’est pas peu dire. J’ai eu l’impression d’avoir des automates en face de moi. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, être un agent ne justifie absolument pas ce manque cruel de profondeur. Ici, l’impression dominante est celle d’une ribambelle de personnages, tous particulièrement doués, voir invincibles, ne montrant aucun état d’âme ou de sentiments. Bref, l’espion qu’on pourrait naïvement qualifié de parfait, en plein d’exemplaire. Or, pour s’attacher un minimum à un protagoniste, il faut qu’il soit humain. Ce qui n’est en l’occurrence pas le cas. Surtout que le ridicule, c’est que l’anime souhaite nous vendre le meilleur de l’espionnage à travers ces agents d’une efficacité légendaire alors que les différentes intrigues sont d’une banalité affligeantes et ne peuvent pas démontrer des compétences hors du commun.
Parlons donc de l’histoire, le plus gros ratage pour ma part, car même avec des personnages sans consistance, ils auraient tout de même pu briller à travers un scénario captivant. Cependant, le choix a été fait de sortir une aventure par épisode. Les intrigues sur l’espionnage ont besoin de temps, de jouer avec son spectateur. Impossible ici avec une durée si courte, mais dans un sens ce n’est pas le problème principal. C’est simplement l’écriture qui est mauvaise, même avec si peu de temps, ça aurait pu être beaucoup mieux. Par exemple, un épisode se passant en Allemagne consiste seulement à montrer le chef de l’Agence D venir récupérer la liste du réseau d’espions après la mort d’un de ses hommes. La question pour le chef nazi autant que pour le spectateur est : où est la liste et comment faire pour la récupérer ? Et on nous sort une vieille solution, il vient la chercher sur le corps de l’espion mort avant qu’il soit sous surveillance… Voilà, voilà… Alors, ce n’est pas pour ça que l’épisode est vide d’intérêt, il ne se passe pas rien durant 18min, mais c’est tellement décevant et c’est tout le temps comme ça. En fait, l’anime cherche à nous expliquer - un bien grand mot - l’espionnage et l'importance de l'information en temps de guerre tout en taclant les instances moyenâgeuses de l’armée japonaise de l’époque. Seulement ce n’est pas une excuse pour nous sortir des intrigues bidons.
Nous continuerons justement sur le côté didactique de l’œuvre. Encore une fois, c’est plutôt faiblard. L’anime ne touche qu’en surface ce qu’est réellement l’espionnage. Alors oui, vous allez avoir le principe d’agent double évoqué, l’importance du « réseau » cité, quelques petits trucs pour effleurer le sujet. Beaucoup de temps va être passé à vouloir montrer ce qu'est un espion, le dernier épisode y étant totalement dédié. Mais en soit, le gros paquet, j’ai vraiment eu l’impression qu’ils passaient totalement à côté. L’espionnage, ce n’est pas ce qu’ils ont montré, pas plus que le personnage de l'espion. C’est bien plus complexe et vaste que cela, j’invite pour ceux qui sont intéressés à lire « La Compagnie : Le Grand Roman de la CIA » superbement documenté à ce sujet.
Tout ça pour montrer que je n’ai pas été convaincu par cet anime, qu’il m’a déçu sur un thème que j’affectionne pas mal. Navrant, car j’ai senti une réelle envie de bien faire de la part de l’équipe qui a confectionné cette série.