La Colline aux Coquelicots : c’était mieux avant
Personnellement, s’il y a bien un type dont je n’aimerais pas prendre la place, c’est Gôro Miyazaki. Après avoir été quasiment forcé de prendre la succession de son père Hayao, il se casse les dents sur Les Contes de Terremer et laisse une tache noire dans l’histoire du studio. Rappelé presque par dépit, il se voit confier un scénario écrit par Hayao, adapté d’un vieux manga shôjo populaire. Et le revoilà à porter tout l’héritage de son nom et du studio Ghibli sur les épaules. Non vraiment, je n’aimerais pas être à sa place.
Par contre, j’étais drôlement bien à ma place de cinéma, devant La Colline aux Coquelicots - Kokurikozaka-kara, pour les intimes. Et c’est de cela qu’on va parler.
L’histoire se déroule au début des années 1960 dans un Japon qui résorbe les blessures de la guerre, et qui commence son miracle économique, symbolisé par la tenue, en 1964, des Jeux Olympiques à Tokyo. Le personnage principal est Umi Komatsuzaki, une jeune fille que la perte de son père et l’absence de sa mère ont forcé à grandir très vite. Le film passe un bon moment à accentuer ce côté mature du personnage. Dans son lycée, un mouvement étudiant provoque des remous en cherchant à tout prix à protéger le Quartier Latin, une sorte de squat où les jeunes s’adonnent à des activités aussi diverses que la science, le journalisme ou encore l’organisation de débats politiques. Un des leaders de ce mouvement, Shun Kazama, donne même de sa personne pour alerter les autres élèves. C’est à cette occasion qu’il fait la connaissance d’Umi… Et s’en suit ce qui doit s’en suivre…
J’ai eu très peur durant le premier quart d’heure du film, car je me demandais vraiment où était l’histoire. Mais certaines scènes surprenantes, des personnages charismatiques me maintenaient éveillé. Et puis, à un moment très précis du film, un personnage prononce une réplique qui fait passer l’ensemble dans une autre dimension. Le récit passe de la comédie sympathique à un vrai drame romantique. Alors certes, on peut facilement prévoir la direction que vont prendre les évènements, et certains n’adhèreront surement pas à la tournure que prendront les choses, mais personnellement j’ai été bluffé. Il en faut des couilles pour parler de ça comme ça dans un film d’animation tout public.
L’autre chose qui m’a bluffé c’est le soin qui a été apporté aux décors et à l’ambiance sixties. Un peu comme dans le manga Quartier Lointain, le film se plaît à insérer tout un tas de petites références historiques et culturelles qui plongent littéralement le spectateur dans ce Japon de la grande époque. J’ai cru comprendre que le réalisateur a fait exprès de tirer sur la fibre nostalgique, quand il a vu les évènements dramatiques qui ont scarifié le Japon en 2011 (séisme, tsunami, Fukushima, etc). C’est réussi, et je dois dire que j’ai complètement adhéré.
L’OST accompagne ce mouvement avec des thèmes jazzy plutôt entrainants, mais que l’on oublie immédiatement après la fin du film. Je l’ai vu en VF - je sais, sacrilège - et si l’adaptation n’est pas trop mauvaise, le doublage lui est assez quelconque.
Mais n’oublions pas que l’on reste avant tout devant une romance, une vraie, avec des personnages au cœur chavirant qui se cherchent des yeux et que les épreuves ne feront que rapprocher… Un film plein d’émotions donc, qui peut laisser froid tout comme il peut vous faire vibrer. Encore une fois Ghibli redonne ses lettres de noblesse au genre tranche de vie avec ces « chroniques de la jeunesse japonaise d’après-guerre » qui nous rappellent que c’est dans les vieux pots que l’ont fait les meilleures soupes.
Les plus
- Le cadre spatio-temporel très travaillé
- Aucun défaut technique
- Une zoulie histoire d'amour
- Quelques développements malins
Les moins
- C'est très fleur bleue quand même
- Faut pas s'attendre à des robots tueurs et des monstres géants