Mahouka Koukou no Rettousei - Nouveau record d'overcheat établi

Mahouka Koukou no Rettousei, de son nom anglais The Irregular At Magic Highschool, et que personne ne m'en voudra d'abréger parMahouka, est l'adaptation anime plutôt médiocre du light novel du même nom.
Pourtant, cet anime regorge de qualités, avec malheureusement des défauts si monumentaux qu'on aura tendance à ne voir que ça.

Qui dit magiciens dit action... Ah ben non. Mahouka est au final plus à prendre comme un slice of life scientifico-magique avec quelques obstacles de-ci de-là, que comme un véritable anime d'action et de combats. Le récit est découpé en arcs, avec une intrigue par arc, qui se résume grosso modo à du blabla pour un peu de baston. Un tel découpage avait été une véritable réussite à Monogatari Series, mais je ne ferai pas l'insulte à ce dernier de le comparer à Mahouka, le rapport de qualité n'étant pas le même. Disons cependant que découper le récit en plusieurs parties est une bonne chose, on a déjà tendance à être contents quand un arc se termine, je vous dis pas si ça avait été une seule histoire.

Que nous raconte Mahouka ? Un lycée de magiciens, un monde assez compliqué mêlant sciences et magie le plus souvent dans des histoires politiques embrouillées avec des conflits qui éclatent tous les quatre matins. Au centre de cet univers, un frère et une sœur, Tatsuya et Miyuki Shiba, aux passés mystérieux, qui rentrent dans cette fameuse académie à la recherche d'une vie tranquille qu'ils n'auront évidemment pas.

Le premier point fort de Mahouka, c'est son univers. Certains hurleront au baragouinage pseudo-scientifique juste bon à faire penser au spectateur qu'il est idiot, il n'empêche que si on s'attarde deux secondes sur la question, on se rend compte que l'auteur a sacrément réfléchi à la chose. Je vous mets au défi de trouver une autre série du genre où la magie est poussée à un tel point. Amateurs de magie classique, passez votre chemin, ici, elle ne va pas sans technologie - laquelle est très avancée due à un univers futuriste. De même, on ne peut que saluer les efforts de réalisme entre les différents conflits diplomatiques, ou du réalisme quant aux positions magiciens/non magiciens/magiciens "pas doués", un véritable univers de discrimination qui engendre son lot de situations dangereuses. Il y a donc un vrai souci de créer un monde, avec ses dessus et ses dessous, ses avantages et ses inconvénients, et même si on aura parfois tendance à être un peu perdu, on est bien obligés d'admettre que c'est bien pensé - et certainement pas assez développé dans l'anime.

Deuxième point fort, c'est la réalisation. Le chara-design est agréable et se maintient sans défaut tout au long de la série. L'animation est parfois un peu étrange avec des effets de "flou" curieux, mais elle est fluide et les combats sont dynamiques. C'est très beau à regarder, même si l'anime a un petit côté que je qualifierai de "froid" dû à l'absence de couleurs chaudes. Il n'y a pas grand chose à dire sur la musique. Nous avons un premier opening très bon, un deuxième moins (et à caractère incestueux complètement ridicule) avec un premier ending insupportable pour un second très sympathique. Les OST sont correctes, même si certaines discutables ; du rap français n'était peut-être pas la meilleure option.

Malheureusement, Mahouka a une une seule réelle, en fait faiblesse. Une faiblesse monumentale, ses personnages. Ils sont intéressants. Tous. Mais il y a deux détails qui coincent.

Kirito, symbole du cheat ? Nice, représentation du tout-pour-le-héros? Pfff. Laissez moi vous présenter Tatsuya Shiba, aussi surnommé God Tatsuya pour les intimes.

Tatsuya est censé être un nul. Il est dans la pire classe de son école, quand même. Ce qui ne l'empêche pas, dans le désordre, d'être un technicien de génie (et également un des inventeurs les plus célèbres de son époque tant qu'on y est), un magicien plutôt pas mal quand on sait qu'il maîtrise une magie super-rare, un guerrier exceptionnel qui oneshot en général ses adversaires, un membre de l'armée assez bien estimé, un élève super doué vu qu'il a d'excellentes notes et un vrai tombeur par dessus le marché vu toutes les filles qui bavent à ses pieds. En plus d'avoir le look du beau brun mystérieux de-la-mort-qui-tue. Et des flingues parce que ça fait classe. Et d'être l'élève d'un ninja hyper reconnu, n'oublions pas. Et...

Et vous l'aurez compris, avec un palmarès pareil, nous avons un héros qui remporte le concours de cheat de l'année, et Kirito peut aller se chercher un meilleur avatar. Cependant, ce n'est pas gênant en soi. Combien d'animes, de nos jours, ont un héros qui se dit faible et qui est en fait méga fort avec un passé super tragique qui justifie tous ses super-pouvoirs ?

Je vous arrête là, avec le premier point qui va démonter la phrase si dessus.
Zero background. On nous présente un personnage qui pourrait aller casser la figure à Dieu lui-même s'il venait lui chercher des noises, et s'en tirer sans égratignure. Mais on ne nous dit pas pourquoi. On ne nous dit pas pourquoi ce héros est devenu aussi fort, ce qu'il a pu vivre pour en arriver là. Il est comme ça et c'est tout. Et nous on se contente des deux trois indications vaguement données en vingt-six épisodes. Sincèrement, je ne sais pas à quoi pensait le scénariste en occultant complètement le passé de Tatsuya, mais c'était le pire choix à faire. Le public se fiche d'avoir un protagoniste tout-puissant, mais il veut savoir pourquoi, et ici, on ne nous le dit pas. Premier fail, j'évoque le second plus tard.

Ce manque de background se ressent sur l'ensemble des personnages. Tatsuya étant le centre plus qu'omniprésent, c'est avec lui que ça gêne le plus, mais force est de constater que tous les autres secondaires, pourtant tous charismatiques et intéressants, n'ont pas plus le droit d'être approfondis. Ce qui est extrêmement dommage, sachant qu'ils ont déjà du mal à eux tous à contrer Shiba en terme de présence, on aurait pu leur donner quelques atouts. Pour dire s'ils sont tout à fait corrects comme personnages, quand on a enfin la chance d'avoir un arc où on oublie un peu Shiba pour laisser la vedette aux autres, le niveau d'intérêt de la série se rehausse d'un voire deux crans.

Je pourrais longuement disserter sur Miyuki. Bon, elle a ses raisons d'avoir le brother complex le plus exaspérant de la japanimation. Raisons qu'on ne connaîtra pas, pourquoi on aurait le droit à son passé à elle, je vous le demande ? N'empêche que ce brocon enlève tout ce qu'il pourrait y avoir de bien chez elle (notamment le fait qu'elle est bien badass). Et comme au Japon c'est normal de craquer pour son frangin, l'anime ne perd pas une occasion d'en remettre une couche, histoire d'envoyer au spectateur le message tout sauf subliminal "vous voulez tuer Miyuki Shiba, vous voulez tuer Miyuki Shiba...". Arrêtons-nous là, cette demoiselle est source de maux de têtes pour moi. Je préciserai juste que NON il n'y a pas pas d'inceste dans l'anime. Miyuki est très clairement amoureuse de son frère, certes, mais ce n'est pas réciproque : Tatsuya est proche d'elle, mais la voit comme une sœur, certaines scènes (dans le labo par exemple) en étant la preuve concrète. Et lui ne va pas piquer une crise de nerfs chaque fois qu'un garçon s'intéresse à sa cadette. Donc tous ceux qui sont moralement dérangés par les idées incestueuses, dites vous le une bonne fois pour toutes : tout comme dans un SAO, nous avons un cas de brother complex, à s'en arracher les cheveux, oui, mais c'est tout.

Le point commun de tout ce beau monde, c'est qu'ils sont tous forts, et c'est là que j'arrive au second fail.
Les gentils forts, on aime ça. Dragon Ball cataloguait des gentils tous plus puissants les uns que les autres, ça n'empêche pas que c'est un succès mondial. Ainsi, que toute la bande de Mahouka soit overcheat (même si on ne sait toujours pas pourquoi : leur lycée n'a pas l'air de dispenser des cours sur le combat réel face à des androides et autres, mais bon) n'est pas un mal en soi.
Mais quand on a du cheat d'un côté, la logique veut qu'on en ait de l'autre, histoire de compenser. C'est ce que l'histoire nous promet en nous introduisant régulièrement un individu avec son lot de surnoms et de rumeurs sordides à son sujet, et que tout le monde dévisage avec de grands yeux "oh mon dieu il est trop fort." Jusqu'à ce qu'il se fasse :
1) Oneshot par Tatsuya (le pauvre Ichijo[/b] pour ne pas le nommer).
2) Massacrer par les autres qui vont allègrement se passer la balle jusqu'au K.O (Lu Gonghu pour ne citer personne).
Il peut même, s'il est toujours vivant, revenir deux ou trois fois, pour revivre exactement la même situation et se couvrir de ridicule. S'il est toujours vivant, parce que ça ne pose aucun problème chez les gentils de Mahouka de tuer, fait explicable pour certains, beaucoup moins pour d'autres mais cessez de chipoter.

Résultat des courses, et c'est aussi pour ça que je parle de slice of life, c'est qu'il n'y a aucune tension. On sait d'avance qui va gagner, on sait qu'il est inenvisageable que les gentils perdent, que ce soit face à un super magicien trop puissant ou face à une organisation machiavélique. On ne retient même pas le nom des méchants, on sait qu'ils seront vaincus en un clignement de paupières et qu'on ne les verra plus jamais (ou qu'ils passeront gentils, aussi). Du coup les combats peuvent être aussi beaux qu'il veulent, on s'en fiche.

Je retiens aussi quelques détails scénaristiques qui partent à la poubelle, style une technique secrète qui nous occupe un bon épisode sans qu'on la voie jamais, une relique censée être à l'origine d'une bonne grosse baston et dont on ne saura jamais rien, un méchant qui fiche son souk un bon quart de la série sans qu'on sache de qui il s'agit au final, etc.
Tout porte à croire à une deuxième saison, et là dessus je n'ai qu'une chose à dire : elle aurait intérêt à porter sur le passé des protagonistes ; auquel cas, à mes yeux, le peu de motivation que j'éprouve à regarder cette série disparaitrait pour de bon.

Mahouka Koukou no Rettousei, ça aurait pu être un (presque) sans faute. Tous les points que j'enlève de ma note sont dus uniquement à la gestion des personnages, les autres défauts devenant risibles en comparaison. C'est 5,5 (un demi point en l'honneur d'Ichijo qui est tellement plus classe que Shiba en deux fois moins cheaté.)