MOSPEADA — Ce qui compte ce n’est pas la taille de l’Inbit, mais comment on s’en sert

» Critique de l'anime Mospeada (Genesis Climber Mospeada) par Deluxe Fan le
16 Juin 2021
Mospeada (Genesis Climber Mospeada) - Screenshot #1

Parler d’animes de robots des années 80 au public d’Anime-Kun c’est comme servir des brocolis vapeur à la cantine du primaire. Je peux voir d’ici vos têtes de dégoût, vos visages défigurés par la colère et la haine. Pourtant vous devriez savoir qu’une alimentation variée est essentielle à l’équilibre mental, et je ne peux pas vous laisser ainsi vous empiffrer de ces animes récents remplis de gras et de sucre.

Genesis Climber Mospeada est donc une série de mecha diffusée en 1983, alors que la japanime traverse une période de bouleversement. C’est en effet au début des années 80 que s’opère la transition du genre super robot, qui dominait dans les années 70, vers le genre real robot qui dominera par la suite. Comme souvent lorsqu’un nouveau genre apparaît, l’industrie s’emballe et de très nombreux animes sont produit en peu de temps, les animes de robots submergent les plannings de diffusion. Mospeada se retrouvera quelque peu noyé dans la masse, ce qui explique qu’il soit un peu moins connu que d’autres animes de la période.

Le récit se déroule cent ans dans le futur, en 2083 (ben oui c’est cent ans dans le futur à partir de 1983). La Terre est envahie par une race extraterrestre appelée les Inbits, dont l’objectif est tout simplement de virer l’humanité et de s’installer à sa place. Incapables d’empêcher l’invasion, les humains se sont enfuis vers la planète Mars où ils ont établi une base. Une première tentative de reprise de la Terre s’est soldée par un échec cuisant, mais le conflit continue.

Mospeada (Genesis Climber Mospeada) - Screenshot #2Stig Bernard est membre des Forces de Libération, dont le but est de reprendre la Terre par tous les moyens. Accompagné par sa fiancée Marlène, il intègre la nouvelle flotte de vaisseaux spatiaux qui doit tenter de forcer le passage vers la Terre. Lorsque le combat débute, le vaisseau de Stig se crashe au sol tandis que celui de Marlène est désintégré dans l’espace. Le jeune soldat se retrouve seul, encerclé par l’ennemi sur une planète qu’il ne connaît pas. Sa seule option est d’avancer droit devant lui vers le quartier général des Inbits situé quelque part en Amérique, pour mettre un terme définitif au conflit… ou mourir en essayant.

Lorsque Mospeada débarque en 83 il n’invente pas grand-chose ; cette histoire d’hommes pleins d’idéaux romantiques qui se battent pour la survie de l’humanité face à des aliens mystérieux constituait déjà la base de Space Battleship Yamato et des récits de Leiji Matsumoto. L’apport de Mospeada c’est qu’il raconte les choses de manière plus terre-à-terre ; hormis dans les premières minutes du premier épisode et les dernières minutes du dernier épisode, il n’y a pas de combats spatiaux, tout se déroule sur le plancher des vaches. Stig découvre rapidement que les humains n’ont pas du tout été éradiqués par les Inbits ; au contraire ils sont nombreux à être restés sur Terre, mais contraints à vivre comme des paysans - les Inbits n’attaquent pas les hommes sauf s’ils utilisent des technologies avancées. Au fil de son voyage Stig sera confronté à toutes les nuances de l’humanité ; entre ceux qui collaborent avec l’ennemi, ceux qui continuent le combat, et ceux qui ont abandonné la lutte.

Mospeada (Genesis Climber Mospeada) - Screenshot #3Au-delà des thèmes, Mospeada (se prononce « Moh-Spi-Dah ») est une série des années 80 pour le meilleur et pour le pire. La narration est essentiellement épisodique, chaque épisode constitue une unité narrative distincte avec un début, un milieu et une fin. Il faut comprendre qu’à cette époque le mode de consommation principale de l’animation japonaise restait encore la diffusion télévisée ; seuls quelques fans se dotaient de cet outil révolutionnaire appelé « magnétoscope » qui permettait d’enregistrer ce qui passait à la télé, voire même d’acheter dans le commerce des cassettes contenant directement tous les épisodes (un truc de ouf). Ce format de diffusion impactait les méthodes d’écriture des animes, qui n’ont plus rien à voir avec aujourd’hui où on peut s’enfiler des saisons entières d’un simple clic.

Beaucoup des séries de mecha de l’époque étaient produites en collaboration avec des fabricants de jouets qui commercialisaient des maquettes ou des figurines en lien avec les animes à la mode. C’était évidemment le cas de la présente série qui proposait un gimmick intéressant puisque les personnages se déplacent sur une moto du futur qui se transforme en armure pour le pilote. Il y a également des vaisseaux qui se transforment en mechas, dans un style rappelant beaucoup les Valkyries de Macross. Le souci c’est que de série de robots à publicité pour jouets il n’y a qu’un pas et Mospeada devient vite agaçant sur ce point. Chaque épisode contient au moins une scène de combats de robots, même quand cela ne sert à rien, et cela ne sert souvent à rien dans une série qui relève plus de l’aventure et du road-trip que de la baston pure et simple.

Mospeada (Genesis Climber Mospeada) - Screenshot #4Un autre aspect étrange de la série est son cast de personnages. La première personne que Stig rencontre sur Terre est un garçon nommé Ray, qui est un genre de vagabond de ce monde post-apocalyptique. Les deux hommes vont se partager la vedette et occuper alternativement la place de protagoniste. Et autant le personnage de Stig est intéressant à suivre, avec un enjeu personnel et une évolution, autant le personnage de Ray ne sert pas à grand-chose finalement. Les autres membres du groupe sont sympas à part Mint, je ne comprends pas trop ce qui leur est passé par la tête avec ce personnage, ou alors c’est un univers où la pédophilie et le mariage des enfants ne pose pas de problème, ce que je peux admettre, mais bon.

L’intérêt d’une série comme Mospeada va surtout se situer au niveau technique et artistique. La série est produite par le studio Tatsunoko, un des plus anciens studios de l’animation japonaise, qui a bâti sa réputation sur les séries de super-héros parmi lesquelles Gatchaman par exemple. En produisant un anime tel que Mospeada, le studio cherche à se positionner sur un genre qui est en train de leur filer entre les doigts. Ils s’associent avec le studio Artmic, fondé quelque temps plus tôt par des anciens de la Tatsunoko et qui deviendra plus tard surtout célèbre dans le milieu de l’OAV. L’animation est de bonne qualité pour l’époque et utilise le style « Kanada », du nom du célèbre animateur Yoshinori Kanada qui a énormément influencé l’animation japonaise de l’époque. Je ne cite pas son nom par hasard puisque Kanada lui-même a participé à Mospeada dont il a réalisé le générique d’opening, qui est je trouve assez excellent et représente parfaitement son style d’animation si particulier.

Mospeada (Genesis Climber Mospeada) - Screenshot #5Le chara-design est produit par un certain Yoshitaka Amano, qui à l’époque était l’artiste attitré du studio Tatsunoko où il a débuté dans les années 60. Il s’agira de la dernière contribution de Amano pour le studio, puisqu’il démissionnera de son poste avant même la diffusion de la série pour devenir free-lance. Quelques années plus tard, Amano sera notamment embauché par la société Squaresoft pour créer les designs d’un jeu vidéo sur la toute récente Nintendo Entertainment System. Il en résultera une série de jeux assez peu connue mais quand même sympathique.

Le mecha-design est lui signé par Shinji Aramaki, qui a eu l’idée des motos transformables en s’inspirant de sa jeunesse de motard. Il reprendra l’idée lorsqu’il s’occupera du mecha-design de certains OAV célèbres tels que Megazone ou encore Bubblegum Crisis.

Pour finir cette séance de namedropping, la bande-son est produite par Joe Hisaishi, qui par la suite bossera sur deux ou trois animes confidentiels. A l’époque l’ami Joe était encore un parfait inconnu, ce n’est que vers le milieu des années 80 qu’il va débuter sa fructueuse collaboration avec Miyazaki. Néanmoins même dans Mospeada la musique tient déjà une place notable, il y a beaucoup de scènes musicales et de chansons ; on citera notamment l’ending « Blue Rain in My Soul », considéré comme le premier ending de jazz dans l’animation japonaise, quinze ans avant Cowboy Bebop et son Real Folk Blues.

Mospeada est une série qui représente bien le bouillonnement créatif de la japanime de l’époque ainsi que le style des années 80. Avec ses vingt-cinq épisodes, l’anime est également plus digeste que des trucs comme Mobile Suit Gundam qui sont totalement inregardables aujourd’hui. Toutefois, avec son écriture inégale et sa conclusion un peu pourrie, la série ne tient pas deux secondes la comparaison avec des séries plus sérieuses telles que Votoms. Ce sont des débats de spécialistes cependant, car pour nous autres amateurs de vieilleries robotisées même un anime de mecha vite fait des années 80 vaut dix fois vos animes récents pleins de colorants et de conservateurs.

Verdict :6/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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