Mine de rien, voilà déjà deux ans que Yahari ore no seishun love come wa machigatteiru (Oregairu) a été diffusé sur nos écrans. Si vous étiez en manque de votre adolescent grincheux et asocial, réjouissez-vous car le printemps 2015 est là pour vous apporter une nouvelle dose de solitude lycéenne (ou pas) à base d’Hachiman.
Quelques changements significatifs sont à observer pour cette deuxième saison : un nouveau réalisateur (Oikawa Kei), un nouveau studio (studio Feel) et un nouveau lifting qui reflète une production mieux lotie. J’avais déjà noté que la première saison n’était pas particulièrement belle à voir et ce point négatif est ici largement corrigé, même si certaines retombées en qualité sont présentés et que voir Hachiman en mode beau gosse est un peu perturbant.
Outre le domaine technique, le contenu d’Oregairu a aussi pris une nouvelle orientation. Ce n’est pas exactement un revirement total, les éléments habituels sont toujours présents, mais après deux épisodes de remise en forme, la série bifurque vers un nouveau chemin : ainsi, plutôt que d’être resté sur une comédie romantique avec ses moments de sérieux, cette nouvelle partie est devenue davantage un drama avec un zeste de comédie romantique à l’appui.
Ce chamboulement peut faire peur mais c’est finalement une évolution assez naturelle puisqu’il s’agit ici de remettre en question les sentiments et les principes qui guidaient jusqu'ici Hachiman. On peut comprendre la première saison comme une introduction de ses nouvelles relations, avec des mises en situation pour nous éclairer sur sa personnalité complexe, notamment son rejet des autres et des relations qu’il ne considère pas «authentiques» ainsi que l’effacement de son ego qui le conduit à endosser le rôle de martyr pour résoudre les problèmes rencontrés par son club. Avec cette suite en revanche, les enjeux montent et le pauvre statu quo maintenu tant bien que mal jusqu’ici, ne peut pas supporter les contradictions internes du personnage : tiraillé entre ses désirs et son manque d'engagement, Hachiman va devoir grandir, non sans tourments.
L’évolution de l’intrigue d’Oregairu est plutôt bien pensée et comme toujours bien écrite si on ignore les clichés habituels. On pourra cependant regretter qu’Oregairu abandonne en grande partie ce qui faisait le charme de la première série : les aventures d’un solitaire et ses observations incisives sur le monde qui l’entoure. Sans avoir fait de comparaisons poussées, le peu de cynisme restant m’a paru ici moins percutant et l’humour est devenu bien secondaire de manière générale, même si je me suis bien amusé par moments (à coup de gesticulations, de Dayone et autres Saize).
Autre point mitigé, le côté manufacturé, peu naturel, du récit est toujours aussi présent, voire même davantage accentué. Les problèmes soumis au club d’entraide (Tobe, Iroha), relativement mineurs à l’échelle d’une vie, sont traités avec une grandiloquence démesurée par exemple mais ce sérieux peut se comprendre dans une perspective adolescente. En ce qui concerne les problèmes familiaux des Yukinoshita en revanche, le rôle d’Haruno, qui n’a visiblement rien d’autre à faire à part manipuler la cour des jeunes, en tant que pseudo-vilaine aidant sa soeur par les moyens les plus tortueux (tortureux?) possibles, est bien difficile à avaler.
Sur ce dernier point, un meilleur approfondissement du sujet aurait sans doute permis une meilleure immersion. Malheureusement, la série ne fait qu’effleurer les pages des livres lors des derniers épisodes, ce qui a eu pour conséquence de trop précipiter les événements, au point de les ignorer en grande partie (la maman de Yukino introduite pour l’oublier juste après par exemple) et de rendre la psychologie des protagonistes encore plus brumeuse que d’habitude. Le pire à ce sujet reste la conclusion de la série, aussi frustrante que violemment dégueulasse (c’est du PEGI 18 sérieusement), qui laisse en plan l’avenir des trois personnages principaux avant une éventuelle suite.
En parlant du trio principal, les deux compamignonnes d’Hachiman sont toujours sympathiques, un peu plus développées, et il est évident que l’attachement pour ces trois personnages aidera à s’intéresser au drama de cette saison. Les affaires du coeur occupent principalement les derniers épisodes et encore une fois souffre de la fin mal foutue. On notera également que le côté haremesque d’Oregairu ne disparaît pas pour un sou et se renforce même avec l’arrivée d’une nouvelle figure féminine, Irohah, qui rejoint le cercle intime d’Hachiman, même si elle reste somme toute un personnage secondaire.
Bien que convaincante la plupart du temps, ce nouveau d’Oregairu possède son lot de problèmes et surtout se termine au milieu de nul part au point que je serais bien incapable de juger le contenu abordé lors des épisodes 10-13. Malheureusement, mon opinion définitive quant à la valeur de l’anime reste donc en suspend et il est difficile de dire pour le moment si la tournure des événements, qui a coupé certains points positifs de la première série, en valait la peine. Cette suite devrait cependant plaire à la plupart des anciens spectateurs, pourvus qu’ils soient intéressés par l’évolution d’Hachiman, au-delà de son isolement et de l’artificiel.