Parmi les genres les plus anciens, répandus et populaires de l’animation japonaise se trouvent les animes de sport. Parmi les styles les plus anciens, répandus et populaires d’animes de sport se trouvent des séries de baseball. Et parmi les auteurs les plus anciens, répandus et populaires d’animes de baseball se trouve Mitsuru Adachi. Véritable légende de l’industrie depuis quarante ans, connu aussi bien dans le milieu du shônen que du shôjo et du seinen, Adachi est aujourd’hui à la tête de plus de deux cent millions de volumes vendus rien qu’au Japon. Pratiquement tous ses mangas depuis les années 80 ont été adaptés en animes, et certains ont connu un retentissement international à l’image de Touch (1985), diffusé en France sous le titre Théo ou la batte de la victoire ; ce qui est d’autant plus remarquable sachant qu’en Europe le baseball est un des sports les plus OSEF qui soient.
Nine est le premier manga de baseball d’Adachi, qu’il prépublia dans le Shônen Sunday entre 1978 et 1979 pour un total de cinq volumes. L’adaptation sera produite en 1983 sous la forme de trois téléfilms d’une heure chacun. Cela peut sembler suffisant pour adapter cinq volumes, mais pour l’époque trois petits téléfilms ce n’est vraiment rien. Le manga suivant de Mitsuru Adachi, la comédie romantique Hiatari Ryoko (Une Vie Nouvelle en version française), est lui aussi long de cinq volumes ; en revanche l’adaptation animée fera 48 épisodes (!!!). La différence entre les deux c’est que l’anime Hiatari Ryoko sera produit en 1987, c’est-à-dire après l’immense succès de Touch qui a rendu le nom d’Adachi absolument incontournable.
Katsuya Niimi est un jeune garçon sportif, champion d’athlétisme au collège, et qui débute sa scolarité au lycée Seishun. Avec son ami Karasawa, champion de judo, ils assistent à un match du club de baseball, dont les résultats sont très médiocres. Parmi les rares supporters venus soutenir Seishun dans les gradins se trouve Yuri Nakao, fille du coach de Seishun et camarade de classe des deux garçons. N’écoutant que sa puberté, Katsuya laisse immédiatement tomber l’athlétisme pour intégrer l’équipe de baseball. Là où la plupart des joueurs de son âge rêvent de participer au tournoi national des lycées, le Kôshien, l’ambition de Katsuya est plutôt de participer à la vie de Yuri…
Une des caractéristiques de l’œuvre d’Adachi, qui rend son style reconnaissable, c’est sa tendance à mélanger en proportions égales l’aspect sportif et l’aspect romance de ses histoires. Pour rappel, au début de sa carrière Adachi publiait aussi bien dans des magazines de shônen que des magazines de shôjo, et c’est en intégrant les deux genres qu’il a bâti sa popularité. C’est déjà le cas dans Nine, où le baseball sert surtout de théâtre pour les triangles amoureux qui intéressent véritablement l’auteur. On retrouve alors des structures connues, genre la relation entre A et B perturbée par l’apparition de C, ou encore le quiproquo stupide qui vient jeter le trouble sur le couple pendant des semaines alors qu’il suffirait de trente secondes pour éclaircir le malentendu. Cela reste tout de même très sympathique parce que les personnages sont tous gentils et attachants ; c’est des gamins un peu maladroits, parfois têtus, mais t’as envie qu’ils soient tous heureux parce qu’ils le méritent tous quoi.
C’est sur l’aspect technique que les choses sont moins chaleureuses. Cette adaptation de Nine est sommaire aussi bien en termes de quantité que de qualité, avec une mise en scène qui relate les évènements sans les souligner outre mesure. On se moque souvent de l’exagération dans les séries sportives des années 80 telles que Captain Tsubasa par exemple (dont la diffusion a débuté en 1983 soit la même année que Nine) mais c’est justement cette stylisation qui a permis à ces séries de passer à la postérité. La cinématographie de Nine se compose en majorité de plans serrés sur les personnages, les plans plus larges étant principalement remplis de blanc, au sens littéral du terme, comme si le mec responsable des décors avait posés ses congés au moment de la production. Il est à noter que le réalisateur n’est pas n’importe qui puisqu’il s’agit de M. Gisaburo Sugii, qui en plus de Nine a également réalisé les susmentionnés Touch et Hiatari Ryoko, mais qui est aussi connu comme un habitué des adaptations de Tezuka avec Dororo et Hidamari no Ki entre autres. Vu le pedigree du bonhomme je ne peux pas croire qu’il ait fait du travail bâclé, on va donc plutôt dire que Nine a un « style dépouillé » qui choisit de rester fidèle au trait d’Adachi… Ouais, ça marche aussi comme interprétation.
Si vous voulez découvrir l’univers de Mitsuru Adachi en commençant par le début, et vous initier en douceur et en romance au yakyû anime, Nine est un excellent choix. Chacun des trois films reprend une année scolaire pour les personnages, et une fois arrivés à la fin ils se sont accomplis en tant que sportifs et ont trouvé l’amour, laissant derrière eux une jeunesse bien remplie avant d’entrer dans la vie d’adulte. Alors oui c’est sûr ça te fait déprimer quand tu compares ça à ta propre jeunesse chiante et à ton existence de merde actuelle mais au moins grâce à Adachi tu auras eu un aperçu de ce que c’était que vivre pour de vrai dans les Japon des années 70.
NB : ça s'appelle "Nine" parce qu'il y a neuf joueurs dans une équipe de baseball. T'inquiètes moi non plus je savais pas.