C’est avec un sentiment de frustration encore vivace que j’écris cette critique. Car pour moi s’il y a bien une chose que je déteste plus que de perdre mon temps à regarder une mauvaise série, c’est de perdre mon temps à regarder une série moyenne qui avait pourtant tout ce qu’il faut pour être vraiment bonne.
Pourtant, on ne pourra pas dire que je n'attendais pas The Reflection au tournant : c'est même certainement l'animé qui m'intéressait le plus parmi la fournée estivale 2017. Les quelques images dévoilées les mois précédents figuraient d'une direction artistique épurée assez inhabituelle, que je trouvais franchement classe. Mais c'est surtout la volonté de la série de s'intéresser à l'univers des super-héros de comics - d'une manière différente de My Hero Academia - qui m'a happé. Sans doute que la mention de Stan Lee au scénario, peut-être l'auteur de comics le plus influent de "l'âge d'or Marvel", n'y est pas étrangère. Il faut reconnaître, quoique l'on pense de ce monsieur et de son désir de notoriété, que "The Stan" fait vendre.
Maintenant que la série - ou du moins la première saison - est terminée, je peux vous dire avec une larmichette à l'œil qu'il y a hélas beaucoup de soucis. Des soucis de forme, des soucis de fond mais avant tout, un gros souci de rythme qui fait qu'à aucun moment je n'ai pu ressentir un quelconque amour du comics américain. Je vais même aller plus loin : cette série n'est pas une histoire de super-héros convaincante.
Une technique mollassonne
Un sujet qui divise pas mal de monde dans les commentaires : The Reflection est-il beau ou non ? Difficile ici d'avoir un avis franc. Pour ma part, je trouve l'anime assez beau si l'on s'arrête à ce que l'on voit en premier plan : les couleurs sont bien choisies, l'effet "encrage" des personnages rend plutôt bien et d'une manière générale, le chara-design est vraiment sympa. En revanche le soin apporté à l'arrière-plan est plus discutable, souvent minimaliste voire "schématique". Ce point ne me choque pas particulièrement, je préfère un arrière-plan pauvre qu'un arrière-plan moche (RIP Berserk 2016/2017). Mais quand on sait que les comics dont s'inspire la série regorgent de détails et de panoramas grouillant de vie, je peux comprendre la déception d'une partie du public. Moi-même je n'arrive pas à rentrer complètement dans l'histoire, tellement certaines scènes me font sortir du visionnage. Quand la plupart des plans sont vides, il m'est d'autant plus difficile d'imaginer que l'action se déroule au sein des grandes villes Nord-Américaines. Si je devais faire un parallèle méchant, je dirais que la série m'évoque une émission de radio. Le visuel n'apporte finalement pas grand-chose de plus car les plans sont généralement pauvres de sens : on voit juste des personnes parler, se déplacer et à l'occasion se battre.
Second souci qui va de pair avec le premier, l'animation. Lorsque j'ai lancé le premier épisode, je n'ai vu le générique de fin qu'au bout de 40 minutes sur les 25 prévues. Pour cause : j'ai cru avoir un problème de réseau Internet provoquant de micro-lags, ce qui m'a poussé à redémarrer plusieurs fois la vidéo. Ce n'est qu'après m'être rendu compte que le son ne sautait pas que j'ai compris que le problème ne provenait pas de mon PC, mais simplement de l'épisode. La série "lag", dans le sens où l'animation saccade en permanence. Je ne m'attendais certes pas à du sakuga, mais dans des séries comme Kill La Kill, l'animation saccadée accompagne une action omniprésente et une sensation de folie constante. Dans The Reflection, l'animation saccade même quand un personnage tourne la tête. Les seuls plans qui ne subissent pas ce traitement sont totalement fixes, ou proposent quelques animations 3D - loin d'être immondes au passage, mais tranchent quand même un peu avec le reste.
Enfin troisième problème technique, le sound design. Je n'ai rien à dire sur le doublages, très convaincants, ni sur les quelques rares musiques. Par contre comment peut-on expliquer que les bruitages et effets sonores d'une série de super-héros soient si mous ? Dans les comics, on imagine aisément que les combats sont ultra-bruyants, à coups de "KA-POWWWW" et de "UARGH !!!", on se met des patates ! On envoie des rayons laser qui font "DZIIIIING !" en tranchant des membres, des bâtiments s'écroulent et la foule hurle de terreur !
Pas dans The Reflection. Dans The Reflection, quand on se tape dessus, c'est à coups d'oreillers. Les rayons laser font "piou piou" et la foule, beh déjà qu'elle ne bouge pas, elle ne crie pas trop non plus. Heureusement que les doubleurs sont là, car sinon même mon analogie de la radio tomberait à l'eau… et ne ferait qu'un petit "floc".
Ces trois points, que je viens de souligner en gros avec du rouge à lèvres, rendent la série incroyablement mollassonne. Les protagonistes se déplacent au ralenti, se téléportent sans bouger, se battent gentiment comme s'ils souhaitaient que l'adversaire ait le temps d'esquiver leurs coups, et ça ne fait que "pouf". Croyez-moi, cela me fait vraiment mal de dire ça, mais quand ni la direction artistique ni les effets sonores n'apportent de pêche à ce qui se déroule à l'écran, on a vraiment l'impression d'écouter une série de podcasts à destination de fans de comics, ou de personnes âgées. Et dans une série de super-héros, je trouve cela vraiment mauvais.
Après je ne vais pas cracher dans la soupe, car la série distille aussi quelques bonnes idées : par exemple on nous présente le même combat deux fois, à la différence que le second permet d'entendre ce que disent les protagonistes, enrichissant un chouilla leur background. Mais ce genre de petites astuces n'arrivent pas à faire oublier la sensation de lenteur de l'ensemble.
Un animé lent qui veut tout faire trop vite
Globalement, le scénario est assez simple et l'histoire se suit bien. Pour compléter le synopsis de la fiche Anime-Kun, nous suivons les déboires d'Eleanor, jeune fille qui a elle aussi reçu un pouvoir spécial lorsque la Réflexion, calamité ayant tué des milliers de personnes, s'est abattue sur le monde. Quand une mystérieuse organisation de "Réfléchis" tente de rassembler par la force les autres mutants à sa cause et provoque le chaos, Eleanor décide d'aider X-ON, un discret justicier New-Yorkais, à découvrir les véritables motivations de cette organisation et la stopper.
Le traitement des personnages m'a semblé très inégal. Vous pouvez d'ailleurs oublier tout développement des protagonistes autres que le noyau dur que l'on suit au cours des douze épisodes. J'ai notamment été très déçu du rôle de l'organisation "pro-Réfléchis" qui servent d'adversaires aux héros : si l'on accepte le fait que "les méchants des ténèbres sont méchants parce que PROUT" et que le grand méchant est l'un des plus confus que je n'ai jamais rencontré dans l'animation japonaise, ça va. Bien entendu on n'échappe pas à certains stéréotypes chez les protagonistes, mais je n'ai pas trouvé cela vraiment gênant. Je les trouve même plutôt intéressants, avec une mention spéciale pour "les deux costumés", qui se dévoilent au fur et à mesure des épisodes.
Petit bémol quand même : ce qui pour moi participe grandement à l'attrait des séries de super-héros, c'est la découverte des pouvoirs des protagonistes. Et là, on rencontre un souci dans The Reflection : certains personnages réalisent des actions incohérentes par rapport au pouvoir qu'ils détiennent - ou que l'on pense qu'ils détiennent. Dans d'autres cas, on ne comprend simplement pas quel est le pouvoir de la personne que l'on voit agir depuis 10 épisodes (et attention, je parle aussi bien des gentils que des méchants). Je ne parlerai pas du cas du "quatuor coloré" des derniers épisodes sorti de nulle part car là je risquerais vraiment de m'énerver.
Par peur de vous spoiler les éléments de l'intrigue - car oui, je vous recommande quand même de voir cet animé - je n'en parlerai pas trop. Si je me permettais un petit troll, je dirais qu'on est au même niveau qu'un scénario de comics lambda. Quelques incohérences, un final qui divisera les foules, une qualité en dents de scie, mais rien de vraiment horrible.
Finalement mon seul gros regret au niveau du scénario est son rythme bâtard. Lorsque l'on découvre la série, on se rend compte qu'elle prend son temps, pose les situations, accuse même quelques longueurs. Certains double-épisodes auraient par exemple pu être fusionnés, quelques scènes effacées. Mais malgré ça, je ne peux m'empêcher de ressentir à quel point le scénario a été rushé. J'entends par là qu'entre chaque longueur, tout s'enchaîne trop rapidement, sonne un peu faux. Puis au moment où les choses prennent une tournure intéressante, tout part en vrille.
Je ne vous écrit pas ceci pour que vous pensiez que le scénario est mauvais : je pense au contraire qu'il avait un véritable potentiel, mais qu'il aurait vraiment gagné à être étoffé. Cette série m'a beaucoup dépaysé, dans le sens où l'ambiance générale qui se dégage de The Reflection, entre la série de super-héros, la road-movie et le polar, crée un sentiment étrange de relaxation. Sérieusement, c'est un sentiment que j'explique difficilement, même si je pense que tout ceci est lié au rythme étrange de l'animé.
Bilan
Vous aurez compris après ce pavé que je ne peux parler de The Reflection comme d'un animé à regarder absolument. Cependant je vous invite vraiment à le découvrir, non pas pour ce qu'il est, mais pour ce qu'il aurait pu (du ?) être. Car malgré tous ses défauts, j'ai été chagriné quand j'ai compris que la fin approchait. Très franchement, j'étais parti pour suivre la série sur une douzaine d'épisodes encore, et je pense que si la première saison devait s'étendre non sur douze épisodes mais sur une vingtaine, la plupart des défauts de scénario évoqués ci-dessus auraient pu disparaitre. Resteraient sans doute les problèmes techniques, mais au fur et à mesure que l'histoire s'installe, je dois reconnaître que je les ai peu à peu mis de côté.
Je vous conseille aussi de regarder cet animé pour une raison plus égoïste : j'ai envie qu'elle fonctionne car j'ai envie de voir la suite. Sans être totalement ouverte, la fin de l'animé ouvre des perspectives intéressantes. Peut-être les éléments non développés par l'intrigue auraient dû trouver leur explication au cours d'une potentielle suite…