Une jeune fille en uniforme lycéen sort un pistolet silencieux dans un parc en plein jour.
Cette adolescente comme une centaine d'autres, oeuvre dans l'ombre pour le compte de l'A.D, une agence secrète gouvernementale qui n'hésite pas à user de moyens radicaux pour protéger la paix.
L'une d'entre elles, Takita Inoue, va se retrouver limogée à la suite d'un impair lors d'une mission délicate et renvoyée dans sa chambre au LycoReco.
Elle y rencontre un vieux black détendu avec une canne, une milf avec des lunettes qui squatte le comptoir et une jeune fille mignonne avec les cheveux roses, une équipe hétéroclite qui va apprendre à Takita à être une serveuse digne de ce nom car le LycoReco est un café!
Si vous avez l'impression que je me suis planté en mélangeant deux synopsis au hasard c'est normal, Lycoris Recoil est un cas d'école de l'animation Japonaise où les choses se passent rarement comme prévu.
A-1 Pictures avait initialement confié le scénario de ce projet original à Asaura.
L'auteur de Death need Round, light novel qui montre déjà les penchants de l'écrivain susnommé pour les filles et les flingues, a donc accouché d'un premier squelette en suivant son crédo.
Et A-1 Pictures de lui dire : "mec, on est pas très à l'aise avec cette idée de lycéennes qui servent du café le jour puis deviennent des mercenaires tueuses la nuit... pensons aux enfants qui regardent la télé'".
Seulement A-1 Pictures y-z'ont pas le Time, parce qui-z'ont d'autres trucs sur le feu donc ils refilent la patate chaude à un gars motivé, bien que sans expérience de réalisateur au compteur, et le laissent se démerder avec les bizuts.
Shingo Adachi débarque donc et il se dit qu'il va structurer un peu le bordel en créant une mystérieuse organisation gouvernementale, l'A.D et ses "agents dévouées", les Lycoris.
Mais comme il veut pas tomber dans le Gunsliger Girl pour dépressif il décide d'aller vers quelque chose de plus chaud et de plus local.
Les Lycoris passent donc d'adolescentes meurtrières à copines de chambrée qui se crêpent le chignon sur les stands de tir.
Et Takita et Chisato font des trucs de meuf.
L'anime prend alors une direction Kyoani' inattendue y compris dans le chara de de Takita, sorte d'Eru Chitanda en plus maussade.
Même les p'tites interactions du quotidien au café y sont jusque dans la relation de ces deux jeunes filles au caractère opposé.
Les jupes volent dans le feu de l'action mais l'anime fait le choix de la décence par d'amusantes pirouettes.
Les filles restent donc au centre mais les flingues aussi car ça faisait quand même parti du package de base, ce qui donne de jolies séquences à la John Wick.
Le raisonnement de l'anime se tient donc tout à fait sur le plan de l'échelle individuelle, c'était peut être même sa seule issue potable pour s'en sortir et ça montre la lucidité d'Adachi à exploiter cette histoire de Koffe's mercenary - le bar à chats peut aller se rhabiller - sur laquelle on lui a demandé d'intervenir.
D'autre part cet investissement montre que l'anime possède une facture évidente, une identité même et cela n'a été possible que grâce aux potes talentueux - pour la plupart recontrés sur Sword Art Online - que Shingo Adachi a convaincu de collaborer, sa femme y-compris et qui lui ont sculpté un visage attrayant.
On en revient donc à la question des contacts qui pèsent lourd dans la balance et qui en l'occurrence, ont plus été fournies par Adachi lui-même que par A-1 Pictures.
Un fait qui cristallise une conception de l'animation vulnérable et dont les résultats sont aléatoires car il faut : et le bon chef d'orchestre et les bons gars dispos' au bon moment pour terminer le truc dans les temps sans compter les impondérables.
Beaucoup d'anime tombent ainsi au combat mais Lycoris Recoil a tenu son pari! en quelque sorte.
Reste que dans les faits, moi spectateur, si tu me vends un séjour au ski avec des meufs et des olives dans le Martini, j'aime pas trop attérrir dans un camping de l'Eure-et-Loire, quand bien même la cathédrale de Chartres serait jolie.
Parce que cette histoire d'agence sous-marine se foutant d'envoyer des lycéennes avec des flingues dans leur cartable pour que les citoyens puissent tranquillement continuer d'aller au Starbucks, ça pèse quand même plus lourd qu'une miette de pain dans la tasse de café...
D'ailleurs que penser d'une oeuvre dans laquelle le gouvernement Japonais du 21e siècle décide que la solution au chaos est d'armer des gamines ? Certes le drone militaire est plus crédible mais moins glamour qu'un uniforme de lycéenne.
Finalement c'est un énième plot qu'on ne trouverait qu'en anime... alors où est le mal à ce stade ? Autant en faire son parti, prendre ce qu'on veut et zapper ce qui fait chier !
Le problème de cette logique c'est qu'on finirait par tout laisser passer. Parfois on a bien le droit de débrancher son cerveau et d'apprécier la bêtise animée où Gordon Ramsay humiliant des cuisiniers mais pas tout le temps et pas avec Lycoris Recoil.
Parce que le cadre de Lycoris Recoil amène un sous-texte politique pertinent vis-à-vis d'une paix Japonaise bâtie sur l'hypocrisie et la violence sans compter les vues intéressantes offertes au scénario.
Coexistent donc ainsi des motifs et des valeurs qui ne sont pas issues du même plan, état stationnaire car arrive l'inévitable moment où il faut faire des choix et conclure les 12 épisodes d'une création originale; forçant le lâché-prise de tout un pan initial prometteur.
Le plot improbable des débuts achevant sa transformation en un filet se resserrant autour du coup de Lycoris Recoil comme pour celui du criminel épinglé à l'aéroport et qui bégaye pour justifier le cash et la cocaine dans son sac.
Il faut donc faire un sacré pas en avant vers une oeuvre qui n'est ni plus ni moins que de la bricole de haut niveau.
D'ailleurs sans Adachi et sa team, le truc aurait pété sur sa mine antipersonnel..
Néanmoins, Lycoris Recoil reste finalement le récit d'un anime écartelé par des choix impossibles dans une industrie où nécessité fait loi.