Wake Up Girls - Panne de réveil

» Critique de l'anime Wake Up, Girls! (TV 1) par Deluxe Fan le
29 Mars 2014

Yamakan, Yamakan… Pourquoi es-tu Yamakan ? Pourquoi es-tu un des réalisateurs d’animation japonaise les plus suivis et discutés alors que tout ce que tu as fait n’est marqué que du sceau de l’inconséquence ?

Intellectuel, brillant et ambitieux, tu es à la fois un analyste érudit et un fanatique d’animation. Avec ta tête de premier de la classe, tu espères devenir un jour le nouveau Tomino, le nouveau Hideaki Anno. Malheureusement, tu commences ta carrière au studio Kyoto Animation où tu participes à l’émergence du mouvement néo-otaku en produisant Haruhi Suzumiya. Dégoûté, tu te fais virer de ton job et tu pars créer ton propre studio, Ordet, où tu pourras te consacrer tranquillement à la tâche que tu t’es fixée, sauver la japanimation.
Tu t’attaches les services d’un sociologue spécialisé dans le phénomène otaku, pour produire la série révolutionnaire qui t’ouvrira les portes de la reconnaissance. Il en résultera Fractale, dont l’échec dramatique fera de toi la risée de l’industrie. Humilié, tu jettes l’éponge et abandonne tous tes rêves. Tu te mures dans le silence, n’apparaissant que sporadiquement sur les réseaux sociaux pour insulter tes collègues et cracher sur les séries que tu n’aimes pas.

Tu refais finalement parler de toi en annonçant la production au sein de ton studio de Wake Up Girls, un projet étrange mêlant animation et idols. L’histoire raconterait la création d’un groupe d’idols, tout en faisant la promotion des filles qui doublent les personnages qui sont réellement d’apprenties doubleuses/chanteuses originaires de la ville de Sendai (une des villes les plus touchées par le tsunami de mars 2011)
Pour la première fois, Yamakan, tu m’avais fait rire. Toi le sauveur de l’animation, te compromettre dans les idols, le produit le plus toxique jamais inventé par l’esprit malade des jeunes herbivores japonais ? Je n’y croyais pas moi-même, mais j’étais déçu.
Bien décidé à ne rien faire comme tout le monde, tu n’attends pas ton tour comme les autres et décide de précipiter ta communication. Tu produis un moyen-métrage servant d’introduction à ta série que tu diffuses en salles. Et là Yamakan, tu me surprends. Malgré la thématique douteuse, tu arrives pour la première fois à raconter une histoire et à y insuffler un style. Ton regard sur l’industrie des idols est perçant, pas dénué de sarcasme et, j’oserais même, pertinent. Tu attises ma curiosité Yamakan, et je surmonte ma haine pour te rejoindre une dernière fois…

Wake Up Girls raconte l’histoire de l’agence Green Leaves, une boîte d’agents artistiques qui, au bord de la faillite, décide de monter un groupe d’idols. Les idols sont des chanteuses-danseuses-animatrices-mannequins juvéniles, suivies à la trace par un public majoritairement masculin qui leur voue une admiration au mieux ambigüe. Dans WUG, le groupe d’idols le plus puissant du Japon est I-1, une gigantesque machine qui déplace des foules et beaucoup d’argent. Toutefois, ce groupe est en légère difficulté après le départ de sa chanteuse principale, Mayu Shimada.
L’agence Green Leaves quant à elle, recrute des candidates un peu partout dans la ville de Sendai en espérant les faire connaître localement. Les auditions se passent bien et sept filles sont retenues, sept gamines aux talents divers mais sans véritable personnalité. C’est alors que l’agence découvre qu’une ancienne idol s’est installée à Sendai : Mayu Shimada. Une telle star serait un atout précieux pour le jeune groupe, mais comment la faire revenir dans le show-business qu’elle a déjà quitté une fois ?

C’est ainsi que commence le film WUG, suivi directement par la série TV. Une histoire somme toute assez classique qui, illustrée sous le bon angle du pragmatisme, pouvait te conduire à créer quelque chose d’intéressant. Il te suffisait d’éviter la niaiserie, la compromission et la stupidité. Tu pouvais le faire Yamakan, mais tu as tout fait foirer.

Les quelques bonnes idées que tu t’étais efforcé d’inclure dans le film prologue sont invalidées dans la série télé au bout de quelques épisodes. Le scénario poursuit alors dans une direction brumeuse, laborieuse et terriblement linéaire. Il se passe trop peu de choses, et tu remplaces tout ce qui pouvait donner une illusion de réalité par des scripts bidon et du drama de mauvaise qualité. Tu réussis l’exploit de rendre les adolescentes du groupe plus crédibles que tous les personnages adultes de ta série, qui sont pour l’essentiel des caricatures débiles. Le groupe est constamment sauvé par des deux ex machina et autres retournement improbables qui enlèvent toute vraisemblance à l’histoire. Le manager Matsuda, dont les déboires dans le film auraient pu donner quelque chose d’intéressant dans la série, se fait complètement éjecter du scénario passé deux épisodes. La coupe est pleine lorsque tu veux mettre en scène l’affrontement entre WUG et I-1, sur fond de David contre Goliath lourdingue et téléphoné. Le dernier épisode, avec sa référence inattendue au 11 Septembre, achève de nous rappeler quel prétentieux se trouve derrière cette mascarade.

Mais tu ne te serais pas contenté de foutre en l’air ton scénario, hein Yamakan ? La réalisation et l’animation de la série sont à créditer au rang de catastrophe industrielle de l’année 2014. Après avoir mis toutes tes forces dans le film, il ne reste plus rien pour la série télé qui devient de plus en plus dégueulasse au fil des épisodes. Yamakan, toi qui t’es fait connaitre en réalisant la scène de danse de l’ending de Haruhi Suzumiya (Hare Hare Yukai), tu es parvenu à foirer le point principal de ta série avec des chorégraphies misérables et une animation immonde. Les visages de tes demoiselles sont tous identiques, aucun boulot sur le chara-design et les décors sont de simples photos de la ville de Sendai redessinés à la va-vite. Ce sera d’ailleurs ton seul coup d’éclat durant la diffusion de la série ; dès le deuxième épisode tu as appelé à l’aide sur Twitter car tes employés du studio Ordet, épuisés, ne parvenaient plus à suivre le rythme et produisaient du travail bâclé.

Tu pourras toutefois te réjouir d’avoir tenu quelques-unes de tes intentions. Le défi que tu t’étais lancé de réunir des doubleuses débutantes et inconnues issues su terroir est réussi car le doublage des filles possède une certaine sincérité que même moi qui ne suis pas japonais j’arrive à entendre. C’est pas ça qui fait une bonne série, ce n’est même pas de quoi faire une série tout court, mais si c’est ça que tu voulais faire alors tu l’as fait. Un ego surdimensionné doublé d’une incompétence notoire, des moyens dérisoires mis au service de scripts aléatoires, tout ton projet est une vaste blague Yamakan, une blague dont j’attends la suite avec impatience. Tes tentatives et tes échecs sont trop divertissants pour que je puisse m’en passer.

Verdict :5/10
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A propos de l'auteur

Deluxe Fan, inscrit depuis le 20/08/2010.
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