Ne sachant que penser de la seule série de l'Hiver 2015 ayant une certaine ambition, c'est vers d'autres qualités que je dois me tourner: la sympathie, l'humour, le fun, l'émotion, une bonne animation, une bonne réalisation.
C'est Yoru no Yatterman, série pourtant peu attendue, qui s'en sort le mieux dans ces catégories.
Yoru no Yatterman est une série qui suit la tendance récente du studio historique Tatsunoko Productions a ressortir ses vieilles licences des années 70 pour leur donner une suite, un spin-off, un remake ou autre. En l'occurrence, cette série se place comme suite de la série Yatterman de 1977, qui avait eu droit déjà a un remake en 2008, et se déroule plusieurs dizaines d'années plus tard.
Le twist est qu'ici le camp des gentils et des méchants est inversé: le Yatter Kingdom, supposément dirigé par le duo de héros Yatterman, se trouve être un pays gouverné de façon tyrannique et oppressive, et ceux que l'on suit sont les descendants de l'équipe de méchants de Yatterman, les Dorombo, qui avaient perdus face aux Yatterman des décennies auparavant.
Après s'être fait bouter hors du Yatter Kingdom en cherchant de l'aide pour sa mère malade, la jeune descendante de la voleuse Doronjo décide de reprendre le masque de son ancêtre et d'aller leur mettre une bonne pichenette sur le front des Yatterman pour leur remettre les idées en place.
La première bonne surprise de cette série, c'est la vaste quantité de bonne animation qu'elle contient. Yoru no Yatterman est un très bon exemple d'animation dite "web-gen", ce style porté par un certain nombre d'animateurs assez jeunes et dont les exemples les plus connus sont sûrement les séries de ryo-chimo, Tetsuwan Birdy ou Yozakura Quartet. On retrouve d'ailleurs ici des animateurs de la bande de Yozakura, tel que Shun Enokido ou Ryu Nakayama. Cela donne lieu à de nombreuses scènes possédant la caractéristique effusion de couleurs et de mouvements exagérés de ce style, avec des FX remplissant l'écran et très stylisés. Un régal visuel.
D'ailleurs, cette même saison, de grands espoirs étaient placés sur Rolling Girls et son PV lui aussi rempli d'animation web-gen, prouvant l'émergence de plus en plus marquée de ce style. Rolling Girls qui s'est cassé la gueule dans sa production dès l'épisode trois pour difficilement offrir une minute d'animation exceptionnelle pour dix-neuf de mauvaise par la suite, au contraire de Yoru no Yatterman qui aura tenu jusqu'à son dernier épisode. Avant de malheureusement louper le coche sur le final. Que je vous conseille donc de regarder plutôt dans sa future version bluray car il sera certainement fabuleux.
Un hasard? Certainement pas, car contrairement à ce que semble croire une partie de l'internet, les bonnes choses arrivent rarement par hasard.
Malgré son statut de studio vétéran, Tatsunoko Productions se place en effet de nos jours en pointe de l'animation digitale, allant jusqu'à fournir à ses employés les tablettes nécessaires à la réalisation d'animation-clé sous flash. Et cette politique est sans aucun doute du à l'influence de ryochimo lorsqu'il y a réalisé Yozakura Quartet: Hoshi no Umi et Hana no Uta, de vrais festivals d'animation web-gen fabuleuse avec des épisodes entiers dont l'animation-clé a été dessinée de façon digitale. Ces productions ont complètement revitalisé le studio, ce qui se reflète sur leurs récents travaux. Pas mal pour un studio qui fait partie des anciens piliers du média.
Il est d'ailleurs intéressant de voir cette série sous l'angle de l'opposition entre son coté rétro et son coté résolument moderne.
De nombreux choix de réalisation, tel que la mise en scène, ou la palette de couleur sombre et sobre, complimentent les moments dramatiques et émotionnels. La série s'établit ainsi une certaine atmosphère à travers des éléments de direction artistiques définitivement modernes.
En opposition à cela, le chara-design et le machine-design (souvent importé directement de la vieille série) ou encore les catchphrases et les poses qui caractérisent plusieurs personnages sont plus cartoon et ont un coté définitivement rétro.
Ceci résonne d'ailleurs avec le fait que cette série parvient à alterner avec brio entre comédie et drame, enchaînant les moments légers avec des passages plus lourds sans qu'ils ne s'entre-nuisent d'aucune façon. C'est une grande force de la série, particulièrement visible dans ses premiers épisodes.
Ce coté rétro donne un charme certain à Yoru no Yatterman, car ce coté très série des années 70 est quelque chose que l'on a pas l'habitude de voir de nos jours. Cette simplicité et cette franchise par certains aspects la rend sympathique.
Ce n'est cependant pas qu'un avantage, car la série ne s'est pas bien adaptée à son format.
Passé les premiers épisodes, on part dans un schéma de "rencontre de la semaine" typique où les héros jouent au chat et à la souris avec les méchants tout en explorant un peu plus le monde du Yatter Kingdom, avant que l'on arrive au final. Schéma qui marcherait très bien dans une longue série d'un an ou plus, les exemples abondent pour le montrer. Malheureusement, Yoru no Yatterman ne fait que 12 épisodes, bien trop peu pour se permettre ce genre de choses. Ce n'est pas la première fois que l'on voit des séries d'un cour tenter cela, et ce n'est pas la première fois que ça ne leur réussit pas trop.
Ce qui en souffre, c'est le développement des personnages, qui bien qu'ils soient tous très sympathiques ne sont pas pleinement exploités, ainsi que l'ambition de l'histoire qui est resté assez faible.
Malgré ces quelques défauts, Yoru no Yatterman est fun à tous les étages, comédie comme animation, tout en ayant un aspect sérieux bien intégré. Ce qui en fait une série qui vaut le coup d'oeil. En particulier pour l'amateur technique d'animation qui passerait par là.