Red Dead Redemption 2 (PS4) :
Je n'ai jamais été fan des jeux Rockstar. Comme tout le monde j'avais un peu joué à San Andreas sur ma PS2 pucée mais passé le fun d'utiliser les codes de triche pour mettre la ville en chaos je n'ai jamais retouché à un GTA. En revanche quand
Red Dead Redemption est arrivé, c'était autre chose. Mon enfance et adolescence ont été marquées par ces VHS de films de Western, et l'idée d'interagir avec cet univers, cette époque, cette esthétique qui m'a toujours fasciné a vite eu raison de mes réserves.
Lorsqu’il a été annoncé l'idée de Rockstar d'apporter une suite à ce jeu, une préquelle qui plus est, je n'étais pas particulièrement intéressé. Tout me semblait avoir été dit dans RDR, je ne voyais pas l'intérêt de revenir sur ces personnages dont on connaît le destin de toute façon. Mais si c'est ce que Rockstar a voulu, qui sommes-nous pour juger ?
Le récit débute en 1899 durant la période dite du "Gilded Age", un âge de prospérité qui voit l'Amérique se moderniser et s'enrichir rapidement. Les villes se développent, l'industrie grossit et avec elles s'installent le capitalisme et les inégalités qui vont avec. Grâce au chemin de fer la civilisation s'étend jusque dans les recoins du pays et l'Ouest sauvage n'est bientôt plus qu'un fantasme.
Toutefois, certains refusent ce "progrès" à marche forcée et continuent de vivre en marge de lois. Dutch Van der Linde mène ainsi une des dernières bandes de hors-la-loi en activité, regroupant certaines des pires canailles de l'Ouest pour vivre certes dans la violence et le danger, mais aussi dans la liberté.
Suite à un braquage qui tourne mal, la bande de Dutch est contrainte de quitter l'Ouest pour se rendre dans le Sud, là où la civilisation se renforce le plus. Recherchée dans tous les États, la bande va devoir lutter contre le gouvernement bien sûr, mais aussi les chasseurs de primes, les bandes rivales, ainsi que la Nature elle-même qui bien que magnifique reste impitoyable envers les téméraires qui s'écartent du chemin balisé.
On suivra plus spécifiquement Arthur Morgan, le bras droit de Dutch qui sera aux premières loges pour suivre la montée en puissance du clan avant son inéluctable chute, un chemin de pure violence au bout duquel il n'y aura que la mort pour tous et la Rédemption pour certains.
Pour comprendre la philosophie du game-design de RDR2 il faut prendre comme exemple celui de MGSV mais en négatif. MGSV proposait un open-world vide et moche dans lequel on pouvait aborder les missions d'une infinité de manière différentes. Dans RDR2 c'est l'inverse, le monde est magnifique et rempli de choses à voir, mais les mission en elle-mêmes sont extrêmement linéaires et n'offrent aucune marge de manœuvre au joueur. Dans cet écrin de technologie dernier-cri, à même de rendre en univers aussi vaste et détaillé, le game-design est similaire à celui des jeux Rockstar d'il y a quinze ans. Cela démontre l’obsession du jeu pour la cinématographie, cette manière de contrôler au maximum ce que fait le joueur pour garantir un impact maximal. Et ça fonctionne car jouer à RDR2 c'est comme regarder
Pour un Poignée de Dollars sauf qu'à tout moment tu peux faire pause, entrer dans le film, prendre le contrôle de Clint Eastwood et aller te promener dans les environs pour chasser le lapin, cambrioler une baraque, cartographier des sites indiens, jouer au poker dans les saloons, traquer des fugitifs, aider des immigrés allemands à trouver leur chemin, taquiner la perche, attaquer une diligence, cueillir des framboises...
Ce sont vraiment dans ces deux aspects que le jeu trouve sa substance ; les missions scénarisées dont la mise en scène étudiée se savoure comme un plat gastronomique, et à côté de cela les innombrables activités qui se grignotent comme des snacks. J'ai pris autant de plaisir à suivre le destin de la bande de Dutch dans des grandes séquences dignes des superproductions hollywoodiennes qu'à aller fouiner dans les coins reculés de la map pour découvrir une espèce animale que je n'avais pas encore répertoriée dans mon petit carnet, avant bien évidemment de la tuer à l'arc pour conserver sa dépouille de la meilleure qualité et ainsi la revendre plus cher au PNJ qui transforme les peux de bêtes en items cosmétiques. On oscille constamment entre un jeu à l'interactivité minimale et des moments purement jeu-vidéo lorsqu'il s'agit d'exploiter un bug pour faire du sequence-breaking ou de manipuler les spawns de certains animaux pour obtenir des avantages statistiques, et à tout moment le jeu reste cohérent.
Cela est principalement dû à la présentation excellente, la direction artistique est irréprochable et le jeu est toujours beau, toujours détaillé, il n'y a pas un rocher ou un buisson qui ait été laissé au hasard. L'écriture des dialogues est sublime et le travail du doublage et de la musique est
exceptionnel, tu sens que l'on est à un niveau au-dessus du tout-venant de l'industrie. Néanmoins il faut quand même aborder la question des contrôles, parce que oui lorsque certaines fautes sont trop évidentes on ne peut pas les ignorer. En faisant un tour dans les options dès le début du jeu on peut désactiver ou moduler certains paramètres pour rendre l'expérience plus supportable, mais certains choix de designs posent quad même question ; l'impossibilité de fixer ses armes sur son personnage ce qui oblige à manuellement changer son équipement dès que l'on descend de cheval (ce qui arrive
assez fréquemment dans ce jeu) j'ai envie de dire va te faire foutre, un truc pareil ça aurait dû sauter dès la première phase de test quoi.
Reste que RDR2 est un jeu-monument, une montagne à gravir dont on a pas envie d'arriver au sommet tant l'escalade est plaisante. Toutefois, à l'instar de
The Witcher 3, ses principales qualités sont extra-ludiques et tiennent à des considérations qui sont plutôt d'ordre narratif et esthétique. Ce n'est pas un jeu pour les gens pressés et les types qui lancent leur série Netflix avec le portable ouvert sur twitter ; c'est plutôt fait pour ceux capables de s'arrêter plus de quarante secondes devant une pièce de musée.