˛Love ExposureLove Exposure est un film clairement à part, le genre d’ovni cinématographique qui lorsqu'il s'achève, nous laisse échapper une longue expiration. En effet, le réalisateur Japonais Sono Sion nous délivre ici tellement de matières, de genres et d'émotions différentes, que l'on est sans cesse ballotté dans tous les sens et ce, dans une œuvre qui dure pas moins de quatre heures.
Quand on voit le pitch, on se demande comment ça peut être possible de combler autant de temps, sans sombrer dans l'égarement et la perte d'intérêt totale du fil scénaristique, seulement il s'avère que Sono Sion soit une véritable machine créative qui au final, nous fasse dire que c'était vraiment un minimum pour donner une cohérence à tout son génie.
Le film se divise en quatre parties assez distinctes. La première sera une sorte de prologue, qui nous présentera le jeune Yu Honda, fils d'un prêtre qui le force à se confesser tous les jours et qui l'oblige donc à sombrer dans le pécher et la perversion. Autant dire que cet arc est plutôt burlesque, notamment la partie concernant une discipline martiale appelée ''Tosatsu'' que je vous laisse soin de découvrir.
Ses parents étant de fervents chrétiens, Yu fait durant son enfance la promesse à sa mère mourante de lui présenter un jour sa ''Marie'', et c'est sur ce point que se concentreront la deuxième et troisième parties du film, qui mettront l'accent sur une romance particulièrement prenante et tortueuse. L'histoire prend une tournure dramatique qui fait rupture avec le démarrage plus léger et puéril. Le ton devient plus sombre et psychologique, plus cruel et violent aussi, pourtant la cohérence reste maîtrisée, le réalisateur se permet même de rétablir l'équilibre en cassant à nouveau l'atmosphère par une partie complètement délirante touchant le domaine du porno.
Sono Sion ne se contente pas seulement de prendre le temps d'approfondir ses personnages, il se permet aussi de critiquer en filigrane la société comme il la perçoit et dont il se joue certainement vu la vision qu'il nous en donne. Le religion chrétienne est assez décrédibilisée dans la mesure où face à la nature humaine, le désir charnel en l’occurrence, la foi ne pèse pas très lourd. L'Église Zéro qui vient chambouler le récit durant la seconde moitié du film s'inspire certainement des agissements de la secte Aum, dont les actes criminels furent reconnus dans les années 1990 au Japon. Il dénonce ici le danger des sectes, notamment auprès des jeunes, et à quel point la plupart des gens sont facilement influençables lorsqu'ils sont confrontés à une certaine détresse. Outre la religion, l'amour et le sectarisme, d'autres phénomènes de société passent aux cribles, comme l'homosexualité, les enfants maltraités, l'inceste, la pornographie…
Ce film arrive à allier légèreté et gravité, beauté et cruauté, sur un rythme effréné donné par le Boléro de Ravel qui accompagnera une bonne partie de la bande son, et qui nous mène tout droit vers un final en apothéose, en quatrième partie, qui ne laisse pas en reste sur le plan émotionnel. La richesse démesurée qui nous assène durant ces quatre heures paraît d'autant plus impressionnante quand l'on sait que pour des raisons budgétaires, le tournage s'est fait en un seulement un mois.
C'est difficile de pouvoir tous mettre à plats sur
Love Exposure sans y passer des heures, un seul visionnage ne serait sans doute pas suffisant pour tout assimiler d'ailleurs, mais ce qui est sûr c'est que ce film est particulièrement unique tant par la mixité des thèmes qu'il aborde, que par sa façon de les mettre en cohésion. Incontournable.