@ Topachook,
Selon moi, les scénaristes consacrent l’épisode 2 non pas à nous expliquer les règles mais à nous introduire Nona ainsi que sa façon d’aborder le jeu. Les règles présentées au cours de l’épisode étaient pour la plupart déjà suggérées par les épisodes précédents. Je pense (et espère, surtout) que cette façon qu’a Nona de considérer les humains ainsi que leur jugement sera amenée à évoluer. Que le propos de la série soit uniquement de démontrer la noirceur de l’âme humaine avant de l’envoyer dans le néant, ça serait assez simpliste.
Je ne me souviens pas avoir dit que Decim était un gentil bisounours, après tout il est l’élève de Nona. Il est très impliqué et convaincu de son rôle d’arbitre qui se doit de révéler la noirceur de l’âme humaine. Sauf que contrairement à elle, il semble faire plus d’efforts pour comprendre les humains, et est de moins en moins insensible à leur complexité, influencé par les histoires de ces derniers mais également par son assistante, qui n’est pas là pour décorer.
D'ailleurs il faudrait m'expliquer vu la façon dont Decim définit son rôle et l'assume durant l'épisode 4 pourquoi il n'en as pas fait autant lors du dernier épisode? où était passé sa fierté d'arbitre?
La réponse se trouve déjà dans mon précédent pavé. Decim assume son rôle d’arbitre, y compris dans l’épisode 3. Ce qui diffère entre les deux épisodes n’est pas son attitude
mais le jeu qui est défini par la roulette. Dans le 3, ce n’est pas Decim qui est tendre et compatissant, mais le jeu qui a été tiré au hasard, un hasard qui ne dépend pas de l’arbitre. (Mais là, on semble être d’accord.)
Selon moi, ce n’est pas Decim qui décide des règles du jeu et de son rôle durant la partie mais tout est déjà dans son « manuel d’arbitre » avant le début du jeu, il n’improvise pas dans le 1er de pousser les candidats à se chiper leurs fléchettes (à cause du nombre de points à atteindre) et ce n’est pas lui qui décide s’ils ressentent de la douleur au niveau des organes. De même, il n’improvise pas dans le 4ème de faire en sorte que l’un des joueurs ne puisse plus manipuler la machine pour jouer, c’est dans les règles du jeu. Le jeu du bowling est le moins douloureux et plus gentillet, pourquoi ? Parce que l’objectif est de donner une dernière chance aux deux jeunes gens de faire connaissance et sortir ensemble. Sa fierté d’arbitre est passée derrière les règles du jeu, dans cet univers, comme tu le dis, le bar n'est qu'un petit rouage d'une gigantesque mécanique.
L’incohérence que tu pointes du doigt n’existe qu’avec le discours de Nona, et la façon dont Decim perçoit son rôle, une façon que l’assistante (ainsi que moi, en tant que téléspectatrice) n’a de cesse de remettre en question, en grinçant des dents. Mais si on décidait de voir le bar, non pas comme un lieu de justice, mais un lieu de dernière chance, ça tient debout, même après le 4ème. Le thème de cet épisode étant « les regrets », les regrets d’une mère de ne pas avoir passé assez de temps avec ses enfants, et les regrets d’un jeune homme de s’être ôté la vie avant même de pouvoir tisser des liens avec les autres, surtout sa belle-mère qui lui tendait les bras.
Les émotions étaient aussi fortes que dans le troisième (oui, j’ai la larme facile) mais pour les faire ressortir, une gentille partie de bowling n’était pas appropriée, encore une fois, le jeu ainsi que les messes-basses de Decim étaient parfaitement pensés pour faire
réaliser quelque chose aux joueurs. Decim et Nona pensent que le but de la partie est de démontrer les ténèbres de l’âme humaine, de
mon point de vue (en mettant les discours de ces deux-là de côté), c’est pour provoquer un feu d’artifices d’émotions, faire ressortir ce qu’ils avaient sur le cœur et leur permettre de faire tomber les masques. Decim a envoyé la maman-star en enfer, et pourtant on ne peut que compatir à sa détresse, et voir dans son attitude un joli clin d’œil à ce qui fait la différence entre l’humain et l’animal : La conscience. L’instinct de survie fait qu’elle massacre le pauvre garçon, mais sa conscience la rattrape, et elle hurle comme un animal blessé, la scène était poignante. Comme Machiko, le « jugement » de Decim a été l’ultime injustice à son égard, que savait-il d’elle, de ce qu’elle ressentait, de ce qu’elle a souffert, de comment elle a toujours lutté pour continuer à vivre dans un monde impitoyable, comme elle faisait de son mieux pour sa famille, le fait qu’elle nous hurle (comme si nous étions les témoins de cette mascarade et non pas tribunal) qu’elle a autant été dupée par le jeu décidant de son sort que par la vie. Duperies après duperies, les scénaristes semblent de plus en plus appuyer l’intolérable injustice dont peut faire preuve le jugement final, et non pas une prétendue noirceur de l’âme humaine.
Pour ton paragraphe sur le tribunal, je ne vois pas trop où tu veux en venir, vu que tu mets autant que moi les failles de ce système de justice en exergue. Si tu me relis, je disais avoir du mal à considérer le bar comme un tribunal (à titre personnel) vu qu’il ne s’y déroulait pas de procès équitable, je le vois plutôt comme une joute. Après, tu peux le voir comme un tribunal, je peux le voir comme une joute, mais dans les faits, c’est un bar.
Dans la mesure où Decim n'insinue à aucun moment qu'ils mourront s'ils ne jouent pas ce n'est absolument pas une situation où la mort semble être très rapidement la seule issue.
Decim leur dit de jouer au jeu comme s’ils y pariaient leurs vies, il dit la même chose aux autres. Même dans les précédents cas, il ne dit pas cash « Vous mourrez si vous perdez », ils sont supposés arrivés à cette déduction d’eux-mêmes.
Bon, après, ça ne reste que ma façon d’interpréter la série jusque là, quelque part, ça pourrait tout autant être une daube moralisatrice essayant de nous dire « Regardez comme l’humain est laid quand poussé à bout, regardez comme certains méritent la damnation vu qu’un personnage rationnel en juge ainsi », ça serait extrêmement prétentieux vu que lesdits arbitres impartiaux sont en vérité les scénaristes derrière la série. Pour répondre à Down dans la foulée, je pense (et espère très fort) que le but de la série n’est pas de nous improviser juges aux côtés de Decim et Nona (si je parle plus loin d'intolérable injustice, ce n'est pas parce que je m'improvise juge et que j'aurai personnellement envoyé la maman-star au paradis, mais parce que je trouve très faible l'argument ayant décidé de son sort), mais pousser à la réflexion inverse. Une réflexion sur la difficulté de juger autrui, et que même en se basant sur des faits et en étant le plus rationnel possible, il est encore impossible de sonder le cœur humain, qu’il y existe autant de laideur que de beauté, plus qu’une morale, un message à passer pour qu’on ne cesse jamais d’essayer de se comprendre au lieu de se juger les uns les autres, de ne pas voir les choses en noir ou blanc, mais en apprécier les différentes nuances, l’être humain étant lui-même composé de différentes couleurs (Un peu à la Colorful, magnifique film que je conseille au passage).
/me passe du popcorn à Flo.