Episode 7 :Et une nouvelle élève est en cours de formation à l'école Ikuhara. Hashimoto Noriko, qui a fait ses armes sur
Aikatsu en faisant un petit passage chez Shinbo & co, était déjà co-réalisatrice de l'épisode de la semaine passée. Cette fois-ci, elle officie seule. Bref, nous sommes totalement dans les habituels passages de bâton que privilégie Ikuhara dans la production de ses animes.
On retient un style de comédie assez proche de celui de Shibata Katsunori, avec quelques influences shaftiennes (une petite ombre monstrueuse qui traîne par là), ainsi qu'un goût assez prononcé pour le hors-champ et les sous-entendus érotiques un peu beaucoup rigolos. On note aussi le nom d'emprunt de l'auteur du storyboard de cette semaine : Ryuunosuke Yoshiyuki, qui semble être un mélange entre le nom de deux auteurs japonais, Junnosuke Yoshiyuki et Ryuunosuke Akutagawa (dont l'oeuvre la plus célèbre est un roman satyrique et symbolique nommé...
Kappa). J'essaie depuis plusieurs semaines maintenant de mettre la main sur cette oeuvre. Je ne désespère pas ; et je ne manquerai pas d'en faire un petit commentaire ici si j'arrive enfin à la lire.
Mais si cet épisode est absolument marquant, c'est parce qu'il constitue un tournant fondamental dans la série.
D'abord, le premier changement s'articule autour de Mabu et Reo. Nos soupçons sont donc totalement confirmés et on en profite pour voir resurgir, de manière quasiment identique, la forme de malédiction de demi-vie qui faisait le fil rouge de
Mawaru. Décidément, Ikuhara signe et re-signe : il a une dent sérieuse contre la maladie et les hôpitaux, en dehors de toute "stratégie de survie".
Le spectateur ne comprend pas encore tout à fait qui sont véritablement Mabu et Reo, mais on a la confirmation définitive de la dissymétrie de leur relation. Ce que disait Ikuhara à propos de la limite ténue entre amour et désir s'illustre d'ailleurs très bien dans ce que l'on apprend. On note qu'il en profite pour ajouter à l'équation un peu de science-fiction très actuelle sur le transhumanisme et ses enjeux éthiques. Comme si ce dont traitait
Sarazanmai n'était pas suffisamment complexe comme cela. Surtout, cet enjeu nouveau entre bien en résonance avec le vocabulaire usuel d'Ikuhara, sur les différences entre le corps et la conscience, etc. ; et la méfiance générale à l'égard du corps, de ses faiblesses et de ses penchants.
Typiquement, car Mabu n'est qu'une marionnette sans âme. Reo est à la fois responsable de son état, pire que la mort, et la victime de ce subterfuge. Le moment de la non-reconnaissance de Mabu par Reo est un moment déchirant, qui fait écho à plusieurs autres relations dans l'anime : Kazuki qui veut aimer son frère même s'il ne l'est pas vraiment ; ou Toi qui montre un intérêt pour Kazuki-Sara, puis pour Kazuki lui-même.
Pour la première fois, on voit apparaître les loutres, et je dois avouer que j'adore leur design. Ces plans avec zoom progressif étaient absolument géniaux. Mais la scène finale, qui met en avant la présence de "l'Obscurité", est assez problématique.
En effet, il est assez clair, à la forme des yeux, qu'il s'agit du Kappa maléfique que nous avions vu dans l'épisode précédent, et qui apparaît également lors des séquences de danse des policiers en arrière-plan. Mais ce Kappa maléfique est gardé "prisonnier" (?) par les loutres, qui ont exactement les mêmes yeux rouges. À mon avis, tout ceci n'est qu'une gigantesque entourloupe.
Par ailleurs, le nombre de jeux de mots plus ou moins subtils est faramineux dans l'anime depuis le début. Mais l'un d'eux a retenu très largement mon attention, d'autant plus dans cet épisode où il est sans cesse mis en valeur :
Il y a une correspondance entre le mot "loutre" et le mot "mensonge" en japonais. Coïncidence ? Certainement pas. Les loutres sont donc des menteuses. Est-ce parce qu'elles manipulent Reo et Mabu ? Sûrement. Mais on pourrait aussi imaginer que les loutres sont des kappas maléfiques. Ce n'est qu'une piste, mais je trouve une certaine ressemblance entre le design des loutres et des mini-zombies qui volent.
Par ailleurs, concernant Mabu :
Les gâteaux qu'il cuit au début de l'épisode sont des gâteaux qu'il prépare dans le manga, et qu'il "oblige" Reo à manger. Cependant, il persiste toujours le doute dans l'épisode. Est-ce que la personne à laquelle il tient est Reo ou Sara ?
Cependant, même si les policiers ont un rôle central dans l'épisode (ils en font l'ouverture et la clôture), il y a selon moi des éléments encore plus importants pour l'intrigue et la compréhension générale de la série. Et notamment parce que les relations respectives des personnages changent du tout au tout. En effet, l'épisode précédent laissait prévoir un certain statut-quo, en tout cas un retour au calme et à la normale ; et ce retour a effectivement lieu. C'était presque étonnant, d'ailleurs. On sait par expérience que chez Ikuhara, l'expression "le calme avant la tempête" prend tout son sens. Et ça n'a pas manqué.
L'attitude de Kazuki est assez étrange depuis plusieurs épisodes. Plus j'y pense, plus je suis absolument convaincu qu'il essaie de
séduire Toi. Ce n'est pas simplement une bonne âme qui veut "sauver" Toi, ou qui en a "besoin" pour obtenir des dishes de l'espoir. Aussi, lorsque Kazuki dit dans l'épisode deux qu'il a "besoin de Toi", on comprend maintenant qu'il attend de Toi quelque chose de plus que sa collaboration servile dans ses entreprises. Certes, Kazuki a eu l'habitude d'utiliser Toi, mais Toi a chaque fois daigné se prêter au jeu, quand bien même il n'en tirait aucun bénéfice.
Dans l'épisode, cette attention particulière portée à Toi est sans cesse signalée par de petits détails de mise en scène :
Lorsque Toi commente le ton "familier" ou "trop amical" de Kazuki lorsqu'il l'invite à les rejoindre pour jouer au foot.
Lorsque Kazuki insiste pour qu'il soit intégré au groupe et cherche l'approbation d'Enta, non pas par égard pour les sentiments de son "meilleur ami" mais pour tenter de convaincre Toi d'accepter.
Lorsque Toi passe son coup de téléphone à son frère, Kazuki cesse de travailler et attend son retour en fixant le haut des marches.
Et inversement, Enta montre sans cesse des signes de réticence, dont le plus évident est sans doute ce jeu de scène avec la croquette. Il chiffonne un premier papier avec violence alors qu'il discute "amicalement" avec Toi de Kazuki, puis Toi est obligé de lui arracher de force la croquette qu'Enta fait pourtant mine de lui offrir. Il était difficile d'être plus explicite sur l'état actuel des relations entre les deux garçons à propos de Kazuki : c'est une véritable course à la conquête amoureuse qui s'orchestre entre les deux garçons pour les beaux yeux de Kazuki.
Enta qui continue de son côté à cultiver cet amour à sens unique, et terriblement malsain. J'ai mal à mon Enta. Ikuhara, pourquoi déchires-tu mon petit cœur sensible ?
Sa réaction face à l'intégration de Toi est extrêmement symbolique. Il aurait tout fait dans l'épisode précédent encore pour préserver cette image du "Golden Duo", et tous les souvenirs qui vont avec ; et cette fois-ci, car ils ont été "salis" (au sens propre) par l'apparition de Toi, les souvenirs sont bons à mettre à la décharge. Bref, amour obsessionnel, nous y voici. Enta est la Ringo de Sarazanmai.
Autre détail très, très étonnant : le changement soudain dans la personnalité de Keppi. Celle-là, je ne l'avais pas du tout vue venir. Et ce n'est pas comme si l'épisode expliquait grand-chose. Il est juste souligné à plusieurs reprises la négligence dont fait maintenant preuve Keppi, qui laisse sans surveillance son quartier général et (pire encore !) ses concombres.
Et donc, à propos de ça, quelques théories et idées (pas si) farfelues :
Je me demande si Sara n'est pas un garçon. En fait, ça ne m'étonnerait même pas. J'y réfléchis depuis plusieurs épisodes, car tout comme Kazuki s'est travesti, il ne serait pas incohérent, d'un point de vue strictement stylistique, d'avoir une princesse travestie. D'autant plus que le sexe de Sara est désigné par les policiers dans le manga spinoff... et que ces pauvres bougres n'ont pas l'air d'y connaître grand-chose. Ils auraient été sans mal capables de se tromper.
À cela, j'ajoute donc l'idée potentielle d'une tromperie particulière dont Keppi serait l'objet. Pour rappel, dans l'épisode précédent, on apprend que Reo a découvert l'existence de Keppi, et qu'il cherche à le retrouver. Or, sur le principe, il est le père adoptif de Sara. C'est tout de même une drôle de coïncidence que le Prince et la Princesse se retrouvent ensemble, d'un coup, subitement, sans aucune explication (sinon des fleurs de concombre qui fleurissent). Bref, selon moi c'est un très joli piège dans lequel Keppi est tombé. On ajoute à cela le dialogue du début d'épisode, lorsque Reo demande à Mabu de garder le silence sur ce qu'il a fait la veille.
Enfin, la série fait une telle fixation sur le caractère trompeur des apparences qu'il est difficile de passer à côté du message. Dans cet épisode, c'est surtout au niveau de la distinction entre grenouille et kappa que cela se fait :
- Keppi se méprend sur les mots prononcés par Enta et comprend "grenouille", alors que ça n'avait rien à voir.
- Keppi et Sara collent des étiquettes (ah ! la signalétique ; j'aime terriblement cet aspect métalinguistique chez Ikuhara) respectivement sur un kappa et une grenouille pour les différencier.
- Kazuki porte un t-shirt (rose, because he's gay) sur lequel est inscrit "grenouille"... mais où est dessiné un kappa. D'autant plus que Kazuki se transforme en kappa et non en grenouille.
Je vois aussi bien venir une sorte d'histoire d'amour ridiculement tragique entre Keppi et Sara. Sara qui devait piéger Keppi et qui finalement tombe réellement amoureuse (amoureux ?) de lui. Mais union impossible, et caetera.
Je poursuis dans ma lancée avec, une fois n'est pas coutume, un petit focus mode. C'est de l'ordre du détail, mais ça montre surtout à quel point la série est incroyablement bien pensée : Kazuki, pour la première fois depuis le début de la série, porte des rayures... sachant que tous les membres de sa famille en portent.
Pour finir, quelques remarques en vrac :
Le métro est l'antre des méchants. On aime. Plus généralement, il semble y avoir quelque chose avec les profondeurs.
La grenouille sur laquelle Keppi et Sara posent une étiquette apparaît sur une plaque d’égout.
L'eau semble être la métaphore du désir... dans laquelle les personnages se noient. Cela ajoute à l'idée des kappas comme créatures tentatrices, façon sirènes homériques, tel que je l'avançais à propos de l'épisode précédent et du rôle ambigu de Keppi.
On se souvient que Toi possédait dans sa chambre les mêmes affiches de foot qu'Enta. La concurrence sera rude.
Enfin, la nature du zombie de la semaine m'a particulièrement interpellé cette fois-ci. Je veux dire, plus encore que les fois précédentes. Le choix de l'objet est extrêmement révélateur, vu tout ce qu'il représente au sein de la série. Mais surtout, l'apparition de ce zombie ajoute une polysémie pour le moins malsaine à l'objet, et donc au symbole.
En effet, ce sont les ballons (de foot) qui sont choisis. Mais ils sont choisis pour illustrer le désir d'un sado-maso qui ne rêve que d'être frappé. On ajoute à ça l'assimilation entre le ballon de foot et la boule qu'il garde dans la bouche, ainsi que tout simplement le rapprochement avec les testicules, dont la présence ostentatoire chaque semaine est certes un gros coup de culot, mais sûrement pas gratuite. On veut en tout cas nous faire comprendre à tout prix qu'il y a quelque chose de sexuel au Sarazanmai, et le ballon semble donc le centre de l'intrigue.
En effet, le ballon est ce qui permet de se connecter aux autres (faire la passe), ce qui connecte effectivement les trois personnages principaux (que l'on sait grands amateurs de football), ce qui est assimilé au désir (sexuel) et à la souffrance. Bref, symboliquement, c'est un grand coup de génie de la part d'Ikuhara.
C'est tout pour cette fois-ci. Je vous laisse avec
cette image de Toi. Parce que
waw this is SwEeT !