Boy’s Abyss aborde des problématiques lourdes de façon dramatique. On y parle de suicide, de manipulation, de dépression, de relations toxiques… Ce n’est donc pas un titre à mettre entre toutes les mains.

Nous sommes rapidement mis dans l’ambiance assez glauque de cette ville dont les habitants ne parviennent pas à s’échapper que ce soit par pression familiale ou sociale. Tout le monde se connaît, tout le monde a ses secrets, tout le monde est dérangé. Au début de la lecture, on s’attend à un récit assez classique qui penche vers le drame avec un fond de romance. On se dit que notre pauvre protagoniste Reiji va s’en sortir, qu’il va prendre sa vie en main et partir vivre librement. Après tout, il est entouré par son amie d’enfance, sa prof principale et même sa mère qui toutes semblent veiller sur lui. Mais assez vite, on comprend que c’est un récit d’une descente aux enfers au plus profond des abysses. La plupart des personnages cherche en fait à manipuler Reiji, à amener cette coquille vide vers ce que chacun juge être la meilleure chose pour lui. C’est un peu frustrant de voir un personnage faire preuve d’aussi peu de recul et de suivre tout ce qu’on lui dit de faire. On finit d’ailleurs par devenir un peu indifférent à ce qui peut lui arriver.

Puis rentre en jeu le personnage de Nagi, qui lui propose une nouvelle possibilité, le suicide. Seul, il n’y aurait pas pensé, ne l’aurait pas tenté, mais si quelqu’un lui demande, cela devient une option séduisante. Et c’est là que les choses partent en vrille, que la noirceur des personnages se révèlent et que le récit se lance dans sa spirale sans fond où notre jeune ado entraine avec lui ses proches dans les abysses. Le récit commence alors à entrecroiser les destins des personnages, révélant des passés sombres, des personnalités défaillantes, des sentiments refoulés.

Bref, ce n'est pas la grande joie comme récit. On est dans la surenchère dramatique avec des personnages ayant de nombreux traumatismes. Je trouve que l’auteur en fait un peu trop. Le trait et les événements sont un peu forcés. La personnalité de certains personnages semblent faire des 180° par moment même si ça peut s’expliquer.
En gros, j’ai trouvé que ce n’était pas aussi maîtrisé qu’un Shuzo Oshimi qui prend son temps pour nous dépeindre la psychologie de ses personnages. Boy’s Abyss n’est pas aussi subtile ni aussi viscérale que peut l’être Les Liens du Sang par exemple. Il manque aussi de profondeur, à quoi bon parler de choses sombres si on en tire pas grand chose. J’avoue que je tape dans le haut du panier en parlant d'Oshimi, mais ça donne une idée.

De même, les dessins sont très propres, mais ils manquent d’impact pour ce genre de récit. Ils s’appuient sur une bonne mise en scène, mais pourraient être plus travailler au niveau des expressions des visages. Je pinaille là, c’est très bon quand même et les couvertures sont très belles.

Il y a des idées que j’ai bien aimé et que je n’ai pas forcément beaucoup vues ailleurs. La ville est presque un personnage à part entière, quelque chose d’oppressant pour les personnages. J’aime bien aussi la façon dont est traitée l’idée qu’une personne qui est au fond du trou ne cherche pas forcément à remonter mais à entraîner les autres dans un trou plus profond de façon consciente ou non.

En résumé, je pense que c’est un titre qui plaira aux amateurs de drame, à ceux qui aiment plonger dans la psychologie et les tourments des personnages. Je lui reprocherai juste de ne pas avoir une direction très claire et de se perdre un peu en voulant faire dans la surenchère de traumatismes. Mais, il y a pas mal de situations intéressantes qui font que l’on accroche au récit malgré ses faiblesses par moment et son manque de profondeur.