Déjà, soyons clair, je suis accro.
Bon, de base, je suis bon public pour les Isekai, mais celui-là sort vraiment du lot à mon sens.
Synopsis (version longue):
Le héros vit dans un monde où une infime minorité de gens possèdent des pouvoirs psychiques (télékinésie, clairvoyance, téléportation...). Lui possède une capacité particulièrement rare: celle de pouvoir tout manger (vraiment tout) et d'acquérir les capacités de ce qu'il mange. De, plus, il a subi une opération faisant de lui un surhomme à la force, rapidité et capacité de régénération renforcées. Bref, le type est une machine de guerre.
Malgré tout ça, il trouve quand même le moyen de se faire tuer. Il se réincarne alors dans un autre monde... en gobelin, race de demi-hommes ridiculement petits, faibles, stupides et à l'espérance de vie pitoyablement courte. Car oui, dans ce monde, existent des humains, des demi-hommes divers et variés (gobelins, elfes, leprechauns, dryades, nains, orques, hommes-chiens, Cait-Sith...), ainsi qu'une pléthore de monstres de tous poils. Dans l'ensemble, les différentes races ne se mélangent pas (si on excepte l’esclavage pratiqué par certaines races). Tout ce beau monde peut acquérir de l'expérience, des niveaux et des capacités (principalement par le combat et le crafting). Pour les hommes, l'évolution se traduit par le déblocage de nouveau métiers et de nouvelles facultés. Pour les demi-hommes et monstres, c'est carrément la race qui change. Dans les deux cas, l'arbre d'évolution est touffu; les évolutions d'un individu sont déterminées par ses actions et réalisations précédentes. Les dieux aussi s'en mêlent, attribuant de temps en temps des bénédictions et/ou des quêtes à des individus ayant retenus leur attention.
Pour en revenir à notre héros: Il est donc passé de surhomme à gobelin nouveau-né faiblard. Mais il a gardé de sa vie précédente sa mémoire, son intelligence (ce qui fait de lui un génie par rapport à ses pairs) et surtout sa faculté à absorber les capacités de tout ce qu'il mange. Il va donc commencer à évoluer à vitesse grand V, entraînant d'abord avec lui une poignée d'autres gobelins nouveau-nés, puis de plus en plus de monde, jusqu'à se retrouver à la tête d'une communauté multiraciale.
Le monde:
C’est l'un des plus complexes et des plus riches que j'ai jamais vu dans un manga (et même dans la littérature en général), d'où d'ailleurs mon synopsis à rallonge pour en expliquer les bases. Non seulement celui-ci comprend un bestiaire extrêmement large, mais il est surtout le théâtre d’un grand nombre d'intrigues, de tensions inter et intra-communautaires. C'est comme un ognon: À mesure que le héros découvre une facette du monde, on découvre de nouvelles espèces, de nouvelles couches d'intrigues, de nouveaux mécanismes de fonctionnement de l’univers. À ce stade de l'histoire (on en est au chapitre 63), le rôle joué par les dieux reste encore en grande partie un mystère, tout comme les intrigues qui se jouent entre royaumes humains.
Les personnages:
J'ai un faible pour le personnage principal. Il me fait un peu penser à Luffy, en plus mature et blasé: charismatique, franc et direct, d'un naturel généralement chaleureux mais souvent lunatique; il se comporte le plus souvent à l'instinct, mais sait réfléchir quand la situation l'impose. Différence majeure : Il planifie (parfois).
Comme dit dans le synopsis, les évolutions des personnages dépendent de leur comportements, actions et réalisations. En retour, ces évolutions affectent non seulement les capacités de ceux qui les subissent, mais aussi leurs facultés intellectuelles et leurs inclinations. On se retrouve donc avec des individus aux personnalités de plus en plus marquées et complexes (ou pas : certains évoluent en versions extrêmes du gros costaud à l’intelligence limitée).
Entre cette mécanique et le fait que le héros rassemble autour de lui un nombre croissant de subordonnés en tous genres, on se retrouve avec une quantité impressionnante de personnages secondaires aux caractéristiques extrêmement variés. Cela donne à la communauté un aspect cosmopolite et improbable assez fascinant.
Bien sûr, tous ces personnages n’ont pas la même importance. Certains se contentent de faire une apparition éclair (seuls ou en groupes) et de venir grossir les rangs de la communauté. D’autres apparaissent plus régulièrement, mais ont une fonction assez simple dans l’histoire. Le traitement psychologique réservé à tous ceux-ci est naturellement assez sommaire (voire inexistant). En revanche, les personnages de premier plan ont tous le droit à un développement psychologique plus que correct.
L’intrigue:
Là encore Re:Monster m’évoque One Piece. On a un héros qui trace sa route sans trop se poser de question. Il rencontre des gens. S’ils lui plaisent, il s’en fait des subordonnés ou des alliés. S’ils s’opposent à lui, il les tabasse et - selon les cas, son humeur et son appétit du moment – les dévore ou en fait ses subordonnés. S’il ne peut pas les tabasser, il prend la fuite sans honte aucune.
Au passage, il met ses gros sabots dans les intrigues plus ou moins complexes du monde dans lequel il évolue.
Pour autant, des différences sensibles existent :
- Luffy se constitue un équipage réduit qu’il entraîne gaiement par son seul charisme.
Le héros de Re:Monster, quant à lui, rassemble autour de lui une communauté importante. Surtout, malgré son caractère chaleureux et bon enfant, il dirige cette communauté d’une main de fer, tantôt en despote débonnaire et éclairé, tantôt en tyran qui n’hésite pas à bouffer (littéralement) les dissidents.
- Dans One Piece (du moins dans le One Piece des débuts), les intrigues auxquelles se retrouvent mêlées Luffy sont généralement relativement simples, et indépendante les unes des autres.
Dans Re:Monster, on devine d’emblée que ces différentes intrigues font partie d’une trame bien plus grande, dont l’essentiel reste encore à découvrir. Le public visé étant plus âgé, Re:Monster peut aussi se permettre des intrigues plus complexes et plus subtilement amenées. Bon, les toutes premières sont simples (après tout, il faut qu'une poignée de gobelins soit en mesure de peser dans la balance), mais plus ça va, plus elles gagnent en enjeux et en complexité.
La narration:
Parti pris original pour la narration : Le manga se présente comme le journal intime (en images) tenu par le héros. Le ton y est nonchalant, brut de pomme, très concis. Les auteurs jouent souvent la carte du décalage entre la pensée/conclusion héro (exprimée dans une boîte de texte) et l’histoire telle que montrée à travers les images.
Je ne sais pas si tout le monde accrochera, mais pour moi c’est l’un des plus gros bons points de l’œuvre. Ça ajoute un contrepoint léger et humoristique au côté épique de l’histoire.
Le graphisme:
Soigné. On voit que le manga bénéficie d’une parution mensuelle et non hebdomadaire. Les couvertures de l'édition brochée de la série ne rendent malheureusement pas justice au dessin du manga; je vous conseille de faire une recherche rapide sur Google image pour vous faire une idée plus juste de la chose.
Beaucoup de jeux sur les expressions des visages, cadrages assez variés.
Le mouvement, en particulier les combats, sont lisibles et très dynamiques.
Au niveau chara-design, c’est jouissif : Comme l’aspect des personnages change à mesure qu’ils évoluent, le dessinateur s’en donne à cœur joie pour créer et recréer des personnages à l’aspect de plus en plus badass, sexy ou franchement bizarre (voire un peu de tout ça en même temps).
Le harem:
Il y en a un, mais il est supportable, même parfois assez drôle. Et c'est déjà pas mal.
Les points noirs:
Je cherche, je cherche, mais pour le moment je ne trouve pas.
J’ai une réserve cependant: Re:Monster est très ambitieux. On ne saura qu’à la fin de la série si les fils d’intrigues semés jusqu’à présent formeront une trame aussi cohérente et captivante que promise. Affaire à suivre…