Ce one-shot de 326 pages est divisé en dix-neuf chapitres de taille inégale, chacun présentant une histoire indépendante, même si on peut déceler une certaine chronologie.

Certaines histoires sont en fait de petits contes, souvent tristes et cruels, d’autres montrent des situations de conflits entres oiseaux ou entre l’homme et l’oppresseur volatile. Ce cocasse retournement de situation est habilement utilisé pour dénoncer les travers de l’humanité, avec beaucoup d’humour et en s’amusant des différences de morphologie des oiseaux. Au fil des pages, les oiseaux traversent les époques déjà vécues par les humains, de l’antiquité romaine (avec des combats de gladiateurs et le parallèle Pololo / Jésus) à l’ère contemporaine, même si les technologies de l’ancienne civilisation industrielle humaine restent pour eux un mystère. Au fil de leur évolution accélérée, les oiseaux ressemblent de plus en plus aux hommes, des classes sociales apparaissent… ainsi que des administrations corrompues.

Graphiquement, on sent bien que cela date des années 70. Les décors sont épurés voire inexistants, il y a très peu de nuances de gris et le chara-design humain est super old school, mais ce n’est pas laid pour autant. Le fait d’humaniser le look des oiseaux permet de les habiller, de leur fournir moult expressions, bref, de leur donner vie. De beaux dessins de « vrais » oiseaux parsèment aussi les pages du livre, afin que l’on n’oublie pas à quoi ressemble un vrai volatile ! Question rythme rien à dire, tout s’enchaîne avec fluidité, le simplicité du dessin facilitant la lecture. L’auteur s’autorise parfois quelques fantaisies au niveau de la forme des cases, même si le bon vieux rectangle occupe la majorité des planches. Le fait que l’édition française soit récente a l’avantage de proposer un français moderne et percutant, qui sonne juste dans ses expressions familières.

Sans être trop démonstratif ou moralisateur, ce manga nous retourne en pleine face les faiblesses de notre monde, le terrible orgueil humain ainsi que ses vices les plus détestables. Mais comme c’est tourné avec cynisme et humour, l’expérience est un vrai régal du début à la fin.