Eyeshield 21 ou comment se réconcilier avec le shônen de sport.

Ecrire un shônen sportif est extrêmement simple. Une équipe de loosers, un nouveau venu talentueux, les premiers matches délicats, un adversaire charismatique rapidement identifié et que l'on retrouvera en fin de tournoi, les entrainements de plus en plus durs, les problèmes de motivation, etc. Ce sympathique schéma, hérité de Captain Tsubasa (Olive et Tom), a malheureusement été tellement repris depuis, que lire un manga de sport ne provoque désormais que très rarement de la surprise, du rire ou de l'émotion.

Heureusement Eyeshield 21 est apparu pour nous guérir de Prince of Tennis et consorts.

Pourtant les principes ayant plombé le genre et énoncés plus hauts, Eyeshield 21 les reprend tous. Oui, oui, tous.

On est alors en droit de se demander en quoi ce manga vaut le coup. Et bien simplement car il est différent.

Les auteurs ont réussi à créer une oeuvre à part, tout en se conformant aux règles du genre, ce qui est remarquable.

La première grande qualité vient du ton adopté, résolument second degré, et qui aboutit à un manga qui ne se prend que très rarement au sérieux. Les personnages sont tous plus ou moins dingues, tout comme les matches et les entrainements dirigés par l'incroyable quater-back sadique Hiruma qui tient plus du Hisoka de HunterxHunter que du Roberto de Captain Tsubasa. Même le héros, d'habitude très carré dans ce type de production, participe ici régulièrement aux délires de ses camarades.

Le but semble être de faire rire en toute circonstance et pour cela toutes les astuces de l'art graphique sont utilisées, en particulier les arrières-plans où il se passe toujours quelque chose (cherchez Cerberus le chien) et les pages de chapitres plus idiotes les unes que les autres.

L'autre grande qualité de ce manga est son côté didactique. Puisque les membres de l'équipe des Deimon Devil Bats ne connaissent même pas les règles de leur sport (!), il faut les leur expliquer (bah oui!). Ce qui est fait par l'intermédiaire de petits schémas tactiques souvent humoristiques qui viennent régulièrement former les Deimon (et le lecteur par la même occasion) aux subtilités du "Blitz", du "In motion" ou des "Fake". Les auteurs ont visiblement voulu faire partager leur passion d'un sport que peu de gens connaissent ou comprennent en dehors des USA.

Pari réussi car, à la lecture d'Eyeshield on en vient à vouloir assister à de véritables rencontres.

Pour être exhaustif, on regrettera les quelques passages au cours des matches où le scénario retombe dans le syndrome shonen sportif pur et dur façon "nous ne pouvons pas perdre car notre cause est juste" et "nous vaincrons car notre volonté est la plus forte". Heureusement ces moments un peu agaçants sont rares et ne gâchent à aucun moment le reste d'une oeuvre à part et à découvrir.