Stratège se déroule en Chine à la fin de la période dite des Royaumes combattants (Ve – IIIe siècles av. J.-C.). À cette époque, plusieurs pays s’affrontaient sans cesse. Accablé par les maux de la guerre, Mo-Tseu, un philosophe chinois, élabora toute une pensée antimilitariste et égalitaire. Sa doctrine fut à l’origine d’une école d’arts martiaux, «les hommes de Mo».
Ke-Ri, le héros de l’histoire, est un disciple de cette école. Lorsque l’armée de Tchao marche sur la cité de Liang, il n’hésite pas à se mettre au service de la ville. En effet, l’un des objectifs du clan est de sauver les populations assiégées en utilisant des stratégies défensives.
C’est sur ce postulat que débute l’histoire de Stratège. Le siège de Liang va occuper la première partie du manga, et c’est sans doute cette partie-là que j’ai préférée. Ke-Ri va faire face à un redoutable général, qui va tout mettre en œuvre pour essayer de prendre la cité. Leur duel de stratèges à distance rythme très bien les premiers tomes, et cela jusqu’au dénouement. C’est aussi pendant ces tomes que Ke-Ri va rencontrer celui qui sera son pire ennemi : Pei-Ping.
Puis l’histoire entre dans une nouvelle phase : une sorte de road-trip à travers les différents royaumes chinois, où Ke-Ri et ses nouveaux amis sont confrontés aux plans machiavéliques de Pei-Ping. Enfin, la dernière partie se concentre sur le siège de Han-Tan, capitale du pays de Tchao.
Le manga a une histoire qui se veut réaliste. La guerre est montrée de manière très violente et sous tous ses aspects : moments de bravoure, mais aussi morts souvent cruelles, massacres, tortures, etc… Personne n’est épargné, et il vaut mieux être soldat que femme ou enfant.
Tout est bon pour gagner : espionnage, empoisonnement, armes expérimentales, trahison, guerre psychologique, et encore plein d’autres joyeusetés ! Les hommes de cette époque ne disposaient pas de la technologie d’aujourd’hui, mais ils avaient déjà beaucoup d’imagination quand il fallait anéantir l'ennemi ! Cela nous donne un manga qui porte très bien son nom.
L’auteur a aussi voulu raconter l’histoire d’un homme, Ke-Ri, qui va essayer de défendre, souvent seul contre tous, son idéal. Le bonhomme n’a rien pour lui : petit et chauve, il est un peu bizarre et solitaire. Pourtant, le sous-estimer serait la plus grave des erreurs, parce qu’il n’est pas qu’un excellent tacticien, mais aussi un maitre des arts martiaux, sans pitié pour ses ennemis.
On pourra vibrer pour le duel entre Ke-Ri et H'Siang Yen Zhong, nettement moins sur d’autres choses. Les personnages secondaires sont transparents, en particulier ceux de la cité de Liang. Il faut attendre la moitié du manga avant que Ke-Ri s’entoure d’amis qui sont un peu mieux exploités dans l’histoire. Il manque quand même quelque chose pour qu’on puisse vraiment s’attacher à cette bande.
Au niveau des dessins, on n’est pas dans le haut du panier. Pas mal de gros plans, l’accent est surtout mis sur les visages, avec toujours ce ton réaliste (à quelques exceptions près). Par contre, ne regardez pas trop les décors, parce qu’ils sont peu détaillés, lorsqu'ils existent. Il y a quand même une amélioration des dessins entre le début et la fin.
Mon principal reproche porte sur le dernier tome : le final est complètement bâclé ! L’intrigue et les sous-intrigues sont résolues à la va-vite, tout ce qui faisait la subtilité de l’histoire jusqu’à présent disparait. Et les dernières pages, j’ai trouvé ça bidon. C'est carrément hors sujet, à se demander si l'auteur n'avait plus rien à raconter, ou s'il s'en foutait complètement.
À défaut d’être mémorable, Stratège ravira ceux qui sont à la recherche d’un bon manga historique, où la bagarre est autant une affaire de cerveau que de muscle.