Je ne suis pas sûr de savoir à quel point il est utile de le rappeler mais ne sait-on jamais qu'un lecteur de passage lise ses quelques lignes (coucou lecteur de passage) : j'ai une assez grande faiblesse pour le manga de combat avec des super pouvoirs bizarres. Et s'il y a bien un titre qui a alimenté cette passion singulière, c'est sans doute La Loi d'Ueki. Pour l'histoire, j'avais acheté le premier tome du manga il y a de très longues années en partie parce qu'il n'était pas connu. Et mon bon goût, que les mauvaises langues diront certainement proche du paranormal, s'est tourné vers le bidule dont le design douteux allait parfaitement de paire avec son intrigue : Mori Ai suit un de ses camarade de classe après les cours persuadé qu'il est un extra-terrestre venu envahir la terre vu qu'il peut faire pousser des arbres dans sa main. Mais foutaises, les extra-terrestre, ça n'existe pas. Non, Ueki est le potentiel participant d'un gigantesque tournoi entre lycéens dotés de super pouvoirs et dont la finalité est d'élire le nouveau Dieu.
Et tout de suite, c'est bien plus raisonnable.
Bon, soyons clair tout de suite : La Loi d'Ueki n'est absolument pas remarquable pour son intrigue. L'histoire est sans cesse trainée par des gag plus ou moins douteux mais presque toujours complétement absurde et dont l'origine est souvent Ueki lui-même, un lycéen gentil et naïf mais tout de même un peu bizarre. Mais au final, c'est pas trop grave : y'a un tournoi et ça suffit à fournir des méchants très méchants sur qui taper. Hein ? Des lycéens ? Mais non, c'est pas grave. Des ados qui se battent entre eux ça arrive tout le temps, c'est comme ça qu'on devient un adulte (il parait). C'est pas deux ou trois boulets de canon dans la figure - dans le meilleur des cas - qui vont empêcher la jeunesse de grandir quand même. Alors quoi, un shônen sans intrigue autre que deux ou trois flahsback larmoyants ? A 16 ans, peut-être bien mais aujourd'hui on a Shingeki no Kyojin avec des gens qui meurent dedans, pourquoi aller s'empêtrer dans cet artefact antique qui tente de nous faire croire qu'on peut raisonner ses cadets avec des hyper baffes explosives ? "Un peu de sérieux, quoi" je vous entends tous souffler.
Erreur, grossière erreur : Red est toujours sérieux, même quand il ne l'est pas.
Fukuchi Tsubasa, l'auteur de cette joyeuse ânerie, est certainement un des mes auteurs actuels préféré et sans aucun doute un des auteurs de shônen les plus ingénieux que je connaisse. Bien sûr que ses histoire sont affreusement stupides, mais c'est tellement en raccord avec toute l'ambiance, visuelle aussi bien que narrative, qu'on ne pourrait pas vraiment s'en plaindre. La Loi d'Ueki se créé son petit monde, avec les règles qui lui sont propres. On a rarement vu quelque chose d'aussi cohérent dans son absurdité et c'est exactement ce qui fait que, contre toute attente, La Loi d'Ueki est un shônen qui marche. Il est relativement fidèle à lui-même et les moments où il perd en efficacité sont ceux où il tente d'être plus sérieux ou plus dramatique, ce que d'autres Jojo Bizarre Adventure ou Hunter X Hunter feront mieux que lui. A noter, par exemple, la très grande tendance de l'auteur de ne pas réussir à mettre ne scène un affrontement final digne de ce nom, que ce soit dans cette série là ou dans sa séquelle, très originalement nommée La Loi d'Ueki Plus. Et c'est tant mieux qu'on parle d'affrontement, puisqu'on touche au cœur même de ce manga : la baston. Mais pas la baston brutale avec des gros muscles. Non, la baston subtile où on se bat avec des arbres.
Mais si, je vous jure, c'est très subtile.
Complètement dans la veine de Jojo Bizarre Adventure, chaque personnage est doté d'un pouvoir qui lui est propre et dont la règle est la suivante : plus c'est stupide, plus c'est puissant. Cracher du feu ? Médiocre, c'est bon pour les nuls. Faire apparaître des tornades ? Pourquoi pas, ça pourrait s’avérer un peu utile. Faire exploser des perles ? Là, on commence à tenir quelque chose. Transformer des torchons en métal ? La puissance. Changer ses cheveux en bâtons de caoutchouc ? On frôle de peu l'invincibilité. Je vous laisse imaginer à quoi ressemble le pouvoir le plus puissant de ce monde merveilleux (hint : c'est pas celui du héros, encore trop banal). A ce stade, on pourrait encore se dire que tout ça ne relève que du gimmick. Finalement, il n'y a presque pas de différences entre lancer des boules de ki ou des tomates de magma explosives. Oui, j'ai dis presque. Mais ce qui fait le sel de ces combats, et l'ingéniosité de l'auteur, c'est que ces pouvoirs qui n'ont ni queue ni tête sans utilisés dans des combats où la stratégie l'emporte sur le puissance pure. Et si certains combats brillent plus que d'autres, la qualité générale est plutôt dans le haut du panier. Il y a toujours une certaine importance du power up, qui rythme réellement l'intrigue de bout en bout de manière très visible à partir d'un certain arc, mais on n'oublie pas pour autant la bonne humeur très chère à la série. Il n'est jamais vraiment question de savoir qui a les plus grosses tomates, mais toujours de savoir qui va utiliser aux mieux les circonstances absurde de tel ou tel affrontement. Et plusieurs combats de la série sont des magistrales leçon de d'ingéniosité. Et de sombres rires imbéciles, aussi.
Je sais jamais trop à qui conseiller de lire La Loi d'Ueki. C'est presque honteusement idiot, mais aussi plutôt charmant, avec des personnage rigolos et ses combats aux situations inattendus. Certains diront que c'est trop cliché, basique et déjà vu mais force est de constater que le bidule tient ses promesses avec un style qui lui est propre. Et finalement, c'est avant tout ce qu'on demande d'un bon vieux shônen de baston des familles. Qui plus est, Fukuchi Tsubasa n'est pas encore un vieux de la vielle et on le sent s'améliorer à vue d’œil, même s'il accuse récemment d'un style rondouillet plus générique qui tranche pas mal avec les tronches géométriques des premiers tomes de La Loi d'Ueki. C'est finalement en cherchant à trouver mieux dans la même catégorie et en tombant sur des mastodontes du calibre de Diamond is Unbreakable ou Hunter x Hunter qu'on se rend compte à quel point la performance est à saluer.
La suite ne mérite pas vraiment de critique à part entière vu que son arrêt a priori prématuré n'en fait qu'une petite sucrerie pour les fan. Mais c'est le même délire, avec quelques combats encore plus géniaux même. A lire sans hésiter si vous en voulez en plus mais sans s'attendre à plus que ce que La Loi d'Ueki fournissait déjà. Cette suite a quand même parmi ses antagonistes un dont la motivation principale est la plus incroyable jamais écrite.