Dans l'univers de la bande dessinée japonaise, nombreuses ont étés les collaborations entre des génies de ce domaine. Seraphim est d'ailleurs un produit, un chef d’œuvre issue d'un de ces travaux réalisés en duo dont les deux parents sont le grand Mamoru Oshii (Patlabor 1 & 2, Ghost in the Shell...) et le brillant Satoshi Kon dont la carrière dans l'animation en tant que réalisateur ne débuta qu'un an après la publication du sujet de ce texte avec Perfect Blue en 1997.
Il serait aisé de faire une critique de ce manga sans même l'avoir lu, tant la manière de faire de monsieur Oshii dans la réalisation de ses œuvres est rigides... ou plutôt bien ancrée sur une recette alliant des ingrédients au goût relevé qui sait plus ou moins aisément trouver son public. A savoir un rythme très lent dû à des dialogues très lourd de sens entrecoupé par de courtes scènes d'action, des références en tout genre (aussi bien historique, que politique ou encore biblique), une psychologie des personnages travaillée à l’extrême et un cadre géo-politique intense, intéressant et surtout bouleversant.
Il existe toute fois un point négatif, qui a tout de même une certaine importance. Ce défaut ne se situe pas directement dans l’œuvre, mais dans le duo formé par les deux virtuoses présentés ci-dessus. Effectivement, bien que Satoshi Kon aie travaillé avec Oshii et lui aie donné de nombreuses idées (on retrouve une des grandes thématiques qui lui est cher ; le rêve), on sent bien que son rôle se situe surtout au niveau du dessin (dessins qui sont par ailleurs très réussis) et que Oshii, aussi excentrique qu'il est un génie, n'a pas eu l'envie de desserrer son étreinte sur la barre. Deux maîtres dans un duo ne font bon ménage, alors au final, Seraphim c'est 16 chapitres dont un prologue ; un manga inachevé dont la fin se situe dans notre imagination à tous, ce qui rend également l’œuvre très frustrante (Kon est hélas abonné à l'inachevé...).
Toute fois, j'accorderais un très bon point pour l'édition magnifique que nous a sorti IMHO. Malgré son prix assez élevé de quatorze euros, c'est une édition qui m'a conquis par ses pages couleurs, ses pieds de pages riches en explications, sa post-face explicative et bien-sûr le mot de l'éditeur en fin d'ouvrage.
Pour conclure, dira-t-on simplement qu'un chef d’œuvre se doit d'être intemporel mais pas forcément de mener à conclusion, c'est du moins ce que m'ont prouvés Oshii et Kon.