Your Lie in April – YOLO

Kousei Arima est un collégien un peu taciturne. Il n’est encore jamais tombé amoureux mais surtout il a perdu sa passion : le piano. Musicien de génie, il ne joue plus depuis le décès de sa mère, célèbre professeure de piano qui l’a mis devant ce monolithe intimidant dès son plus jeune âge. Bloqué psychologiquement, il traîne sa peine avec ses deux amis d’enfance : Watari, coureur de jupons et capitaine de l’équipe de foot de l’école, et Tsubaki, qui joue elle dans l’équipe de softball. Mais il voit son monde se colorer quand il fait la rencontre de Kaori Miyazono, une fille qui semble être son contraire. Pétillante de vie, brusque sur les bords, elle vit pour la musique. Violoniste très talentueuse, son impétuosité l’empêche de gagner les concours mais elle gagne les cœurs du public.

Lors de la présentation des nouveautés de la saison, j’avais rapidement fait le rapprochement avec Nodame Cantabile. Si je persiste à penser que Fuji TV essaye, à travers cette adaptation, de réitérer ce qui reste l’un de ses plus gros succès, la comparaison est un peu cavalière. Fort d’un débat riche sur le forum, j’aime autant mettre en avant dès le début que si les deux séries d’animation partagent un fond commun des mêmes ingrédients, la recette choisie est bien différente.

Nodame Cantabile est un josei, donc pré-publié dans un magasine qui vise les jeunes femmes, alors que Your Lie in April (Shigatsu wa Kimi no Uso en VO) est un shônen qui vise plutôt les garçons et adolescents. Si vous traînez depuis assez longtemps sur Anime-Kun (déjà vous allez me faire plaisir et vite mettre le site en favori, allez plus vite que ça), vous savez  combien on reste circonspect sur l’utilisation de ces catégories tellement elles sont piégeuses. Néanmoins, elles restent parfois pertinentes et cela se retrouve ici. Nodame Cantabile mettait en avant d’abord une série sur la musique avec en fil narratif le passage à l’âge adulte des protagonistes et quelques romances. Dans Shigatsu wa Kimi no Uso, la musique est d’ambiance mais ce sont les personnages et les relations qui les unissent (ou les désunissent) qui sont mis en avant. De plus, on passe de personnages adultes à des ados aux préoccupations bien différentes. La perspective choisie n’est pas la même et les deux séries ne toucheront pas forcément les mêmes publics.

Mais vous tomberez tous facilement sous le charme (à moins d’avoir l’âme plus noire que du vantablack) d’une qualité technique et artistique pleine de vie. A-1 Pictures a fait les choses bien et pourtant le CV des membres du staff n’était pas forcément rassurant. C’était la grande première de Kyōhei ISHIGURO en tant que réalisateur et le fin dosage des différentes scènes (j’ignore à quel point il a suivi les planches du manga) est très réussi. Mais au-delà du chef d’orchestre, je veux saluer le boulot du directeur artistique Hisayo USUI, pourtant plutôt habitué aux séries ecchi (comme quoi il ne faut jamais préjuger de rien), qui offre des discours tantôt doux, tantôt acidulés et pétaradants de rose, vert, jaune, etc. jusqu’au scène en nuances de gris quand le cœur des personnages a lui aussi perdu toute couleur. Plus encore j’ai été bluffé par l’animation de Yukiko AIKEI (Accel World), notamment lors des scènes d’interprétations musicales qui sont totalement folles. J’ignore s’il s’est appuyé sur la rotoscopie pour avoir un rendu aussi vivant mais le résultat est absolument incroyable. C’est peut-être mes vieilles marottes qui prennent le dessus mais j’avais presque l’impression de voir l’intensité d’une série sportive.

Ce peps contraste avec le ton de la série. Les plus attentifs auront peut-être tilté sur le traumatisme du personnage principal et les teintes grises qui délavent Shigatsu wa Kimi no Uso : c’est d’abord une tragédie. Enfin pas vraiment, le terme le plus juste serait de dire que c’est une série sur la vie. Mais d’une part ça fait tarte dit comme ça et d’autre part je ne saurais résumer en quelques mots l’équilibrage de la série. Je vais quand même essayer pour justifier mon chèque.

Les personnages de Shigatsu wa Kimi no Uso ont un passé, un vécu. Si quelques flash-backs éclairent le spectateur, ils restent souvent brefs et beaucoup de choses passent par le non-dit. Le non-dit des personnages qui ne s’ouvrent pas totalement à leurs amis, quitte parfois à les blesser involontairement, mais le regard extérieur du public en comprend plus, spécule, craint, espère. Et c’est là que toute la mise en scène est particulièrement bien dosée car les émotions ne sont pas surlignées avec des gros sabots en sortant les violons et des déclarations envolées. Tout se joue sur un regard, une rapide expression des personnages. Ces derniers sont à un âge particulier où ils ne comprennent pas toujours eux-mêmes ce qu’ils ressentent et a fortiori ce que ressentent leurs proches.

Et la cerise sur le gâteau c’est que la série n’oublie pas d’être drôle. Pas toujours pour faire rire le spectateur (même si c’est souvent efficace) mais parfois pour mieux nous briser le cœur. Les gens mentent : à eux-mêmes, à tout le monde et surtout devant ceux qu’ils aiment. Ce sont nos secrets qui nous définissent, nous permettent parfois de vivre, d’arracher un moment de bonheur mais aussi qui nous abîment, blessent les autres et donc nous font encore plus mal.

La série est disponible en simulcast sur Wakanim.