Alors, que dire d'Unlimited Blade Works, tant attendu par tous les fans des œuvres de Type-Moon ? Le scénario adapté est la deuxième route du Visual Novel, au titre éponyme. On s'éloigne donc très rapidement des évènements de la route de Fate montrés dans l'anime, mais bien sûr le principe reste le même : à savoir, le contexte de la Guerre du Saint Graal est toujours présent et on retrouve évidemment les mêmes protagonistes.
Le contexte et le protagonistes. On les retrouve, certes, on les aime, on les idolâtre, car nous les connaissons déjà bien. Voilà donc le choix qu'a fait le studio DEEN lors de l'adaptation de ce scénario. Il est clair dès les dix premières minutes du film que celui-ci ne s'adresse pas au spectateur anodin, mais à quelqu'un qui a au moins vu la première moitié de l'anime, sinon joué au Visual Novel. Cela dit, ce n'est pas un mauvais pari, mais plutôt une décision prise après une délibération mure et surtout un manque de choix. UBW nous propose un scénario maintes fois plus étoffé que son compère Fate, et compresser tant d'évènements dans à peine une heure quarante-cinq est une épreuve plus qu'ardue. Qu'en est-il du résultat ?
"Attention, bouclez vos ceintures, serrez les dents, ouvrez les yeux et restez concentrés, le Concorde va décoller !" est le conseil que je donnerais au spectateur avant d'appuyer sur 'play'. (Je définis 'spectateur' ici par n'importe qui ne connaissant Fate/Stay Night que par l'adaptation animée et/ou le manga. Quant à ceux pour qui UBW serait le premier contact avec la franchise, je vous propose d'arrêter la lecture ici-même et aller regarder l'anime afin d'avoir une chance d'apprécier le film). Donc, je disais que ça décolle dès les premières minutes, tel un avion supersonique. Les premiers épisodes de l'anime sont résumés en moins de vingt minutes. Le spectateur en prend plein la vue, mais peine à comprendre. (Ceux qui ont lu le Visual Novel ne comptent pas, pour eux, c'est une promenade de santé =D ). Il est donc clair que l'œuvre souffre des contraintes de temps qui lui sont imposées, mais je veux souligner que cela ne dérange que pendant les premières minutes. Ca se calme par la suite, et à mon avis sur cet aspect-là, le pari des réalisateurs est réussi. Le scénario suit les évènements majeurs du Visual Novel de très près, contrairement à l'anime, et est assez compréhensible pour tous, que ça soit des fans ou du spectateur anodin. J'ai donc envie d'applaudir le Studio DEEN de nous avoir produit une œuvre cohérente malgré de telles contraintes. Cela dit, j'ai quand même mon mot à dire en tant que fan inconditionnel de la license, il faut bien. La compression nécessaire du scénario n'a pas laissé la place à un élément essentiel omniprésent dans le Visual Novel : le slice of life. Certains aiment, d'autres non. Personnellement, j'ai ressenti l'absence des descriptions interminables des talents culinaires de tous les personnages...ou encore les discussions anodines entre Shirou et Issei. Moralité : ce film n'est pas Aria, ne vous attendez pas à une promenade aquatique en gondole à travers Néo-Venezia. On pourrait tout de même noter que ce manque de calme dû à la contrainte temporelle se laisse sentir, il manque d'interludes paisibles entre les combats et les retournements de situation (j'ai entendu Code Geass ?). Cela dit, rassurez-vous (ou pas), ce film est plutôt éloigné du style de l'anime mentionné.
Merci d'avoir lu mes plaintes de fanboy, maintenant penchons-nous un peu sur l'oeuvre elle-même. Je rappelle que celle-ci est un film, et non pas une série. On a donc un budget entier consacré à 1h45 de réalisation. C'est là qu'on a envie de crier 'Amen, Alleluia et beurre de cacahuète'. Finis, les visages tordus, finis, les décors aux oubliettes, finie, l'animation saccadée. La forme sur résultat final est parfaite de tous les points de vue. Je ne le soulignerai jamais assez : on a ici un bijou, un trésor, une merveille de l'animation. Le chara-design est celui du maître Takashi Takeuchi, faisant émaner le charisme des personnages par leur posture et leur apparence avant même que l'on les connaisse : rien à redire de ce côté-là. L'animation est prise en charge par le studio DEEN. Celui-ci n'a pas toujours brillé, l'adaptation de Fate/Stay Night en anime est plus que discutable. Cela dit, on ne peut pas nier son talent pour adapter les scènes de combat. Fluides, colorées et surtout dynamiques, elles en mettent plein la vue au spectateur pendant toute la durée du film. On ressent la puissance des chocs comme si on était présent au côtés des combattants. Les décors approchent aussi la perfection, si l'on définit celle-ci par ceux des oeuvres de SHINKAI. En effets, ils surpassent le déjà excellent travail mis en scène dans Kara no Kyoukai par un mélange de dessin sublime et de CG. Pour tout dire en peu de mots, on a le souffle coupé. Je n'oublie pas de mentionner l'OST, composée par Maître Kawai Kenji, comme dans le cas de l'anime. Cette fois-ci, le compositeur revient en force, nous présentant une bande-son qui correspond parfaitement à l'ambiance de l'anime, mais qui est également magnifique à écouter seule. Je commenderai de même l'excellente Tainaka Sachi qui s'occupe de l'Opening et de L'Ending, tous deux aussi mémorables l'un que l'autre. (Cela dit, c'est peut-être mon côté fanboy qui parle ici, pas tous apprécieront. Sachez tout du moins que c'est dans la lignée de l'opening de Fate/Stay Night, Disillusion). On voit en tout cas qu'ils n'ont pas lésiné sur le budget à mettre dans la forme.
C'est beau, la forme, l'apparence - mais vous ne marierez pas forcément une femme parce qu'elle est belle, n'est-ce pas ? (enfin, c'est discutable, ça). Venons-en au contenu, à la réalité de la chose. La vitesse du déroulement a déjà été commentée, je ne reviendrai pas dessus. Unlimited Blade Works nous présente un scénario réellement étoffé, autant au niveau des révélations faites sur l'univers et les personnages que sur l'intensité dramatique. Je serai incapable de dire si les secrets restent inviolés jusqu'à leur dévoilement, connaissant déjà l'intrigue avant le visionnage, mais ils me semblent bien jalousement gardés. Les retournements de situation sont imprévisibles, et il est tout bonnement impossible de deviner la fin avant de la voir de ses propres yeux. Ceci découle entre autres de la présence de plusieurs fins possibles dans le cas du VN, mais pas seulement. Nasu (l'écrivain sur scénario originel) aime bien faire souffrir ses personnages - je n'en dirai pas plus par crainte de spoiler (j'ai déjà remanié cette phrase six fois pour vous éviter de trop y penser, appréciez mes efforts). La direction que prend le scénario est aussi dure à prévoir due à la profondeur des personnages. La brochette offerte par le film compte dans ses rangs quelques-unes des figures les plus acclamées de la Japanimation (Archer est légendaire). On nous présente des caractères aussi bien atypiques (Saber, Archer) que plus stéréotypés (Rin, Shirou), mais tous sont réellement appréciables. On notera d'ailleurs un réel travail sur le character development. En effet, je souhaite souligner que la route Fate, adaptée dans l'anime, représentait 'l'enfance' de Shirou. Celui-ci était donc un gosse, un héros de shônen tout à fait détestable. Ici, ce trait de caractère-là ne s'applique qu'au début du scénario : UBW représente 'l'adolescence' de Shirou, et il perd une bonne partie de son côté insupportable au fur et à mesure que l'histoire avance. (Bonne nouvelle, n'est-ce pas ?). Cela dit, le développement du personnage peut être difficile à croire, vu que le film ne dure pas suffisamment de temps. Elle est beaucoup plus détaillée dans le Visual Novel, mais sachez et gardez en tête que le tout est cohérent (A part peut-être un seul et unique point que j'adorerais discuter avec vous ici, mais je fais le choix de ne pas vous pourrir le visionnage avec du spoil, remerciez-moi)
Je finirai par la fin, ne pouvant m'empêcher de vous conseiller d'écouter le générique en entier et de lire les phrases écrites après. Pour résumer, les contraintes de temps se font sentir, sur la vitesse de déroulement et parfois donnant un côté artificiel au scénario, mais étant données les contraintes, je trouve que la pari est plutôt bien réussi. Graphiquement et musicalement, il n'y a rien à redire, c'est d'une beauté incomparable. Le scénario originel de Nasu est très bien mené, et adapté de façon plutôt fidèle (à part la coupure de plusieurs scènes 'tranche de vie')
N.B : Ma note ne reflète pas ma critique (que j'ai essayé de rédiger de façon aussi objective que possible) mais plutôt mon ressenti personnel de fan de Type-Moon et lecteur du Visual Novel. Pensez donc à la tempérer un tant soit peu si vous n'avez pas eu l'honneur de le lire. Je ne le soulignerai jamais assez, avant de revoir cet anime, (re-)familiarisez-vous avec le contexte, vous serez perdu autrement, et risquez de vous fâcher avec la licence, ce qui serait fort dommage.
De plus, j'ai essayé de considérer le film séparément de son support - ne pas comparer ce que j'ai ressenti devant le VN et devant le film. Si je l'avais fait, sans doute que ma note aurait baissé un peu - le Visual Novel est transcendant, il faut le dire, surtout du côté émotionnel. Ce aspect-là a beaucoup de mal à être traduit dans un film de d'1h45.
En réalité, de ce point de vue là, ma doléance principale est que le studio aurait dû sortir deux (voir plus) OAV d'1h30, afin de bien respecter l'œuvre originelle. Ceci est bien sure une plainte inutile, puisque deux OAV aurait largement réduit le budget sur la forme de la réalisation, et il aurait été impossible de diffuser les deux au cinéma.
(Oui, vous avez bien compris, j'ai mis tout ce que j'avais oublié de dire dans un N.B. à la fin !)
So, As I Pray, Unlimited Blade Works !