Fort comme le roquefort

Ajin, c'est un bon frometon, avec la mauvaise haleine en moins. Le genre de truc que tu sors du frigo en te disant «bon, soit je tombe malade, soit je me régale».

Ici, vous allez vous éclater la panse les amis!

Je dois avouer avoir été sceptique en voyant le studio chargé de l'animation, Polygon Pictures, inconnu au bataillon.J'ai toujours tenu en horreur les graphismes 3D, et si je n'avais pas lu le manga dont il est issu, de vous à moi, je ne lui aurait pas laissé sa chance. Grossière erreur, puisque le travail qui a été fait est excellent, et j'ai passé un meilleur moment que celui apporté par l’œuvre originale. Maudit cerveau bourré de préjugés qui m'a failli faire rater quelque chose d'aussi bien réalisé!
Ne faites pas la même erreur que moi, les gens qui bossent derrière connaissent leur travail. Vous aurez tôt fait d'oublier que les graphismes ne sont pas ceux auxquels vous avez le droit habituellement.

Cet animé réussit à préserver le meilleur de son support d'origine, tout en ajoutant sa marque de fabrique.

Le rythme est haletant: les événements s'enchaînent, et vous avez intérêt à bien suivre! Car au niveau de la gestion du suspense, il est loin d'être un petit joueur en la matière.
L'art de montrer les choses sans les dévoiler, d'expliquer sans donner la solution, tout ceci est parfaitement maîtrisé. A aucun moment des raccourcis faciles ne seront utilisés: point de magicien qui sort de son chapeau magique une solution abracadabrante! Et l'équilibre entre les moments d'action, de développement de l'intrigue et des personnages, des révélations, est solide. Quand je parle d'action, c'est du lourd hein! On ne parle pas de guignols qui se balancent chacun leur tour des techniques issues de l'imagination de petits n'enfants: ici c'est la guerre, c'est le sang, c'est les morts, on ne se moque pas de vous!

Car oui, la chose la plus importante à saisir, c'est que vous, spectateurs, n'êtes pas pris pour des sardines. Une histoire est racontée, différents points de vue sont donnés, mais à aucun moment on ne vous oblige à rejoindre un banc plutôt qu'un autre: à vous de forger votre opinion. Rien n'est tout noir ni tout blanc, et les différents personnages sont emblématiques dans leur écriture de cette approche très nuancée. Incroyablement bien développés pour le peu d'épisodes existants, les protagonistes sont captivants, dans leurs raisonnements, leurs objectifs, et chacune de leur action aide à mieux cerner leur personnalité. Et oui, cela ne concerne pas que le personnage principal, c'est justement ceci qui permet de pouvoir adhérer à un parti plutôt qu'à un autre.

Si l'animé (pour cause de censure parfois) s'éloigne un peu du tissu de base, ce n'est jamais mal fait: au contraire, chaque ajout, chaque transformation est au minima de même qualité, et souvent même un cran au-dessus. Et cela montre que les petites cellules grises ont bien carburé afin de tout faire pour que le résultat final soit encore meilleur, pour magnifier ce qui a déjà été façonné.

L'univers présenté est sombre, violent, cruel parfois, mais sans rentrer dans l'excès: en soi, j'ai l'impression que la société est dans son ensemble retranscrite telle qu'elle est actuellement, avec une petite touche de fantastique en prime. Ce qui explique les couleurs souvent tristes qui sont arborées, l'animé est tout entier imprégné de cette idéologie. La musique n'est pas en retrait, et contribue avec honneur à peindre un tableau froid, mais juste de ce qu'est notre monde (en toute honnêteté, l'opening et l'ending sont par contre loin d'être géniaux).

En 13 épisodes, la boucle est bouclée, une histoire captivante vous aura été contée, et une seule question vous hantera l'esprit : à quand la suite?