Devenir un hispter n’est plus tellement à la mode ces derniers temps. Mais si vous souhaitez en devenir un, regarder Taiyou no ouji : Horus no daibouken (aka Horus) et ensuite déployer toutes vos louanges possibles, sous la forme de pavés avec un maximum de références obscures, est une bonne option.
En effet, Horus, réalisé par un certain Isao Takahata, est un film de Toei (1968) pauvrement reçu à sa sortie qui est longtemps resté dans les oubliettes puis peu à peu remis à l’honneur en tant que trésor méconnu et important pour l’historique des débuts de grandes figures Ghibli (oui Miyazaki a aussi travaillé dessus en tant qu’animateur).
L’histoire de Horus se déroule dans un monde fictif nordique, scandinave pour être plus précis (à défaut de la culture Aïnu que Takahata souhaitait au départ), et nous suivons le jeune Horus (ou plutôt Hols), protagoniste habité d’un courage sans faille et d’une force peu commune. Le père de Hols est un pariah, qui sur son lit de mort demande à son fils de rejoindre la société des Hommes et d’aider celle-ci à vaincre les forces du mal qui souhaitent sa destruction. Hols bien sûr se lance sans hésitation dans un périple dangereux et devient un héros local en terrassant un monstre marin, puis pêcho une jeune villageoise du doux nom de Hilda. Mais malgré ses exploits, l’ennemi ne fait que se renforcer et notre héros va devoir affronter des maux terribles et subreptices s’il veut que sa communauté survive.
Ce synopsis serait excitant s’il n’était pas aussi basique. Dans le domaine de la japanimation, où la plupart des oeuvres sont avant tout créées par des animateurs voulant donner vie à des images sans forcément se soucier du scénario derrière, on pourrait justement s’attendre à un peu plus de la part de Takahata qui lui est un conteur. Cela dit, si l’histoire n’a rien d’exceptionnelle, on sent tout de même que ça cogitait dans le cerveau du réalisateur, avec une envie de profondeur qui se manifeste ici sous la forme d’un personnage : Hilda. Cette petiote concentre en elle toute l’originalité de l’oeuvre, en étant une figure tragique fort mystérieuse, nuancée, qui va dresser un parallèle relativement subtil avec le protagoniste Hols. Cela dit, elle reste une gemme imparfaite, dont le rôle, qui devient soudainement central, n’est pas toujours adroitement amené, et laisse des moments de flottement au milieu du film qui nous poussent à nous demander où il veut en venir.
A côté de ces balbutiements narratifs, on retrouve une atmosphère viking et un sentiment d’aventure plus solidement réussis, et qui ont de quoi donner une chiquenaude à notre coeur d’enfant rêvasseur, instillant ainsi l’envie de suivre ce long-métrage jusqu’à sa dernière minute malgré quelques longueurs. Horus a la particularité d’être la première réalisation de Takahata mais on retrouve déjà son sens du détail, nécessaire pour la création d’un univers imaginaire peut-être pas envoûtant mais convaincant tout de même.
En revanche, ce dernier est aussi connu pour la gestion calamiteuse de ses projets en terme de délais, et Horus en est déjà une victime. La conséquence directe pour le spectateur est ressentie dans l’animation, non seulement limitée par moments mais même à l’arrêt parfois avec quelques scènes de batailles en mode diaporama. Quand on a l’habitude de la fluidité de ses prédécesseurs Toei, c’est assez décevant il faut bien le dire.
Ces complications et le faible succès de l’oeuvre mèneront à la ‘rétrogradation’ de Takahata, qui devra attendre 6 ans, avec Heidi, pour mener à nouveau des projets en entier. Il faut dire la direction Toei voyait apparemment d’un mauvais oeil le groupe qui s’était constitué autour de Horus : jeune et militant pour de meilleures conditions de travail au sein de leur compagnie. L’histoire détaillée du projet dépasse les intentions de mon compte-rendu mais elle demeure fort intéressante et a été sans aucun doute une expérience spéciale pour ses acteurs, qui pour la plupart reviendront par la suite vers Takahata pour l’un ou l’autre WMT.
Horus est une oeuvre significative pour les figures Miyazaki/Takahata, et d’une certaine manière elle va influencer les grands principes du futur studio Ghibli. La valeur du film en lui-même est en revanche bien plus nuancée : ambitieuse, créative, mais très imparfaite. Parmi les longs-métrages de l’ancienne ère Toei, je pense finalement lui préférer Wanapaku, mais Horus reste un choix qui peut encore valoir le détour.