Critique de l'anime The Garden of Sinners (Film 5)

» par Kyoshi le
20 Juillet 2011
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Vous aurez ici droit à des élucubrations d'un fanboy surexcité qui vient de revoir l'intégrale des films juste avant de commencer à écrire. Les sages comprendront que tout semblant d'objectivité n'est qu'un piège grossier. Les gentils diront : "ce n'est pas sa faute, il a le cerveau grillé". Les cyniques râleront (comme d'habitude), et les idiots ne liront pas (A vous de voir si la réciproque est vraie ou non.). J'en profite d'ailleurs pour (essayer de) jurer qu'il n'y aura pas de spoil. De toute façon, il n'y a pas grand chose à spoiler.

"Il y a trois conditions pour effrayer quelqu'un, Araya. Les connais-tu ?"

La nature même de ce film est d'être difficile à comprendre. Je l'avais déjà écrit quelque part, il me semble, mais il est important de noter que quand on regarde (en détail ou non) les Rakkyo, c'est toujours bon de regarder le titre du film. Il y aura toujours des gens pour écrire une histoire sur des pauvres jeunes gens qui invoquent des esprits pour qu'ils se tapent entre eux et l'appeler Fate/Stay Night (LE titre qui veut rien dire) ; mais ici le titre sert à quelque chose (shhht, faut pas dire que c'est la même personne qui a écrit les deux). Donc, le film s'appelle Mujun Rasen. Tout esprit curieux, intelligent et je ne sais quoi encore saurait que ça veut dire Spirale Contradictoire, Spirale Paradoxale ou comme les anglais l'ont traduit : Paradox Spiral (je trouve que ça fait un peu plus classe comme ça, en fait). Il y a deux mots dans ce titre, et ils se sont arrangés pour les deux fassent peur. Un paradoxe ? Y'a rien de plus horrible. Non, mais je vous jure ! Par définition, c'est "un fait, une chose incompréhensible, qui choque le bon sens" (c'est le dico qui l'a dit !). Vous comprenez maintenant, pourquoi il est dur à comprendre ce film. C'est comme si les réalisateurs s'étaient dit : venez, on va faire un truc incompréhensible, et on va l'appeler..."quelque chose d'incompréhensible" ! Au point ou on en est, il y a déjà de quoi vouloir se pendre, ou tout du moins hurler ZETSUBOU SHITAAAA avant de se jeter par la fenêtre. Par-dessus le marché, on nous rajoute une spirale. L'auteur de l'oeuvre originelle avait clairement décidé de créer quelque chose de vraiment horrible, et de lui donner le titre qui lui allait bien. Évidemment, personne a décidé de le changer. Et c'est normal : c'est stylé, "Paradox Spiral" ! Ça nous aide pas vraiment à comprendre sur quoi sera le film, mais c'est stylé ! Non, mais honnêtement, prenez une pause est essayez de visualiser ce qu'est une Spirale Contradictoire. Du coup, j'ai vraiment envie de dire qu'en fait, l'œuvre est l'illustration du titre et pas l'inverse. Quand vous regarderez ce film, et quand vous lisez ce titre, c'est pareil : on trouve ça joli, mais on a rien compris. La seule différence est que le film est un film, et donc a beaucoup plus de contenu que deux mots (ce n'est pas toujours le cas, mais là, croyez moi, ce l'est). Du coup, le film a l'avantage d'être très, très, très joli mais très, très, très dur à comprendre. Enfin, par "joli", entendez que je parle à la fois des personnages, des décors, de l'animation, de la musique, et de la direction artistique en général...mais j'y reviendrai.

Tout dans ce film sert en partie à désorienter le spectateur. D'abord, il n'est pas linéaire : il ne se passe pas dans un ordre strictement chronologique. Cependant, il n'est pas complètement non-chronologique non plus. On avance, on retourne en arrière, on refait un saut de quelques jours, on revient au point de départ, et ce plusieurs fois - mais de manière générale, on avance. Par cela, je veux dire qu'on commence au début et qu'on finit à la fin (c'est déjà ça, vous me direz). Il est aussi intéressant de noter qu'il se passe à deux endroits en même temps. On suit d'un côté l'histoire de Shiki et Enjô, et de l'autre celle de Mikiya et Touko, jusqu'à ce que tout ce rejoigne vers la fin. En fait, on peut, je pense, découper le film en trois parties (chronologiques !), la première celle avec les deux premiers protagonistes, la deuxième avec les deux autres, et la dernière qui mélange un peu tout, pour la résolution. Évidemment, ce n'est pas aussi clair, mais c'est une tendance assez marquée. Le résultat général est qu'on peut passer d'une scène avec Mikiya et Touko qui se passe à la fin du scénario (mais au début du film) à une scène avec par exemple Enjou et Shiki qui se passe au début du scénario (et aussi au début du film) sans que les réalisateurs aient le moindre remord. Vous l'aurez donc compris : on a presque le droit à deux histoires parallèles. Cela donne un très gros potentiel à l'oeuvre, parce que le spectateur devient le lien entre les deux histoires, et c'est à lui de les rapiécer. En plus, ça permet des passages très sympathiques où on voit plusieurs protagonistes au même endroit, sans qu'ils interagissent. Par dessus tout ça, certains scènes et "mouvement clés" (quelqu'un qui ouvre une porte, par exemple (ho le jeu de mot !)) sont répétées plusieurs fois d'affilée, et ça arrive à de nombreuses reprises, en déclinaisons diverses. Ça contribue énormément à cette impression de désordre qui imprègne le film sur sa longueur. Enfin, certains dialogues eux-mêmes sont relativement difficiles à comprendre, mais j'y reviendrai plus tard. En tout cas, la chose à retenir ici est : le spectateur n'est pas pris pour un idiot.

"Un : Le monstre ne doit pas parler."

Par contre, je pense qu'il est important de noter deux choses. D'une part, cette confusion est nécessaire et est extrêmement liée avec le contenu du film. Ce n'est pas une décision prise sur un coup de tête pour rendre l'œuvre "originale" (comme on pourrait considérer les épisodes de Haruhi, par exemple). L'invité spécial de cet opus est Enjou Tomoe, et c'est un personnage perdu, en confusion totale, de par son passé et sa condition actuelle. Son identité, ses origines et même ses actes sont remis en cause. La perte de repères du spectateur reflète très fortement ce que ressent ce personnage, et là est la première grosses réussite du film. Il force l'identification avec le personnage non à travers des moyens plus classiques (cas des protagonistes des séries harem et de manière similaire, de l'effacement du personnage principal dans les eroge), mais grâce à une plongée dans une condition similaire. Pas tout le monde aurait tendance à apprécier ce personnages relativement classique, aux airs parfois de gamin inutile, parfois de héros de shônen. Cependant, le film est construit de telle façon à ce qu'il prenne une importance particulière. De la même façon que Asagami est la grande représentante du 3e opus, Enjou est à l'honneur dans le 5e film. L'autre point que je voulais soulever, est que le film est entièrement cohérent. La complexité ne vient pas d'un manque, et ne sert pas à cacher un scénario incomplet ou faiblard. En effet, un personnage énonce lui-même la plus grosses contradiction de l'oeuvre, avec la phrase "j'aurais aimé que cette spirale soit contradictoire". Le film est certes une spirale, dans le sens où il n'est absolument pas linéaire et vraiment tordu, MAIS il n'est absolument pas contradictoire. Un autre à très bien exprimé ça en le comparant à une vis : il est tordu, mais il va quelque part. En le regardant bien, tout est en place. Certes, tout comprendre au premier visionnage est presque impossible, à moins de faire des arrêts sur image toutes les deux minutes et essayer de tout arranger dans sa tête. Mais indéniablement, au deuxième on comprend presque tout, et un troisième le consolide entièrement. C'est là la vraie richesse de cet opus : on peut le regarder autant de fois que l'on veut, on découvrira toujours un détail de plus ou un lien entre deux évènements qu'on avait pas remarqué précédemment. Personnellement, j'en suis à 8 visionnages et ça me plaît toujours autant (après, je ne suis pas vraiment le meilleur exemple, et au point où j'en suis, je ne regarde plus vraiment le scénario). Cela dit, il reste encore une réplique que je n'ai pas vraiment saisi...

L'intrication du scénario n'est pas le seul facteur qui fait de ce film celui dont je me lasse le moins parmi les Kara no Kyoukai, et je me dois de parler d'un autre des centres d'intérêt du film. Il intéressera sûrement moins de personnes, d'autant plus qu'on pourrait le critique d'un point de vu de son intérêt. Je pense à la complexité du contenu lui-même, notamment de certains dialogues. L'intrigue est centrée autour des notions du Taijitsu, c'est à dire le concept représenté par le joli dessin du yin et du yang entremêlés (que tout le monde connaît), du Tourbillon de l'Origine et des Akashic Records (propres au Nasuverse). Cela donne lieu à des discussions relativement longues et dures à comprendre sur le Taijitsu et son rapport avec les autres concepts. Pour la grande majorité des gens, ça n'a pas grand intérêt, et c'est plus chiant qu'autre chose. Après, n'oublions pas tout de même qu'on est dans Kara no Kyoukai, et que les discussions pseudo-philosophiques, il y en a dans tous les opus, et que le 5e est possiblement un de ceux qui les évite le plus. En effet, ces discussions sont largement remplacées par des précisions et des infos pures sur le Nasuverse, qui sont d'un très grand intérêt pour quelqu'un avec le cerveau frit par Type-Moon comme moi. La bonne chose, c'est que pour tous les autres, ce n'est pas d'une importance énorme et ne pas connaître le Nasuverse nuit aucunement à la compréhension du scénario. Accessoirement, il y a énormément de détails, comme notamment le plan du fameux bâtiment, ainsi que sa visite qui se passent très rapidement, et qui nécessitent un revisionnage pour tout comprendre. Là, rien de philosophique ni de Nasuversien, mais ça donne une profondeur supplémentaire, et plein de petits trucs agréables à découvrir et à redécouvrir. En fait, j'ai presque envie de dire que ce film est comme un bon jeu vidéo : même quand on a fini la quête principale, il reste encore plein d'aspects sur lesquels se pencher. Tout ça pour dire que le film a plusieurs niveaux de compréhension (Pas d'interprétation, attention ! Il n'y a rien à interpréter ici, pas de message ni rien. Sit back and enjoy the fireworks !) ce qui implique évidemment une profondeur très sympathique. Ne me faites pas me répéter, et dire que c'est encore un des gros points forts de l'œuvre.

Je voudrais aussi noter que la thématique du Taijitsu, bien que débarquant d'on sait pas trop où vers le milieu du film, est au final plutôt bien utilisée, puisque essentiellement elle contribue énormément à la cohérence interne du film (qui est relativement coupé et segmenté, puisqu'il montre deux histoires parallèles). De même, tout ce qui entoure les magi est présenté de manière claire et concise, ce qui permet en fait au spectateur lambda d'appréhender un bon bout de Nasuverse sans difficulté. C'est essentiellement pour ce film que j'aurais tendance à proposer Kara no Kyoukai comme un point d'entrée pour le Nasuverse, en fait (mais ça, c'est mon avis personnel). En gros, les discussions sont complexes mais pas inutiles (comme, si on veut, dans le premier film...).

"Deux. Le monstre ne doit pas être identifié"

Très clairement, le cinquième Rakkyo se démarque des autres, aussi bien dans la réalisation que dans l'ambiance générale. En effet, alors que la plupart des opus ont une stance assez contemplative (et si ce n'est pas le cas, bénéficient d'un travail énorme pour créer une ambiance pensante), celui-ci est beaucoup plus dynamique. Le scénario est beaucoup plus fourni que dans les autres, puisqu'on suit deux histoires parallèles condensées en un film, qui finissent par se rejoindre. Ainsi, ça bouge, il y a des rencontres et des révélations, et surtout plus de scènes d'action que ce à quoi on nous a habitué. Sur la forme, alors que les tons froids ont été privilégiés jusque là, ici on a beaucoup de tons plus chauds. Cet opus est le seul à être rouge-orangé dans mon esprit, comparé aux autres qui sont bleus-verts. Ceci vient du fait qu'on passe la majorité du temps à l'intérieur d'un bâtiment, qui isole les personnages du monde extérieur. Cette barrière est d'ailleurs symbolisée par une opposition permanente dans les jeux de lumière (bleu pour l'extérieur, orange pour l'intérieur). Les décors sont moins impressionnants que d'habitude, mais ont un côté irréel qui renforce l'impression donnée par le fameux bâtiment. On en tirera le fait que comme d'habitude (Dans Rakkyo), la forme travaille pour le contenu (au passage, je sais que la distinction forme/fond est quelque chose qui mérite d'être débattu, mais on va l'admettre, hein.) et ici, ça implique peut-être moins de prouesse technique pure. Cela dit, il ne faut pas pousser mémé dans les orties (!), et c'est quand même tout à fait superbe. L'animation est absolument magnifique, et donne un réel dynamisme aux combats. Un aspect que j'ai particulièrement apprécié est le travail apporté au mouvement de la caméra. Parfois, on visionnera un passage à l'envers, parfois on aura des vues à la première personne, et cela contribue tantôt à l'esprit de confusion, tantôt au dynamisme d'une scène de manière délicieusement pertinente. Il y a vraiment une impression de mouvement perpétuel lors des combats, et on ressent la puissance de coups. Honnêtement, c'est difficile d'en demander plus. Pour ce qui est de la bande-son, elle est très sympathique, mais je dois avouer qu'elle se fait plus discrète que dans le premier ou le dernier opus, par exemple. Elle illustre magnifiquement la fin du film, mais jusque là elle est peut-être moins remarquable.

Au passage, pour continuer de supporter le fait que même si Mujun Rasen se démarque un peu, il conserve toujours les repères de la série, je me dois de souligner qu'on est toujours pas arrivés aux pays des bisounours. Comme tous les autres, cet opus est excessivement morbide (on a même le droit aux asticots !), et y'aura plein de cadavres, de choses dans du formol, et de trucs découpés. D'ailleurs, on dirait qu'un soin tout particulier a été donné aux passages gore et/ou choquants, puisque d'une part ils ont tendance à revenir, mais surtout que chaque détail est retransmis. Je ne m'étendrai pas plus, mais j'avoue que c'est assez joliment horrible sur quelques plans.

"Trois. Si le monstre n'est pas immortel, il n'a aucune raison d'être."

Euh...j'ai écrit tout ça et je n'ai pas encore parlé de Shiki ? J'arrive pas à le croire. J'ai presque honte, en fait. Cela dit, je vous ferai grâce d'une répétition de ce que j'ai dit dans ma critique du 3e opus. Le truc à retenir, dans ce film, c'est qu'il est bourré de Shiki-service. Si ça c'est pas une bonne raison d'aller le voir, je me demande ce qu'il vous faut. Attention, ce n'est pas du fanservice grossier. On a le droit à plusieurs scènes de combat superbes, et à des passages "tranche de vie" très appréciables (puisque rares dans KnK.). Cependant, Shiki n'est pas vraiment le highlight de ce film. Ici, c'est surtout Touko qui est à l'honneur, puisqu'elle se battra à plusieurs reprises, et n'oublions pas que c'est quand même le personnage le plus expérimenté de la série. Elle fait un peu figure de sensei, si on veut. Et ne me dites pas que vous n'aimez pas ça quand le sensei montre enfin ce qu'il sait faire, dans une série. Ne me dites pas que vous n'aviez pas les yeux qui pétillaient quand Tortue Géniale balance son premier Kaméhaméha, ou quand Kakashi se bat pour la première fois. C'est simple, Touko a un charisme monstre. Elle est franchement géniale. En fait, plus je regarde le film, plus je me dis que chacune de ses répliques constitue une citation à part entière. Vous m'excuserez, je passe sur Enjou Tomoe, parce que même si sa crise d'identité est bien mise en scène, il est relativement classique et pas vraiment le personnage le plus charismatique de l'œuvre. Du côté des antagonistes, c'est plutôt bien fourni aussi. Araya est le type classique doublé par Jouji Nakata : le méchant stable, impressionnant et toujours en contrôle. Il est relativement stéréotypé, mais il a quelques répliques très sympathiques. On accroche, ou on accroche pas. Cornelius est lui aussi déjà vu, MAIS (et c'est un gros mais, vous l'aurez vu) en utilisant le côté gore des films, ils est très, très bien rendu. C'est un vrai fou. Pas le petit fou qui déraille un peu en criant "HahAHaHAhAAHA" à tout va, mais le type violent et malsain qui inspire tout sauf de la pitié.

Pour ceux qui ont la flemme de lire, retenez que Mujun Rasen est un des meilleurs de la série des Kara no Kyoukai, notamment parce que c'est l'opus qui bénéficier du scénario et du schéma narratif le plus soigné. Personnellement, je le regarderai nombre de fois rien que pour le Shiki/Touko-Service et le blabla inutile sur le Nasuverse, mais mettez ça sur le compte de mon cerveau grillé.

Verdict :10/10
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A propos de l'auteur

Kyoshi, inscrit depuis le 17/05/2010.
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