Karas, l’art même de rater la moitié d’une histoire.
Je dois avouer être parti dans l’histoire de Karas avec certaines espérances. Critiques plus ou moins sur la même longueur d’onde, des défauts soulevés mais une série d’OAV quand même fort conseillable, mon avis n’est pas sensiblement différent des autres bien qu’il en ressortira une certaine amertume la faute à un scénario malmené au beau milieu du format.
Tout commence de manière fort mystérieuse. Des meurtres étranges, déroutants, humainement infaisables de par leur violence et l’état des victimes, submergent une ville rongée par la corruption, la haine et tous les vices propres à l’homme. En parallèle, deux « organisations » semblent se faire la guerre via des guerriers armés de sabres, se transformant en avion et prenant la pause façon Jhon Woo. A la fin du premier OAV en ressort une incompréhension totale de la situation mais aussi et surtout une envie irrésistible de poursuivre l’aventure.
Et pour cause, Karas bénéficie d’une ambiance sans pareille. Noire, sale, cette ville n’inspire clairement pas l’envie d’y résider. Dans les bas-fonds c’est la mafia qui dicte sa loi à grands coups de règlements de compte façon sicilienne. On ne voit tout au long des 6 épisodes quasiment jamais le jour, à croire que tout s’y passe la nuit. A mi-chemin entre Gotham City et la métropolis de GitS, tout ce qui touche aux environnements est un pur petit bijou d’immersion. D’autant que la réalisation graphique se révèle être à la hauteur. Les décors sont d’une minutie d’une précision qui forcent le respect.
Ajoutons à cette excellente ambiance une batterie de personnages pour le moins intéressants. Qui est cet homme qui incarne « Karas » ? On en saura un peu plus par la suite et son histoire personnelle fait de lui un protagoniste auquel on s’attache sans s’identifier. Les policiers de la section Monstres eux incarnent le côté sympathique, drôle et parfois même touchant que l’on est en droit d’attendre de la part de toute série. On comprend les raisons de l’obstination de Sagisawa, la déconfiture du jeune flic qui se demande bien ce qu’il fait aux côtés d’un vieux un peu fou et qui va finalement s’intéresser un peu plus à ces légendes urbaines pour prendre conscience que tout n’est pas toujours scientifiquement explicable. Nue lui est l’archétype réussi du personnage cool dont on devine aisément le destin. Le reste des personnages secondaires jouent tous très bien leurs rôles, pas trop nombreux, ils apportent différentes émotions et c’est là le principal. Gros bémol en revanche pour le « grand méchant » de l’histoire qui lui est un mix de plusieurs stéréotypes agaçants et dont on n’apprend presque rien en 6 épisodes.
Et c’est là qu’interviennent les défauts. Karas est une série qui ne va pas au fond des choses, qui n’expliquent pas beaucoup de choses et dont sort ce cruel goût d’inachevé. D’où viennent les démons ? Pourquoi ont-ils des formes humaines ? Quelle est cette maison dorée où repose Karas ? Qui commande les Yurine et Karas ? Quel élément déclencheur a poussé notre méchant à agir ainsi ? Les questions s’accumulent tout au long des épisodes et peu trouvent une réponse. Les scénaristes semblent avoir délaissé tous les petits à côtés qui faisaient le charme du début. Exit les meurtres et l’enquête, exit les flash-back informateurs, on mise tout sur l’action et le combat bien gorgeous.
Du coup toute la seconde partie n’est que succession de combats avec quelques scènes convenues, déjà vues même, mais dont on ne peut retirer une certaine qualité de mise en scène (cf épisode 6). Quitte à se lancer corps et âme dans les rixes endiablées, il faut pour cela une animation hors pair… Et là, c’est le drame. Voilà encore un exemple qui ne vient pas déroger à la règle énonçant que la 3D, pour l’animation japonaise, c’est le maaal. Appleseed, Amuri, Berserk plus récemment sont autant de cafouillages visuels imputables au choix de la 3D. Ben pour Karas c’est pareil. Terrible coup de vieux, les joutes armées, si elles sont bien chorégraphiées, piquent violemment les yeux, le tout manque de précision, l’intégration de personnages 3D dans des décors 2D est immonde, ça bave. Bref c’est pas du joli, et c’est encore plus dommage que ceux qui ont bossé sur les décors ont fourni un travail sans faille.
Tout comme les personnes chargées du sons qui ont su fournir à la fois des doubleurs convaincants, des bruitages assurant l’immersion et surtout une bande-son génialissime qui vous fout des frissons aux meilleurs moments.
En bref, Karas est une série avec ses défauts et ses points forts. Ca commence très bien et puis d’un coup on décide de nous balancer ce qu’il reste de l’histoire pour empiler de l’animation abrutissante où on se tape sur la gueule pendant une heure avec quelques coupures bienvenues par-ci par-là. C’est dommage et c’est ce qui empêchera ma note de décoller.