Utiliser le thème de la réalité virtuelle et le rapport aux jeux vidéos ou au monde communautaire virtuel ne date pas d'hier. L'anime de 1998 "Serial Experimental Lain" traitait déjà le sujet avec brio en ciblant un public plutôt adulte et en étant conçu pour nous mettre en garde contre le dessus que peut prendre le virtuel sur le réel dans notre vie. En 2002, le light-novel "NHK ni yōkoso!" sort en nous proposant une intrigue ayant les mêmes fins mais en utilisant des procédés narratifs différents. Un anime sortira quatre ans plus tard sous la tutelle du studio Gonzo.
En 2009, l'auteur Reki Kawahara sortira en même temps deux light-novel traitant à nouveau de la réalité virtuelle qui seront adaptés en anime en 2012 par Sunrise et A1-Picture: "Accel World" et "Sword Art Online". Inutile de rappeler le boom que le second a entraîné, déferlant sur la pop-culture japonaise en créant presque un genre à part entière. Que vous ayez aimés ou non, il est indéniable que ces deux œuvres ont rassemblé une fan-base impressionnante et on changé le paysage du manga d'aujourd'hui en créant un engouement massif et un phénomène de mode.
Ainsi, on a pu voire naître un grand nombre d'animes traitant également du jeu vidéo depuis ces animes (Log Horizon, Overworld, Danjon ni Deai wo Motomeru no ha Machigatteiru Darō ka? ...). L'anime dont nous allons parler s'inscrit également dans cette vague: "No Game No Life".
Créé par Yū Kamiya sous la forme d'un light-novel en 2012 et toujours en cours, "No Game No Life" sera adapté en anime par Madhouse, géant de l'animation n'ayant plus à faire ses preuves et à qui on doit des œuvres majeures (Death Note, Paranoïa Agent, Hunter x Hunter 2011...). La réalisation sera confiée à Atsuko Ishizuka (Supernatural) et le scénario à Jukki Hanada (Rozen Maiden, Sola).
Déjà ça partait mal. En effet, la filmographie de ces deux personnes est assez peu conséquente et le scénariste a comme œuvres majeures deux animes franchement moyens. On ressent presque l'envie assumée de faire du marketing au détriment de l'oeuvre.
L'histoire de "No Game No Life" part toutefois d'une idée brillante. Un monde uniquement régit par des règles ludique dont les litiges se règlent au jeu est un postulat de base finalement original et qui fonctionne bien. Il sera d'ailleurs très cohérent dans les moments importants de l'anime, même s'ils seront malheureusement brisés lorsque cet anime tentera de faire de l'humour. Il s'agit toutefois d'une maladresse peu dérangeante au final.
L'anime part malheureusement sur un faux rythme. Le début est difficile à suivre et le second épisode est assez indigeste, mais la suite s'améliore et se suit finalement assez bien.
L'animation dans l'ensemble est assez propre. Plutôt fluide, d'autant plus soignée dans les phases de jeu qui sont les plus intéressantes de l'anime, mais souffrant parfois de facilités. Les musiques en revanche sont oubliable à l'exception de l'opening qui est plutôt sympa.
Les deux protagonistes, deux frère et sœur sans vie dotés d'une intelligence surhumaine et imbattables au jeu ont vaincu un dieu aux échecs depuis notre monde et seront aspirés dans le monde ludique afin d'en prendre le contrôle. Ce scénario permet la naissance d'un personnage brillamment construit: Sola. Ce personnage est génial. Un machiavélisme à tout épreuve, fourbe, manipulateur, testeur, on ne doute pas une seconde qu'il soit imbattable quelque-soit le jeu. Il fait parfois penser à un Lelouch de Code Geass en version pervers.
Malheureusement, il s'agit du seul personnage travaillé de l'anime. Les autres sont désespérément plats et sans saveur, réduits au simple état de faire valoir ou de marchandise moe-kawai.
Vous l'aurez compris, cette série est un gros coup de marketing. Le fan-service est omniprésent, on y trouve de très nombreuses références. L'anime est parsemé de passages ecchi qui n'ajoutent rien à l'intrigue et rongent du temps à la série qui aurait pu aller beaucoup plus loin et éviter sa fin en queue de poisson avec un gros "à suivre" sous-entendu. Sans oublier que l'humour associé à ces passages est vraiment sans saveur. Culottes, femmes nues sans tétons, jouissances, c'est trop gros et ça ne passe pas. La gestion du dosage est importante messieurs les scénaristes.
De plus, comme évoqué plus haut, l'anime se rattache trop à son époque. Sorti au bon moment, exploitant une vague qui marche, il en fait souvent trop dans son envie de vendre du rêve aux gamers en oubliant les autres publics. Même un gamer peut trouver que c'est trop.
Cependant, cette série dispose aussi de plusieurs qualités indéniables en terme de fond. Le titre de l'anime "No Game No Life" est à inverser: "Life is a Game". Les enjeux diplômatiques plutôt bien gérés ici et la conquête de Sora et sa sœur sur le monde se trace comme une partie d'échec et bien que ce passant dans un monde virtuel en utilisant des jeux comme moyen de régler les différents, les techniques utilisées sont très proches d'un vrai plan de bataille. Jeu d'alliance, trahisons, fourberies, espionnages, anticipations...
De plus, les phases de jeux de cet anime sont vraiment irréprochables. Il s'agit réellement des moments les plus prenant de l'anime et permettent de le suivre malgré les facilités scénaristiques qui peuvent rebuter.
De plus, on sent que la série réussit par son ambiance à retranscrire le côté ludique de ce monde. L'humour, bien qu'un peu lourd, prédomine sur l'action, rendant les scènes de guerres beaucoup plus légères, alimentant dans le bon sens le manque d'enjeu réel de ces conflits. Après tout, la dixième règle de ce monde stipule que l'on doit s'amuser tous ensemble, et c'est ce que nos personnages font.
En conclusion, "No Game No Life" n'est pas un mauvais anime et dispose de nombreux atouts, mais sa facilité de réalisation, son manque d'âme et son envie flagrante de faire du marketing ruine ces qualités et rendent certains passages bien lourds. On peut dire que ce ecchi n'entrera pas dans les anales (c'est dégueulasse, désolé).
No Game No Life: 11.5/20