Il y a un peu plus de deux ans, le monde de l’animation japonaise fut secoué par un attentat dont l’horreur résonne encore aujourd’hui dans l’esprit de tous. L’immondice Aldnoah/Zero, un des pires animes de tous les temps, a violé l’innocence de ses spectateurs, piétiné jusqu’aux fondements même de la dignité humaine, révélant « le Mal absolu » pour reprendre le mot de ce cher Donald. Les hôpitaux sont encore remplis de personnes dont l’esprit a été brisé par tant d’infamie, leurs nuits secouées par de terrifiants cauchemars, incapables d’oublier ce qu’ils avaient vu.
Et lorsqu’un nouvel anime fut annoncé par la même équipe – le réalisateur Ei Aoki, le studio Troyca et le compositeur Hiroyukiki Sawanul, ma réaction fut celle d’un enfant que sa mère emmène chez le dentiste après l’école sans l’avoir prévenu le matin avant de partir. Imaginez mon visage rougi par la haine et la colère, les yeux remplis de larmes, les traits tirés par la rage. Le simple fait que ces gens-là aient pu réaliser un autre anime après leur précédent méfait relève de l’erreur judiciaire, le bon sens aurait voulu qu’ils soient arrêtés et mis hors d’état de nuire par tous les moyens.
Re:Creators se déroule de nos jours à Tokyo, et suit le parcours de Sôta Mizushino, un ado japonais qui tente de percer dans le milieu de l’illustration en postant des dessins sur Internet. Un jour, il reçoit une visite étonnante ; l’héroïne de son light novel préféré, Selesia Upitiria, s’est matérialisée dans le monde réel avec tous ses pouvoirs. Très vite, d’autres personnages de fiction issus des mangas, animes et autres LN les plus populaires du moment débarquent dans la ville, et commencent à se mettre sur la gueule. Au milieu de ce bordel, le gouvernement japonais décide de réunir les personnes qui sont les auteurs de ces personnages pour tenter de comprendre leurs pouvoirs et de les contrôler.
Des personnages fictionnels qui débarquent au Japon contemporain, qui sont liés à un humain à qui ils doivent leurs pouvoirs et s’affrontent les uns contre les autres sans que la population ne soit au courant. Cela ne vous rappelle rien ? Si vous me répondez Fate/Zero, je vous adresse mes félicitations ; vous êtes aussi peu original et peu inventif que Ei Aoki, qui n’a rien trouvé de mieux que de plagier sa propre série pour lancer son nouveau projet. De la part du mec qui a éhontément plagié Gundam et Code Geass dans Aldnoah/Zero, avec le concours du plagiaire en chef Urobuchi, j’ai comme l’impression que l’on a affaire à une bande de faussaires et de copieurs récidivistes, le genre de mecs qui piquaient leurs devoirs sur Oboulo.com et qui copient des synopsis d'animes de la base de données de chez Nautiljon avant d'essayer de les foutre sur Anime-Kun en faisant croire que c'est eux qui les écrivent.
Cela dit, Re:Creators a un peu plus d’ambition que Fate et Aldnoah puisque cette fois l’anime a un propos : le rapport entre le créateur et sa création. Comment doit se comporter un personnage de fiction qui rencontre la personne qui l’a créé ? Doit-elle le considérer comme un dieu, ou au contraire le responsable de tous ses malheurs ? Et si le Créateur a inventé son personnage pour de mauvaises raisons, pour le sexualiser par exemple ? Qu’en est-il du personnage qui a subi des drames horribles dans son histoire, doit-il rendre le Créateur responsable ? Et si le Créateur a inventé un personnage malsain et violent, peut-il quand même s’y attacher une fois que ce personnage est devenu réel ?
Tant de sujets intéressants que l’anime ne traite pratiquement pas, en dehors de quelques scènes qui ne servent généralement qu’à installer du drame ou de la comédie. D’après la rumeur, le projet original du studio était de créer un anime crossover où les Créations qui apparaissent dans le monde réel seraient de vrais personnages sous licence : genre Shinji de Evangelion, Madoka de Puella Magi ou encore Saber de Fate par exemple. Mais Aniplex n’a pas obtenu les droits de ces licences et a été obligé d’inventer ses propres héros, ce qui rend tout de suite le truc beaucoup moins intéressant. Au lieu de Shinji on a Kanoya, au lieu de Madoka on a Mamika, et au lieu de Saber on a Alicetaria. Lorsque l’on comprend que tous les personnages ne sont que des contrefaçons de héros connus, le bazar perd tout de suite beaucoup d’intérêt. Même dans Fate/Zero on pouvait s’intéresser un minimum au truc puisque les Servants, inspirés de personnages mythiques, avait un certain charisme. Re:Creators n’a même pas ça pour lui, ces personnages censés être populaires ne ressemblent à rien (ou plutôt, ils ressemblent à tout), et on s’en bat juste complètement les couilles.
L’autre défaut de cette série c’est la mise en scène soporifique, qui explique largement pourquoi la plupart des spectateurs, ceux-là même qui suçaient la bite de Ei Aoki à l’époque de Fate et Aldnoah, ont lâché l’affaire au bout de trois épisodes. Quelle que soit la situation, les personnages ne font parler, parler et encore parler comme si l’intrigue était compliquée à suivre, ce qu’elle n’est pas. En gros l’idée c’est que l’apparition des Créations a bouleversé le continuum espace-temps ou je ne sais quelle connerie et que c’est pas bien. Et comme il y a une des Créations qui est méchante et qui veut détruire l’univers à cause d’une histoire de harcèlement virtuel sur Pixiv (???), il faut l’en empêcher. Je vous laisse découvrir si les gentils gagnent à la fin et évitent la destruction de l’univers, mais vous ne devriez pas avoir trop de mal à deviner la réponse.
En tant que plagiat de Fate, l’anime se doit d’avoir des combats, mais les designs sont tellement insipides et l’animation tellement médiocre avec des effets 3D partout que l’on se demande où est passé le pognon que Ei Aoki a extorqué de ses fans ces dernières années. Entre chaque scène d’action la série a besoin d’expliquer en détail le moindre élément de son scénario, et c’est reparti pour des épisodes entiers où on ne fait que parler jusqu’à rendre le spectateur malade, le tout accompagné par la musique de Sawanul dont je préfère ne pas dire ce que j’en pense (indice : mot de cinq lettres synonyme de « matière fécale »).
Au cas où vous n’auriez pas encore compris je ne pense pas que Re:Creators soit un très bon anime, mais il n’est pas aussi révoltant que son prédécesseur. Du moins, pas si on le prend au premier degré. Car il y a un second niveau de lecture dans Re:Creators, puisque l’anime cherche à explorer le processus de création, et ce qu'il apporte à chacun d'entre nous. En effet, si le Créateur est considéré comme un dieu par ses Créations, cela ne signifie-t-il pas que chacun d'entre nous, capable de créer de la fiction, est en quelque sorte le dieu de son propre monde ? Tous les gens qui bossent dans les animes, les mangas et light novels ne sont-il pas des dieux en puissance ? Mais ces dieux ne sont-ils pas imparfaits lorsqu'ils sont en panne d'inspiration ou que leur création doit être modifiée pour des raison autres qu'artistiques ? Cette volonté de montrer de manière réaliste les joies et les épreuves des créateurs qui travaillent chaque jour dans cette merveilleuse industrie qu’est la japanime est une idée qui aurait pu être louable, un peu comme dans Bakuman ou Shirobako, mais qui selon moi se loupe complètement et fait passer la série dans la catégorie des ratages nauséabonds.
En effet, dans Re:Creators il y a une règle qui stipule que les Créations qui apparaissent dans le monde réel peuvent voir leur pouvoirs améliorés, voire complètement modifiés si leur Créateur décide de changer leur fiche de personnage et que le public approuve un tel changement. Plus une Création est populaire parmi le public, plus elle sera puissante, et toute la seconde moitié de l’anime consiste pour les Créateurs à créer un crossover géant avec toutes les Créations et à utiliser les moyens du gouvernement pour en faire la publicité et rendre le truc populaire afin d’augmenter les pouvoirs des Créations et leur permettre d’affronter le grand méchant.
Autrement dit, ce qui compte ici ce n’est pas de savoir si le Créateur est fier de son œuvre ou pas, si l’évolution du personnages et cohérente et intéressante ou pas. Ce qui compte selon Re:Creators, c’est la popularité, la publicité et l’opinion du public. Sous couvert de célébrer le travail des créateurs, cette série fait en réalité l’apologie du fan-service, du marketing et des phénomènes de mode. Elle ne célèbre pas un art, mais une industrie des animes, mangas et light novels qui inondent le marché de produits de mauvaise qualité plagiés les uns sur les autres, écrit par des pseudo-auteurs trouvés sur des forums de fanfiction sur Internet ou sur des sites de partage de dessins à la con, qui nivellent la japanime vers le bas et font passer l’ensemble de ses fans pour des crétins qui se bâfrent de merde et en redemandent la bouche ouverte chaque saison.
J’ai l’air énervé ? Ouais je suis énervé, comme je l’étais à l’époque de Aldnoah/Zero, car la seule chose que je ne supporte pas c’est d’être pris pour un idiot ; et visiblement Ei Aoki et sa clique de cyniques se sont faits une spécialité de traiter le public comme des vaches prêtes à se faire traire au milieu de leur tas de bouse. Sauf que cette fois ça n’a pas fonctionné, Re:Creators a réalisé des scores de ventes plutôt médiocres au Japon et n’a pas soulevé les foules en Occident. Car ce que Ei Aoki et Aniplex n’ont toujours pas compris, c’est qu’on ne peut pas forcer les gens à aimer une histoire avec de la publicité et du fan-service. Pour que les gens aiment une histoire il faut la créer avec le cœur, pas avec le fric.