Prenez vos places et appréciez le spectacle car Yuri On Ice va mettre le feu sur la glace! Il était temps pour le studio Mappa de confirmer que l'excellent Punchline n'était pas un coup de chance mais bien la preuve que le jeune studio a du potentiel. N'étant pas un grand fan des animes sportifs (et oui encore un type qui séchais la gym) j'avoue avoir passé mon chemin la première fois que j'ai croisé Yuri On Ice, néanmoins j'ai fini par me laisser tenter et l'anime m'a donné l'envie de laisser leur chance à de futurs candidats!
Ça tombe bien me diriez-vous il y a en pléthore en ce moment! Toutefois feront-ils preuve d'autant de jugeotte que la création du studio Mappa? J'ai quelques doutes...
Cela étant je fus d'abord un peu déçu lorsque j'ai abordé Yuri On Ice, car j'attendais l'anime dans un ton plus sérieux. Dès le premier épisode l'oeuvre nous distancie clairement de la détresse de Yuri par le spectacle tragi-comique d'un jeune homme pittoresque et larmoyant, qui compense son échec avec gloutonnerie. Qu'à cela ne tienne, ça rend notre jeune patineur attachant. Sur le même esprit que dans Michiko to Hatchin de la même réalisatrice, l'intrigue fait un bond avec deux rencontres marquantes et qui d'ailleurs soit-disant passant relève d'un concours de circonstance dignes des sites de ragots sur internet:
"genre ma grand-mère était le sosie de Scarlett Johansson quand elle était jeune, du coup quand la star l'a appris via tweeter elle l'a invité à boire des margaritas!"
Mais bon, pourquoi pas, si je regarde des mangas ce n'est pas pour retrouver le réalisme d'un documentaire. Et donc? Oui la rencontre est chouette, Yurio "la tsundère" qui en impose face à "l'incertaine" Yuri sous l'oeil amusé du magnétique Viktor. On partage le quotidien de notre héros qui, comme on aurait pu s'en douter, sera loin d'être de tout repos, littéralement parlant. Un humour qui repose plus sur la voix et le comique d'expression que sur de bonnes répliques, des personnages secondaires sympas, quoiqu'un peu triviaux, mais heureux de vivre!
Moui tout ça c'est cool, sans plus, heureusement l'anime ne perd pas de temps dans son développement et nous propose vite des enjeux à la hauteur de nos espérances. Il faut dire que le rythme est plutôt bien géré, un juste milieu se créer entre instants de complicité et de détente puis instants de pression et de peines, le tout avec quelques fugace moments de battement.
À ce niveau-là c'est comme à la télé on s'y croirait! Le patineur en peine mais qui donne tout, sympa le costume mon grand! quoique les sequins ce ne soit pas trop mon truc! on retient sa respiration pendant les sauts tellement on a peur qu'il se casse la gueule et surtout après sa prestation on s'exclame : " WOAAAA il n'y a pas à dire c'est lui le meilleur!" sauf que, quand vient le suivant, on doute et on se dit : "En fait le patineur précédent n'était peut-être pas si fort que ça, lui par contre..." ensuite on scrute le visage de l'athlète, essayant de déchiffrer les pensées d'un cerveau surement en fusion, et on appréhende la note!
Vous me suivez? Cet aspect-là de la compétition est fort bien restitué, de même les commentaires sportifs sont aussi inspirés que dans la réalité, (Le commentateur qui dit que Phichit patine dans un style très Thaïlandais, oui vous avez pigé! le patineur est effectivement Thaïlandais... quel incroyable sens de l'observation)! Comme je l'ai dit, on stress mais visiblement on est pas les seuls, les personnages aussi et les patineurs n'enchainent pas les triple axel "fingers in the noze", par conséquent cela raffermit quand même un peu la crédibilité de l'anime. Pareil pour les doutes intérieurs qui s'insinuent chez nos héros, et qui ont tous en commun de subir la pression du temps qui passe et qui amenuise leurs chances de grand chelem, on a envie d'y croire.
Du coup? ça se présente pas si mal en fin de compte, bon ok on se mélange un peu les pinceaux avec la flopée d'athlètes qui se battent pour avoir l'attention de la caméra et la nôtre accessoirement. Même s'ils suivent leur script avec une aisance remarquable, ils peuvent pour la plupart être définis en un adjectif, cependant ils sont bienveillant, j'aime bien l'idée d'une compétition où on est tous potes et on s'encourage tous et on fait tous la fête ensemble et plus si affinités! Oui ça fait rêver... (Rooooo mais il nous emmerde lui avec ses sarcasmes à la con!)
C'est clair l'oeuvre est théâtral voire romanesque parfois mais réussi à éviter la parodie ou le divertissement bien démago. Qu'est-ce qui rééquilibre les scores? La complicité?
Oui, mais surtout l'ambiguïté qui plane tout le long de la série sur les relations entre les différents patineurs. Spécialement la connexion entre Yuri et Viktor qui d'une certaine façon est un canevas pour l'anime.
D'ailleurs "Yuri": un mot utilisé pour qualifier les relations que peuvent avoir des femmes entre elles dans une oeuvre de fiction sans être forcément univoque. Parfois amoureux, juste sexuels sinon sensuel, ou bien passionnel, autant de nuances délicatement réexploités par l'anime qui arrive non seulement à rallier son public cible mais aussi à choper plus large avec son subtil lasso.
"Mais mon pote, le "Yuri"c'est n'est pas du Yaoï, ça ne concerne que les gonzesses non?" Et ce n'est pas complétement faux, j'y vois simplement une intéressante analogie car Yuri On Ice c'est quoi si ce n'est l'histoire d'hommes qui assument et revendiquent même, leur part de féminité. Un sujet souvent tabou pour beaucoup. Pourtant à l'instar de la danse( à ce titre je crois me souvenir que plusieurs patineurs dans l'anime prennent des cours de ballet) ou du théâtre, il apparaît comme une évidence dans la série, que ces a priori invisible sont un frein à la créativité et à la sensibilité que requiert la discipline du patinage artistique. Toutefois l'oeuvre a le bon goût de ne pas faire du militantisme et me fait penser dans son refus de définir les genres, à la vision de Gregg Araki dans ses films des années 90. Oui Yuri On Ice est élégant, surtout comparé à d'autres animes sportif qui affiche un fan-service aussi vulgaire qu'un sac rempli de bonbons agité devant les gosses pour Halloween.
Toutefois, tout cela ne pourrait pas passer sans une animation mélodieuse et expressive qui ne tire pas au flanc! On ne peut qu'apprécier l'intelligence des plans amplifiant l'impression de vélocité essentiel au patinage artistique. Yuri On Ice n'est effectivement pas radin et il y a presque autant de séquence patinages par épisodes que de séquences baston dans One Punch Man. Bon c'est vrai, on sent quand même que vers la fin, les types malgré leur bonne volonté, ont du mal à joindre les deux bouts, beaucoup de de plans recyclés notamment. Malgré tout il y a de véritables efforts pour donner un style et des intentions propres à chaque athlète, personne n'est en reste. Mais surtout, Yuri On Ice utilise ouvertement la musique pour marquer l'emphase (difficile de taper sa choré à fond dans le silence me diriez-vous), comme dans ses courts-métrages d'animation Pixar qui envoie le violon, la guitare sèche et le piano pour appuyer les séquences émotions! On est pas dupe mais on marche à fond! Pourquoi? parce que les thèmes sans être transcendants, sont incroyablement justes et en phase avec les sentiments des personnages. Honnêtement je maintiens qu'il faut être un peu rustre pour rester de marbre devant un Yuri pleins de grâce livrant une performance belle et engagée sur les thèmes qui lui sont tout particulièrement dédiés.
La fin qui abjure quelque peu la trame de base de l'anime me laisse dubitatif, le studio probablement stimulé par le succès de la série ne semble en effet, pas vouloir se séparer de la poule aux oeufs d'or (vu comment ils se sont donnés, je peux les comprendre). On peut adhérer plus ou moins à ce final si on considère que cette fin est à l'image des sentiments de Yuri, évoluant sans cesse à mesure que le jeune homme se réalise tant au niveau affectif que professionnel. L'anime à l'instar de son protagoniste prouve donc qu'il a un parfait sens de l'équilibre.Car pour créer une histoire et nous donner envie d'y croire, il faut pleinement habiter son personnage et ne pas faire les choses à moitié, c'est ce que tend à nous montrer le studio Mappa avec Yuri On Ice!