Dire que l’année 2014 était importante pour le studio Ghibli serait un euphémisme. En effet, alors que le film Souvenirs de Marnie venait de sortir au cinéma au Japon, Ghibli annonçait quelques semaines plus tard son retrait de toute production cinématographique. Si beaucoup d’amateurs d’animés ont vu dans cette nouvelle un tournant dans l’histoire de l’animation japonaise, l’année 2014 aura aussi été témoin d’une collaboration étrange entre Ghibli et Polygon Studio pour créer une série télévisée : Sanzoku no Musume Ronya.
Cette oeuvre est l’adaptation d’un conte pour enfant populaire, écrit par l’auteure suédoise Astrid Lindgren. Cette initiative pourra rappeler les séries nées de l’ancien projet World Masterpiece Theater, qui visait à adapter des classiques de la littérature occidentale sous le format d’animes.
Ici l’histoire raconte l’enfance d’une fillette qui grandit parmi une troupe de brigand et découvre le monde extérieur à travers une forêt fantastique. Au fil des années, elle va créer des liens éternels avec son entourage, se lier d’amitié avec un garçon de son âge, et apprendre grâce à ses aventures que la vie de famille n’est pas si simple.
Autant aborder le sujet le plus contentieux dès le départ : Polygon Studio (Sidonia no Kishi) semble avoir été le principal animateur et la série est du coup majoritairement en images de synthèse, ou plus communément dit, en 3D... ce qui ne plaira pas à tout le monde. Est-ce un facteur déterminant ? Certains seront répugnés pour sûr, et un coup d’oeil au trailer est conseillé afin de vous en faire une idée. Personnellement, même si j’en ai une impression mitigée, dans le sens où j’aurais préféré une animation plus traditionnelle, je peux dire que la qualité 3D est au-dessus de la moyenne de 2014, même si le rendu de certains plans éloignés et des cheveux s’avère être assez horrible. En plus positif, l’anime peut aussi être complimenté pour ses superbes paysages.
Sanzoku no Musume Ronya a de plus bénéficié d’une réalisation compétente de la part de Gorō Miyazaki. Même si le fiston reste encore dans l’ombre de son père, il arrive ici à bien capturer l’atmosphère du récit original et de ses éléments fantastiques qui en font le charme. En particulier, j’ai beaucoup apprécié les mises en scène des créatures et leur côté angoissant. Les scènes les plus importantes, les plus sérieuses de manière générale, sont également très réussies.
Hormis le choix de la 3D, la seule décision contestable, mais de taille, est la longueur de la série. Même s’il est compréhensible d’avoir voulu prendre le temps de narrer l’histoire de manière posée, l’étaler sur 26 épisodes donne lieu à un rythme délibéré mais longuet, surtout en début de série. Résultat, les bons moments sont d’autant plus excellents mais les parties les plus inintéressantes deviennent malheureusement bien trop lentes.
Si l’histoire met du temps à démarrer il est en revanche facile de comprendre pourquoi ce livre a eu beaucoup de succès : il est réfléchi, a l’attrait des contes traditionnels, avec un côté parfois cruel notamment, ainsi que des thèmes modernes, comme la relation parent-enfant.
Ronya en tant qu’héroïne est une fille de caractère mais de bonne nature et la voir grandir, maturer et développer ses relations est très agréable à observer. Elle est surtout complémentée par le sympathique et souvent héroïque Birk, un autre enfant de son âge, qui apparaît pendant un bon moment comme le parti le plus sensible et raisonné du groupe. Il faut dire que Ronya tient un peu d’un père sacrément idiot et colérique, à l’opposé de la mère, matrone et pragmatique. Le gigolo de service, Mattis, a ce caractère pour plus d’une raison et termine la série sur une impression bien plus positive, mais cela n’empêche pas le papa d’être très ennuyeux à force de l’entendre beugler pendant une bonne partie de l’intrigue.
Si le rythme lent rend le problème ci-dessus d’autant plus aggravant, il permet également de consacrer un temps conséquent à l’arc principal, à partir de l’épisode 15 jusqu’à l’épisode 23. Après une rupture nette du train train quotidien, la série entame et plonge dans une aventure engageante qui met en avant toutes les qualités de l’anime. Il est alors difficile de ne pas tomber sous le charme.
Autre point positif, Sanzoku no Musume Ronya est une oeuvre complète, qui même si elle se termine sur une fin assez ouverte, apporte une conclusion satisfaisante. Un point assez rare dans le monde des séries animées pour être mentionné.
En conclusion, Sanzoku no Musume Ronya n’est pas un anime que je recommande spécialement, à cause de son format 3D, de ses longueurs et aussi de son manque de disponibilité (bien qu'Amazon en ait récemment fait l'acquisition). Cela n’empêche pas que mon scepticisme de départ a laissé place à une opinion bien plus favorable. Malgré ses défauts, nous avons là une " belle " adaptation d’un beau conte pour enfants.