Special A, encore une comédie romantique classique avec de jeunes demoiselles follement amoureuses de beaux jeunes hommes largement efféminés, le tout dans un petit monde quand même assez « bisounours luxueux » ? Bah même si on n’est pas loin de cette image, on constate au final que l’anime présente quand même quelques subtilités bienvenues.
Une fois n’est pas coutume, commençons par aborder le concept général de la série : dans un lycée de province (donc même pas un établissement de luxe), les 7 meilleurs élèves (pourquoi ce nombre et pas un groupe plus large, aucune idée ?) sont regroupés dans une même classe dans laquelle ils bénéficient d’un luxe assez tapageur par rapport à leurs « camarades ». Une fois les cours de la journée terminés (on n’en voit pas souvent au passage), ils peuvent se détendre dans leurs locaux (une serre gigantesque dont la taille équivaut à celle du bâtiment pour élèves classiques). Les numéros 1 et 2 du classement sont de vieux amis d’enfance qui partagent une passion commune pour le catch et les sports de combat (assez atypique non ?), la seconde désespérant de pouvoir prendre la place de son jeune et beau camarade (une petite romance sortie de derrière les fagots, ça vous intéresse ?).
Si à la lecture de ses premières lignes vous n’avez pas déjà l’impression d’une accumulation de clichés pour jeunes filles, alors permettez-moi de continuer sur quelques autres bizarreries du scénario.
La première étant que bien entendu, hormis l’héroïne (« miss n°2 » pour les intimes), on a droit à un rassemblement de jeunes gens issus de familles plus ou moins fortunées de l’archipel nippon: pas de place pour les bouseux, on se demande d’ailleurs comment Hikari et Kei ont pu se croiser un beau jour (la raison invoquée dans l’introduction étant loin de me satisfaire). En parlant d’elle, malgré son statut d’élève modèle, je ne peux m’empêcher de la trouver un peu stupide sur les bords (et carrément naïve au centre), ce qui me laisse perplexe quant à son appartenance à la Special A.
Ajoutons à cela que tout ce petit monde est au même niveau scolaire, je suis curieux de savoir comment les classements sont réalisés pour avoir une telle uniformité dans le niveau des meilleurs notes (dans mon esprit, un lycée ça va de la seconde à la terminale, mais peut-être que les générations suivantes et précédentes d’élèves sont ici tellement nulles qu’il est inutile de les intégrer au classement général).
Enfin bref, le gros problème que j’ai avec cet anime, c’est l’impression que plus que pour récompenser les notes, la Spécial A n’est créée que pour marquer une limite claire et infranchissable entre les gosses de riches de l’établissement et le reste du petit peuple (Hikari n’étant arrivée là que par simple piston). Et ce ne sont pas les beaux discours moralisateurs sur les efforts et le travail acharné de chacun (j’y crois pas une seconde quand je les vois tranquillement assis devant une tasse de thé dans leur fauteuil pur cuir) qui vont me faire changer d’avis. Et comme en plus, très vite on oublie quasiment le monde extérieur pour se concentrer sur le groupe après une dizaine d’épisodes, ça renforce cette impression d’univers luxueux et isolé.
Contrairement au récent « Baka to Test to Shokanju » qui avait suivi son concept de base d’un bout à l’autre des épisodes (des classes placées et équipées selon le niveau des élèves là aussi), nous offrant au passage une des meilleures comédies de l’année 2010, on retombe dans le cas présent un peu trop facilement dans une ambiance shojo basique. Quitte à faire dans l’univers du luxe, autant ressortir un lycée façon « Ouran High School » (après tout, les différents caractères correspondent bien), parce que là, l’écart entre la Spécial A et les autres classes (à tous points de vue) est beaucoup trop surréaliste à mon goût pour que je puisse trouver le background de l’anime un minimum crédible, ou à défaut en rapport (c’est comme si on mettait côte à côte une vieille 2 chevaux rouillée et une Porsche en fibre de carbone…).
Maintenant que j’ai bien débattu sur le point qui m’a le plus dérangé tout au long des épisodes et que j’ai bien critiqué le fond de la série, je dois admettre que dans la forme, j’ai globalement apprécié l’anime (une fois la première poignée d’épisodes sans réelle surprise passée). Le petit groupe formé par ces 7 étudiants (et quelques protagonistes extérieurs) ne manque pas de caractère, et chacun d’entre eux finira par présenter son lot de surprises à un moment ou un autre. Si au début ils semblent tous un peu coincés dans des stéréotype plus ou moins excessifs, très vite ils vont montrer une facette plus humaine et accessible. L’exemple le plus marquant reste bien entendu le jeune Kei Takishima, véritable bloc de marbre impossible à prendre en défaut durant les premiers épisodes, il ne tardera pas à montrer un comportement plus extraverti au contact de ses camarades, et notamment Hikari pour qui on lui devine des sentiments. C’est d’ailleurs lors des multiples râteaux qu’il enchaînera (la demoiselle étant bien plus attirée par les défis en tous genres, même les plus débiles, que par les affaires de cœur) qu’il nous gratifiera d’une palette de mimiques particulièrement réussies trahissant sa déception ou son énervement.
Qui dit ambiance shojo dit histoires de cœur et pour une fois, celles-ci suivent un cheminement assez « réaliste », avec un début et (dans une certaine mesure) une fin convaincante. Autre bon point, on ne s’intéresse pas uniquement aux deux personnages principaux et les seconds rôles parviendront aussi à trouver le grand amour (parfois de manière surprenante).
Techniquement, l’anime ne réserve pas de surprises niveau graphisme : c’est du shojo pur et dur. Quant aux musiques, il s’agit davantage de bruitages plus ou moins élaborés que de véritables compositions originales, qui repassent en boucle selon les situations.
Pour conclure, voici un anime au concept intéressant mais mal employé qui finit par se perdre définitivement en cours de route, dommage… Mais heureusement, les personnages sont particulièrement réussis et ne manquent pas d’excentricité. Le couple Kei/Hikari restera sans doute pour moi un des plus réussis (pas autant que Harima/Tenma, Kyon/Haruhi ou Takashi/Haruhi et d’autres, mais quand même).