Avant de commencer, cette critique portera sur les deux saisons de la série. Dans le cas de Chuunibyou, la séparation entre les deux saisons n'est en effet pas vraiment justifiée dans la mesure où l'ensemble constitue une histoire qui se suit chronologiquement. Cet avertissement étant fait, la critique peut commencer.
Chuunibyou désigne un trouble psychiatrique qui affecte certains adolescents au Japon. Il consiste en un dédoublement de la personnalité du sujet qui le conduit progressivement à se convaincre qu'il vit dans un monde qui n'existe que dans son esprit. Cette pathologie est au centre du propos de l'anime. Autant le dire d'emblée : j'ai trouvé le concept sur lequel se base la série vraiment intéressant. A plus d'un titre, la série partage en effet des points communs avec NHK ni Youkoso. On est en face d'une tragi-comédie - c'est-à-dire d'une série qui mêle systématiquement passages humoristiques et passages tragiques - qui aborde des thématiques psychologiques lourdes.
L'histoire se centre autour de deux personnages principaux : Yuta, un ancien malade atteint du Chuunibyou, et Rikka, une lycéenne qui est en revanche sévèrement atteinte par le syndrome. Dès lors que leur rencontre se fait, l'objectif principal du scénario est donc de savoir si Rikka va parvenir oui ou non à guérir. Une telle situation initiale est donc l'occasion pour les réalisateurs de la série d'alterner des passages de pure bouffonnerie où Rikka se prend pour une magical girl et d'autres plus dramatiques et sérieux où il s'agit au contraire de comprendre pourquoi Rikka se retrouve dans cette situation. Je dois avouer que j'ai trouvé ce personnage vraiment bien construit, et surtout intéressant à étudier dans la mesure où il permet d'explorer les thèmes très freudiens du traumatisme et de la résilience, c'est-à-dire de la manière dont un sujet est capable de surmonter sa souffrance. On voit donc que du point de vue du développement des personnages, la série n'a rien à envier à NHK ni Youkoso : au-delà du simple comique des situations, il y a un véritable propos. C'est clairement la grande force la série.
A cet élément fondamental de l'intrigue qui est globalement réglé à la fin de la première saison se superpose un autre qui est en revanche d'un classicisme absolu : les relations romantiques qui se nouent progressivement entre les deux malades ou ex-malades. La romance joue en effet un rôle important dans la série. C'est en particulier vrai dans la seconde saison dans la mesure où tout le scénario finit par tourner autour. On pourra citer notamment l'inénarrable triangle amoureux propre à l'écrasante majorité des animes comportant de la romance. La première saison ayant réussi à m'attacher suffisamment aux personnages, je dois dire que cela se laisse suivre mais si cela n'est clairement pas pour de la romance que je me suis décidé à regarder Chuunibyou à l'origine. J'ai donc un avis relativement neutre sur la question même si la chose pourra gêner des cœurs plus froids avant tout intéressés par la problématique freudienne que j'ai mentionnée plus tôt. La romance ne rend pas l'anime meilleur, mais elle ne le rend pas plus mauvais non plus.
Au niveau de l'humour, point important de Chuunibyou s'il en est, j'ai un avis assez mitigé sur la question. Dans les premiers épisodes, les délires narcissiques de Rikka et ses amies à coup de combats remplis d'effets spéciaux fonctionnent plutôt bien. C'est sans doute dû au fait que le spectateur découvre le concept de la série et trouve délirant - à raison - ce décalage entre ce qu'imagine être Rikka et ce qu'elle est réellement, c'est-à-dire une jeune fille comme toutes les autres. Toutefois, je dois bien avouer qu'à force toutes ces scènes grandiloquentes ont fini par me lasser voire m'ennuyer dans la mesure où elles finissaient par prendre trop de place par rapport à l'intrigue en elle-même.
Chuunibyou est donc une série tout à fait honnête. Derrière une romance d'un classicisme à la fois désespérant et efficace, l'anime traite de thématiques assez profondes et peu traitées dans la japanimation. Cela a suffi pour me convaincre. C'est aussi une série qui pourra satisfaire deux publics assez différents du fait de la dimension à la fois comique et tragique de l'oeuvre. Les amateurs d'humour absurde auront ainsi de quoi s'esclaffer tandis que les alficionados de scènes émouvantes et de personnages fouillés trouveront suffisamment de contenu derrière les tribulations de Rikka pour sortir les mouchoirs sans modération. Malgré l'irrégularité du rythme de l'histoire, le 7 s'impose donc sans grande difficulté grâce à cette thématique freudienne vraiment très intéressante à suivre.