Eurêka ! est un one shot dense et propre qui mêle habilement Histoire et fiction. Avec un trait épuré, clair, expressif et précis, ainsi qu'un décor et un contexte historique bien documenté, Hitoshi Iwaaki nous plonge en plein milieu de l'Antiquité, pour suivre l'avancée de Damippos, jeune grec qui se retrouve acteur secondaire du siège de Syracuse.

Damippos est celui qui nous guide à travers cette guerre en montrant une voie autre que celle des deux camps en conflit. Son rôle s'insère discrètement entre les faits historiques et permet de lui donner un statut d'observateur, qu'il partage avec le lecteur. Ce personnage est ingénieux et beau parleur (dans un sens positif), ce qui lui permet de raisonner son interlocuteur ou de s'improviser disciple d'Archimède sans problème. Ses origines et son histoire personnelle ne sont pas claires, mais ses motivations semblent pacifistes et non intéressées. Il est motivé par l'amour de Claudia pour Syracuse et sa famille, et non la soif de conquête et de violence. Ainsi, au milieu d'un conflit qui oppose deux grandes puissances, il nous montre qu'il n'est pas impossible de suivre une autre voie, moins accessible, mais plus pacifique et axée sur les relations humaines.

Bien que fondamentalement grave, ce récit n'est pas dénué de petites touches d'humour, toujours bien placées et bienvenues, souvent sur un ton badin qui va de paire avec le caractère de Damippos. Il y a quelques passages violents, contexte guerrier oblige, mais ils ne sont pas légions et jamais gratuits. Ils montrent les différents dégâts provoqués par l'humain et par les machines, de façon forte, mais sobre.

Je ne peux pas conclure cet avis sans évoquer un quelconque rapport entre Eurêka ! et son prédécesseur, Parasite. Sorti un peu plus de dix ans après, même si on reconnait la patte de l'auteur, Eurêka ! n'a pas grand-chose à voir avec son aîné au niveau du genre, de l'histoire et du développement. Les points communs sont d'ordre stylistique. Le trait d'Iwaaki a évolué et s'est stabilisé, certains personnages en rappellent d'autres de Parasite (clin d’œil volontaire de l'auteur ?), les décors sont soignés et détaillés, le découpage du récit se veut clair et dynamique.

Iwaaki revient ici à ses premiers amours que sont les scénarios historiques et, après lecture, je peux dire que ça lui réussit très bien. À quand la licence d'Historie dans nos contrées ?