Tout d'abord, je tiens à saluer le travail de documentation auquel s'est livré l'auteur pour écrire et dessiner ce manga. Contexte, cartographie, galerie de personnages, reproduction des paysages et accessoires... c'est du très beau boulot. Certes, je n'ai pas été transcendée par la facture même des dessins mais celle-ci reste acceptable.

On connaît bien l'histoire de la baignoire d'Archimède comme on connaît celle de la pomme de Newton, ainsi que quelques autres détails morbides (il a élaboré des machines défensives redoutables et a été assassiné alors qu'il faisait des dessins dans le sable). Ici, nous avons la chance de visualiser le mode d'action des machines à tuer du vénérable inventeur, et de réaliser combien le pauvre vieillard était à mille lieues des intrigues politiques d'alors, et à quelques pas d'une villa d'accueil spécialisée pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Oups, un anachronisme.

Il est agréable d'avoir une vision d'ensemble de la deuxième guerre punique parallèlement à la plongée sur la ligne de front particulière que fut la cité de Syracuse. La découverte de personnages historiques importants mais restés dans l'ombre des plus illustres est tout aussi appréciable. Les gestes quotidiens des femmes et des hommes de l'époque, les quelques clins d'œil parmi les graffitis ornant les murs des maisons sont autant de détails qui alimentent la crédibilité de cette "tranche d'histoire".

Las ! Convaincu que la tragédie en elle-même ne suffisait pas pour accrocher le grand public, le mangaka a choisi de pousser en avant de la scène deux jeunes premiers et leur romance. Sauf que celle-ci m'a laissée du même marbre qu'une colonne ionique. Tout le monde n'est pas capable de réactualiser un Antigone en écrivant des tirades encore plus flamboyantes que celles des Anciens, et de susciter la pitié chez le lecteur devant le double-suicide des amoureux condamnés dès le prologue. Du moins, pas monsieur Hitoshi.

Il en reste que cette lecture fut instructive, je suis sûre que les amateurs d'histoire grecque ancienne sauront pardonner un écart (funeste ! Quasiment grotesque ! Médiocrement shôjôesque !) à ce manga.