Journal d'une disparition porte exactement bien son nom. Ce manga autobiographique d'Hideo Azuma nous plonge sans préambules dans des périodes plus que noires de sa vie. Comment l'auteur décide de disparaître du jour au lendemain ne nous est pas directement expliqué, on plonge dès les premières pages dans sa vie de clochard avec le premier "chapitre" : Marcher dans la nuit. Suivront ensuite "marcher dans la ville" et "le pavillon des alcooliques".
Le point le plus fort de ce manga est que l'auteur nous parle de tout ceci avec une légèreté presque indécente. Le tout servi par son style de dessin tout rondouillard, mignon. On se perd un peu au début dans le propos. Ce type de narration et ce type de dessin empêchent quelque peu le lecteur, au départ, de comprendre la portée de cette disparition et la dureté intense de la vie dehors.
La nonchalance du propos nous fait presque oublier qu'à des moments il dort dehors sous la neige par exemple, et qu'il est passé plusieurs fois proche de la mort.
On a l'impression de lire une histoire alors que l'on parle ici de sa vie.
Bien que son style de dessin soit rondouillard et mignon montrant une envie d'échapper à la retranscription réelle de sa vie à ce moment là, il n'en reste pas moins qu'Azuma maîtrise parfaitement son style et le découpage des cases. On se retrouve ainsi très vite emporté dans son récit, qui se veut finalement très rythmé.
Une histoire peu reluisante, l'auteur ne nous ayant épargné que peu de choses sur sa vie à ce moment là, bien qu'il dise lui-même ne pas avoir tout raconté. Mais beaucoup de portraits justes, honnêtes, des gens qu'il a pu croiser, pour ne pas nous faire oublier la situation sans jamais vraiment juger.
Il finira aussi par nous expliquer pourquoi il a fugué. Nous montrant l'envers du décor du travail de mangaka, qui des fois, craque sous la pression. Expliquant à quoi peuvent correspondre des travaux différents pour plusieurs magazine en transcrivant cela en nombre de pages par jour, tout en n'oubliant pas de nous présenter la pression des éditeurs. Une bonne explication pour les gens qui peuvent encore râler après ce qu'ils pensent être la lenteur de sortie des chapitres de manga.
Il n'omet pas non plus ces passages où il pense ne plus savoir dessiner, et ces moments où le manga n'est plus une passion pour lui mais un travail.
Vraiment, ce manga est un portrait qui amène à réfléchir, il est juste, humble, fait sourire aussi et est très réussi au niveau du travail de mangaka.
À souligner aussi, une discussion avec Tori Miki, auteur ayant cosigné le scénario de Patablor, à la fin du tome, fort intéressante. Nous permettant de plonger un peu plus dans ce manga et dans le recul qu'a l'auteur de tout ceci.