Il n'y a guère d'intrigue dans ces histoires. Leur intimité, leur justesse suffisent amplement. Il s'agit d'amour, de distance et de travail, les fondements de la vie de tout un chacun. Comment tel homme, ou tel autre gère ses émotions et ses regrets après la perte d'un proche. Les dessins (et surtout les pages couleurs) de ces œuvres, sont magnifiques.
La première histoire, Le cheminot, est centrée sur un chef de gare proche de la retraite. Sa ligne n'est guère plus fréquentée sur par quelques lycéens du coin, et le train lui-même est une antiquité qui attire les touristes. C'est l'histoire d'un temps révolu, d'un homme qui, après de longues années de service public irréprochables, peut enfin considérer sa vie passée et faire la paix avec lui-même.
Le dénouement est très attendu. C'est surtout le récit de la disparition d'un métier, condamné par le progrès technique, qui est touchant. On ne réalise le charme rétro et la préciosité des vieux tacots que lorsque ces derniers ont disparu. J'avais l'excellente B.D. La Douce de François Schuiten en tête, ce qui a forcément marqué des points à mes yeux.
La seconde, intitulée La lettre d'amour, dévoile un pan du monde proxénète. Jeu de dupes, d'argent, de l'indifférence ; Goro n'en est qu'un pion. Il a conclu un mariage avec une inconnue, bien sûr une prostituée, sur offre de ses supérieurs. Celle-ci vient de mourir et il s'agit pour lui de jouer le veuf éploré. Tout cela serait cynique si quelques lettres et quelques photos ne venaient pas tout bousculer...
Assez décevante, car cousue de fils blancs et plongeant un peu trop allègrement dans le pathos. Bref, elle a plus plombé la note qu'elle ne m'a plombé moi-même.