Au début, on s’attend à une histoire d’alpinisme comme K ou le Sommet des Dieux. En effet, le manga commence par un magnifique paysage de montagne en double page couleur.

Chargé de s’occuper d’un refuge d’altitude, Shiga se remémore la dernière et fatale expédition de son meilleur ami Sakamoto, douze ans auparavant. Il s’en veut terriblement de ne pas l’avoir accompagné, et s’est depuis fait un devoir de protéger sa femme et sa fille Megumi. Il est devenu une sorte d’oncle pour elle, et l’a d’ailleurs emmenée plusieurs fois en montagne. Mais le scénario prend vite un tournant inattendu pour ceux qui, comme moi, n’avaient pas lu le synopsis : Shiga apprend la disparition de Megumi.

Extrêmement concerné, notre héros prend le train vers Tokyo pour rencontrer la mère de la jeune fille. De peur que la police ne soit inefficace, il décide de lancer ses propres recherches qui le mènent à Shibuya, un quartier animé fréquenté par des jeunes amateurs de bars, de karaokés, de magasins et de boîtes de nuit. Notre ex-alpiniste est quelque peu désorienté par cet environnement étranger, mais il reste déterminé. Il découvre la triste réalité des « relations de soutien » entre des jeunes filles et des hommes plus âgés qui les payent pour les fréquenter. Qu’est-il réellement arrivé à Megumi ? Fugue ou enlèvement ?

L’enquête de Shiga, la violence et le scénario donnent à cette histoire une allure de thriller policier. On est très loin des paisibles récits teintés d’autobiographie si chers à Taniguchi. Il est évident que l’auteur n’est pas vraiment dans son élément, car cette histoire aurait mérité un traitement beaucoup plus sombre, une atmosphère plus inquiétante… Le lecteur ne se sent pas totalement concerné et, plus grave, n’est pas vraiment révolté par ce qui devrait pourtant le choquer. L’ensemble sonne juste et réaliste, mais un renforcement dramatique aurait été bienvenu. Malgré tout, la narration reste efficace et le rythme bien maîtrisé.

Graphiquement, on déplore toujours les mêmes bouilles appliquées aux personnages principaux (Shiga, Megumi et sa mère). C’est d’autant plus dommage que les autres protagonistes ont des visages plutôt variés et réussis. Autre petit souci : le mouvement n’est pas toujours très bien suggéré, l’auteur se limitant souvent à quelques onomatopées, l’exception étant les scènes de combats et le passage dans le nightclub, bien mis en scène. En ce qui concerne les (rares) paysages de montagne et les architectures urbaines y’a rien à dire, c’est précis et parfois majestueux. Ces environnements réalistes et appliqués compensent un peu le manque d’ambiance dont souffre le manga.

Une histoire très prenante aux thèmes inhabituellement graves, mais qui manque un peu de tension dramatique.