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On aura beau grandir, on sera toujours les enfants d'Astro.

» Critique du manga Pluto par StraightDown le
27 Avril 2015
Pluto - Screenshot #1

Aborder une œuvre de Naoki Urasawa est toujours une démarche un peu complexe. Peur de travestir le propos de l'auteur, d'être passé à côté de quelque chose d'important voire d'une incompréhension totale du processus de création. Jusqu'à présent, chacune de ses histoires était le résultat d'une création originale et ne nécessitait donc pas l'étude d'un support autre que celui du récit final. En ce sens, Pluto revêt un caractère unique dont comprendre les origines est essentiel afin de l'apprécier à sa juste valeur.
Ce n'est un secret pour personne, n'importe quel auteur de manga de plus de 40 ans revendique l'héritage laissé par Osamu Tezuka. Il n'y a donc rien de très étonnant à ce que Naoki Urasawa décide un jour d'adapter l'un des chapitres les plus connus d'Astro Boy, Le Robot le plus fort du monde, celui-là même qui serait à l'origine de sa découverte d'Osamu Tezuka.

Sans être identique, l'histoire reprend néanmoins la totalité des personnages et en ajoute même quelques-uns. La première des modifications s'avère être aussi la plus flagrante, le héros n'est pas Astro mais l'inspecteur Gesicht. L'un des sept robots les plus puissants sur terre appartenant à Europole, dont la tâche est d'enquêter sur d'éventuels liens entre plusieurs meurtres perpétrés sur deux des six autres de son calibre, c'est-à-dire des robots de destruction massive.
Impossible de s'y tromper, dès les premières pages nous sommes bien en présence d'un récit de science-fiction où tous les codes du genre sont respectés. On y retrouve d'ailleurs le principe des lois absolues et intransgressable, que les humains exigent de leurs créations ; à l'image des hommes-bêtes dans L'Île du docteur Moreau, des Robots d'Isaac Asimov ou plus récemment dans Blade Runner. Pluto ne fait donc pas dans l'original puisqu'un article de la législation des robots leur interdit de tuer un être humain. Classique, certes, mais pas caricatural comme l'intrigue s'avère être rondement menée de bout en bout avec ce qu'il faut de rebondissements.

Pluto - Screenshot #2Comme à leur habitude, Naoki Urasawa et Takashi Nagasaki savent s'inscrire dans leur époque en questionnant le lecteur sur autant de sujets qu'il y a d'idées. Dans 20th Century Boys par exemple, un virus venu d'Afrique était prophétisé pour devenir une épidémie mondiale en 2014. Dans le cadre de Pluto, c'est principalement le procédé inverse qui est mis en scène comme l'expliquent assez bien les intervenants dans les postfaces des différents tomes.
Dans le chapitre Le Robot le plus fort du monde, l'idée était pour l'auteur de mettre en scène une jeunesse japonaise désabusée face à ses problèmes, la genèse même d'Astro Boy étant une volonté de combler un manque et ainsi apporter une touche d'espoir à toute une génération. Aucune solution miracle n'existe, mais comme le disait le jeune Astro : Je souhaite qu'une ère nouvelle s'ouvre où les robots vivront en harmonie et n'auront pas besoin de se battre.

Par le biais de Pluto, les auteurs souhaitent donc cristalliser notre époque avec un procédé ayant déjà fait ses preuves. Quoi de mieux qu'un robot à qui l'on interdit de réfléchir par lui-même pour représenter l'humanité ? Non pas en tant qu'individualité, dont la complexité est en l'occurrence parfaitement exposée, mais en tant que groupe. Il est d'ailleurs assez intéressant de noter que la plupart des robots ont une apparence humaine, rendant toute forme de stigmatisation physique impossible. De même que sont ici et là présentés des groupuscules terroristes, des savants fous prêts à tout au nom de la science ainsi que certains bourreaux que l'on fini par plaindre, mais cette fois-ci, en tant qu'individualité.

Pluto - Screenshot #3Tout comme dans Monster, les personnages passent le plus clair de leur temps à voyager, l'intrigue ne se déroulant du reste que très peu au Japon. La plupart des scènes naviguent entre l'Allemagne, lieu de résidence du héros, et le royaume de Perse, ancienne dictature prise pour cible par les Nation Unies soupçonnants la dissimulations de robots de destruction massive. Difficile de ne pas y voir de lien direct avec les récentes guerres.
Mais Pluto va bien plus loin que la simple critique sociale, car elle sait rester brillante, accessible et divertissante, tout en proposant une double lecture bienvenue.
Malheureusement, une fois la seconde lecture intégrée, certains aspects semblent parfois un peu expédiés car peu approfondis, plus par manque de temps que par une quelconque incompétence, peut-être aurait-il été intéressant de prolonger l'aventure de quelques tomes. L'idée est là, sa matérialisation aussi, mais pas toujours son explication ni son intention, dommage.

Malgré tout, Pluto reste une lecture intelligible et intelligente et dont y revenir à intervalles réguliers doit s'avérer nécessaire.

Verdict :9/10
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A propos de l'auteur

StraightDown, inscrit depuis le 14/08/2012.
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