Quelle justesse !
Je crois que ce sont les meilleures histoires courtes réalistes que j'ai pu lire jusqu'à la rédaction de cette critique.
Tout d'abord, le dessin et les intrigues sont très soignés.
Ces dernières ayant été très bien présentées par Femto, je zappe la redite.
Une poésie touchante émane de ces œuvres. Pas de la poésie épique ou romantique, rimée, fleurie ou célébrant la mère Nature... mais celle qui, discrète, survit à la vie urbaine, avec autant de force qu'un parterre de tulipes sur les bords du périphérique, et plus de brio que les pauvres vers plaqués au-dessus des têtes des usagers du métro.
Elle réside dans une réflexion douce-amère sur la vie menée par les femmes et les hommes : le poids des codes et des conventions, celui du jeu des apparences. Qu'est-ce que la "normalité" et la "marginalité" ? Peut-on toujours exprimer un "soi" original, ou bien est-on toujours soumis à nos "habitus" (définition de Pierre Bourdieu), qui nous placent au sein de la société ?
La palette de tons employés est très riche.
A Strange Gene et Strange Trait, outre un nom commun commun (ah oui elle était bonne celle-ci je sais ! Home-made), traitent particulièrement du regard social dans le monde scolaire puis professionnel, regard qui touche et conditionne tout le monde. The rainbow Fish également, mais avec moins de pessimisme - ou en nuançant, d'ironie désabusée. Damned Sun évoque également la question, mais cette fois-ci ce n'est pas l'élément structurant le récit. L'ambiance est également beaucoup plus pesante, mortifère, ambivalente avec un "clair-obscur" littéral et surtout moral très marquant.