Vinland Saga T8 – Avalon
Pour les deux du fond qui seraient passés à côté de ce qui est peut-être le meilleur seinen en cours de parution, Vinland Saga nous plonge en plein cœur des batailles vikings à leur apogée, en 1013. Les guerriers norrois dominent alors l’Angleterre et s’apprêtent à fondre sur le reste de l’Europe. Dans vingt ans, nous fêterons le millénaire de la mort du Christ qui doit normalement annoncer la fin du monde et il ne faut pas beaucoup d’imagination aux chrétiens de l’époque pour voir dans les Danois les guerriers de l’Apocalypse. Violents, ils n’aiment que se battre et prendre tout ce qu’ils voient, or ou femmes.
Dans ce chaos, le lecteur suit les aventures de Thorfinn qui a juré de se venger du trouble Askelaad, l’assassin de son père. Pour ne pas perdre sa proie de ses yeux, le jeune homme s’est mis au service du vieux mercenaire. Ils vont croiser la route du prince Knut, fils cadet du roi du Danemark et des Vikings. Askelaad voit dans le prince la chance de se venger des Norrois qu’il exècre. Après le changement radical de personnalité du prince et le ralliement du fou Thorkell et ses hommes, Knut, conseillé par Askelaad, part « affronter » son père pour lui piquer la couronne.
Nous retrouvons cette alliance d’intérêts là où nous l’avions laissée à la fin des tomes précédents. La violence et la simplicité presque puérile des premiers combats laissent place au jeu non moins terrible – voire plus cruel encore – de la politique. Nous rentrons dans les arcanes du pouvoir des guerriers nordiques, clans unis par la main de fer dans le gant de fer du roi Sven. Le vieux guerrier ne peut baisser sa garde un seul instant. Il ne peut faire assassiner ouvertement son fils cadet ambitieux qui a gagné le respect des hommes de troupe et d’une partie des nobles en gagnant l’allégeance de Thorkell et par là même la position stratégique de la ville de Londres. Mais Sven à la barbe fourchue ne peut également ni ignorer les complots de son fils ni, à plus long terme, courir le danger d’une guerre de succession entre les deux frères.
Oubliez l’idée d’un récit manichéen, il n’y a ici aucun innocent. Ou alors ils sont à chercher dans les tas de cadavres. L’auteur de PlanetES ne nous épargne pas. Le petit Thorfinn est un meurtrier ivre de vengeance et il n’hésite pas à faire couler le sang de quiconque se met en travers de son chemin. Askelaad a toujours plusieurs coups d’avance dans sa manche et il frappe toujours rapidement, au moment où on s’y attend le moins, toujours pour tuer. Knut, s’il peut faire penser au premier abord à l’idéal du Prince machiavélique qui certes se salit les mains mais dans un idéal de bonheur de son peuple, apparait en fait comme un être d’une incroyable froideur isolé en fait dans son combat pour faire la nique à Dieu, rien de moins. Paradoxalement, ce fou sanguinaire de Thorkell, malgré sa psychopathie, est presque le plus « sain » de la bande : au moins il ne joue pas double voire triple jeu.
Il m’est difficile d’aborder la première partie sans gâcher énormément la surprise. Je dirais seulement ceci : primo, Makoto YUKIMURA a plus d’un point commun avec Georges R.R. Martin dans sa capacité à créer à la surprise et secundo, le « feignant » – comme il se définit – démontre une nouvelle fois son talent à retranscrire les combats et mettre en scène. Il a un sens maladif du rythme et du détail, que ce soit dans les décors, d’une richesse inégalée en matière de manga (ce qui souligne aux yeux de certains le côté occidental des travaux du japonais) ou dans l’histoire. La première partie se lit en apnée, estomaqué devant les dessins et les tripes de l’auteur. Ce tome 8 prend un virage pour le moins inattendu et bien malin sera celui qui pourra dire de quoi seront fait les volumes suivants.
Mais là où un auteur ordinaire aurait conclu classiquement sur un cliffhanger des familles pour laisser le lecteur dans la frustration de la conclusion, YUKIMURA est encore plus vache avec nous et commence dans la deuxième partie à poser les bases de ce qui nous attendra d’ici quelques mois. L’attente est encore plus longue cependant car si les livres d’Histoire nous donnent des pistes pour imaginer la suite, on ne voit que les grandes lignes et le mangaka a réussi plus souvent qu’il ne faut à se nicher dans les détails. Bienvenue dans le royaume de la fin des temps.
10 commentaires
On ne peut pas dire que Yukimura se tourne les pouces !
Et merci de ne pas avoir spoilé dans ton article Aflo, la surprise était bien au rendez-vous :)
Mais maintenant Aflo, je crève d'envie de savoir ce qui se passe dans le tome 8, bravo! ; )
Je corrige : "peut être le second meilleur seinen en cours de parution".
Bha oui parce que le meilleur c'est Berserk :p *fanboy*
Encore un article parlant des bienfait de la série. Même si je suis un extrémiste convaincu que le manga de Miura est le meilleur tout fantasy confondu sans même avoir tout essayé, Vinland est le seul qui me tente un minimum.
Un jour je me laisserai tenter.
Ce manga faisait déjà partie des titres que je suis avec le plus d'impatience, et dont je découvre à chaque fois les nouveaux tomes avec fébrilité. Le tome 8 ne fait que confirmer : Vinland Saga est un de mes préférés. Je n'arrive pas à lui trouver de défauts, c'en est presque énervant.
VINLAND SAGA c'est du solide, l'intrigue suit son cours, certains des protagonistes évoluent de manière surprenante... Ah que oui! Puis sinon il y a aussi la réflexion sur "ce qu'est être un grand/vrai guerrier" qui prend/gagne plus de sens encore.. Hé hé! Et d'autres choses à suivre encore..
Madré Mia c'est oune vrai plaisir que de suivre ce manga. 3 3 3>>>